Ascension vers le monde du Dessus

La boîte à jouets de campagne n°5

En quelques mots

Prenez votre classique descente de donjon et inversez simplement la direction. Faites du monde souterrain le foyer sûr, et le monde au-dessus le lieu du danger, des ennemis et des trésors cachés.

L’histoire

Votre univers d'heroic-fantasy classique a au moins une, sinon plusieurs espèces qui habitent sous terre. À défaut, il y a beaucoup de raisons pour lesquelles une société ou un groupe séparatiste d’êtres humains choisiraient de vivre sous terre. De plus, votre palais ou grande ville médiévale typique a des centaines de kilomètres d’égouts sous elle, et beaucoup plus si elle est construite sur les flancs d’une colline criblée de cavernes.

Le monde du dessous n’a pas grand-chose pour lui – peu de nourriture (quelques rats et champignons), une mauvaise ventilation, l’obscurité constante – mais il se développe en toute sécurité. Le monde du dessus est l’opposé : abondance de nourriture – qui traîne simplement sur les étals et les tables –, l’air pur, un grand soleil – mais il est plein de dangers.

Vos ennemis peuvent vous voir à plusieurs kilomètres, nettement sur des lignes bien droites, et dans cet univers de propreté on vous voit comme le nez au milieu de la figure avec vos haillons tachés de suie. Il y a des gardes partout, prêts à vous renvoyer dans votre trou ou à vous envoyer dans une geôle. Mais si vous êtes malin et que vous vous astreignez à des sorties de courte durée, vous pouvez manger correctement, goûter à l’aventure et si vous démolissez quelques grandes “créatures”, vous pouvez rentrer à la maison avec une rançon de roi en petite monnaie.

En fait, toute une culture s’est créée autour de ces aventuriers du monde supérieur. Il faut une personne très singulière pour se risquer dans le monde du dessus – certains diraient même, une personne plutôt cinglée. Mais néanmoins, ces gens existent, et les plus braves et les meilleurs reviennent avec des histoires extraordinaires et d’étranges trésors, et peuvent même devenir les héros de chansons et de légendes.

Style et structure

Tout renversement conceptuel est un travail difficile. Vous n’avez pas envie que vos joueurs trouvent qu’il est trop facile d’inverser leur façon de penser, parce qu’au final ils auraient l’impression de faire exactement la même chose que de la fantasy de base. De plus, si vous passez constamment tout à travers le miroir, cela deviendra d’une mièvrerie insupportable.

N’allez pas trop loin dans la manipulation des concepts fondamentaux – même dans l’obscurité il subsiste toujours quelque chose comme le matin et soir, et l’ombre et la lumière ont toujours la même signification. De même, tout comme la plupart des joueurs de D&D n’ont pas envie de tenir compte du cycle de vie de chaque torche qu’ils allument, ici les PJ ne devraient pas avoir à vérifier à chaque tour s’ils savent qu’il ne faut pas regarder directement le soleil ou que “l’étrange quadrupède” est un cheval.

Par contre, il peut être très amusant de penser à toutes les analogies possibles avec D&D – au lieu des torches contre l’obscurité, peut-être les fouineurs-de-cités auront-ils besoin de porter des verres fumés pour se protéger les yeux du soleil. Peut-être que la compétence des nains pour comprendre le travail de la pierre peut maintenant se transformer en “Instinct de la rue”, permettant à ses utilisateurs de deviner où débouche n’importe quelle rue. Peut-être que la vase grise des roches peut être remplacée par les spores des sables, le poison auquel les gens du dessus sont totalement immunisés. Encore une fois, ne tombez pas dans l’absurdité, mais le simple fait d’évoluer dans le monde du dessus doit être dangereux.

C’est avec les intrigues que vous risquez de tomber dans la mièvrerie redoutée. Résistez à l’idée d‘envoyer les persos explorer des manoirs pleins de pièges et de portes verrouillées, pour trouver un gigantesque noble blotti dans son antre aux trésors ! Commencez vos intrigues à partir de zéro, en considérant les ennemis du monde du dessous, et les ressources ou les indices que le monde du dessus pourra fournir pour les stopper. N’ayez pas peur non plus de proposer quelques aventures sous terre – il est essentiel que le monde du dessus reste aussi exotique que dangereux et l’élément-clé est de créer le sentiment que le monde souterrain est un chez-soi réconfortant.

PJ et PNJ

Ce qu’il y a d’amusant dans le concept, c’est de piocher dans la boîte à outils de votre univers heroic-fantasy. Nous avons tous tué des gobelins, kobolds et d’innombrables autres types de sous-terriens ; maintenant vous devez créer une société pour eux, et choisir vos PJ et PNJ en fonction.

Les PNJ peuvent être basés sur le modèle de n’importe quel village ou ville fantasy, avec juste quelques petits ajustements à la vie souterraine (agriculture de champignons, élevage de scarabées, etc.) ou à une population monstrueuse (changez les dieux du temple, remplacez la traditionnelle soirée de danses du village par une soirée de chants guerriers, etc.). Vous pouvez même choisir de commencer avec les derniers ennemis que vos plus récents PJ ont combattus ou vaincus, ou, plus tard, envoyer vos PJ se battre contre leurs précédentes identités.

Bien que vous puissiez penser que les joueurs ne voudraient pas tuer leurs propres créations, en réalité beaucoup d’entre eux savourent le défi tactique de les affronter, ou le plaisir roleplay de changer radicalement de points de vue.

Intrigues et méchants

Bien qu’il soit amusant – pour un one-shot – de tuer des gardiens d’égouts ou des groupes d’aventuriers descendus dans les souterrains, il faut plus que cela pour qu’une campagne dans le monde souterrain soit réussie. Donc, qu’est-ce qui menace le monde souterrain ? La première réponse est tout ce qui menace la ville au-dessus – les égouts sont aussi bien emm… qu’un manoir si une porte de l’Enfer s’ouvre au milieu de la place du village, après tout.

Et de fait, l’un des principaux thèmes que vous pouvez aborder quelle que soit l’intrigue choisie, est que vos mondes du dessus et du dessous sont liés d’une façon inaltérable, dans une relation symbiotique, et peuvent même être obligés de s’entraider pour survivre à la catastrophe qui s’approche. Quant à quelle catastrophe choisir, il existe beaucoup de scénarios urbains dans lesquels piocher, tant qu’on ne demande pas aux PJ d’assister à des bals, des réunions du Conseil ou quelque chose dans le genre – quoique, à bien y réfléchir, imaginer comment s’inviter dans ce genre de fête peut être aussi amusant que se demander comment s’incruster dans un festival gobelin.

Sources

Ces idées proviennent directement du jeu de rôle, donc il y a assez peu de sources dans les autres médias. Les cultures des peuples souterrains apparaissent dans beaucoup d’histoires, et bien qu’elles soient souvent sous nos villes modernes, elles font quand même une bonne inspiration.

Le film Delicatessen (wiki) de Jean-Pierre Jeunet montre une société troglodyte post-apocalyptique assez sympa. Neverwhere (wiki) de Neil Gaiman est un miroir sombre du Londres d’En Bas et Subway (wiki) de Luc Besson en fait de même pour le métro de Paris, sans le surnaturel.

Beaucoup de films d’horreur ont utilisé le classique C.H.U.D. (Cannibal Humanoid Underground Dwellers – Humanoïdes Cannibales Vivant Sous terre).

Entre-temps, pour une source un peu en marge, regardez une nouvelle fois Matrix (wiki), parce que s’introduire dans un programme envoie le héros depuis un monde obscur et souterrain dans le chaos d’une grande ville très éclairée, où n’importe qui peut être une menace et où vous devez souvent vous engouffrer dans la sortie la plus proche.

Jeux de Rôles

Les guides de cités sont un passage obligé en JdR. La plupart des JdR fantastiques en ont et qui dit ville dit souvent société souterraine également. Quelques récentes œuvres épiques comme Ptolus (grog) et World’s Largest City (grog) ont certainement beaucoup de zones où l’aventure se joue en remontée des bas-fonds plutôt qu'en descendant des hautes sphères.

Même si les vrais scénarios urbains sont moins fréquents, et ceux qui peuvent être inversés encore moins, il y en a malgré tout quelques-uns. Le scénario classique de Warhammer, Ombres sur Bögenhafen (1), pourrait être entièrement mené à partir d’une perspective souterraine ; de même la Trilogie Freeport (2) des éditions Green Ronin.

Enfin, quand il s’agit de voir les choses du point de vue des autres, les textes essentiels sont Orkworld (grog) de John Wick et Ork! (grog) de Chris Pramas. Bien qu’ils soient tous les deux épuisés, ils valent qu’on les traque. À défaut, procurez-vous l’Outreterre (grog) et devenez un Drow – avec ou sans une paire de cimeterres.

Article original : Campaign Toybox #5 : Ascent to the overlord

Sélection de commentaires

Craig Oxbrow

La description du cheval m'a fait penser à Paranoïa... qui se passe après quelque catastrophe apocalyptique, mais pourrait tout aussi bien se passer de nos jours...

Castiglione

Ce n'est pas nouveau : Monsters! Monsters! - JdR dérivé de Tunnels & Trolls l'a fait en 1976 ou 1977; à peine un ou deux ans après la parution de T&T lui-même.

Les rôlistes n'ont pas attendu longtemps pour se demander ce que cela fait d'être un monstre et de lancer des raids sur les villages, les bourgs et les cités, en quête d'or et de geuses avenantes, après avoir vidé donjon après donjon. La 4e édition de T&T contenait même des règles pour jouer des monstres et mener des "expéditions villageoises" [village crawling , néologisme de dungeon crawling, la lente progression dans les donjons]... en gros, vous obteniez des XP pour des actes monstrueux et la capture de jolis membres du sexe opposé.

Steve Darlington

Oui, mais ça ne parle que peu de monter des profondeurs ; il s'agit plutôt d'aller au village d'à côté. Mon idée est moins de jouer des monstres que de jouer une inversion : mettre les humains sous la cité monstrueuse.

Wyvern76

Dans les sources, j'ajouterai La Belle et la Bête (la série télé), et dans les JdR, Underworld, de Gareth-Michael Skarka.

(1) NdT : Le deuxième scénario de la fameuse Campagne Impériale (grog). [Retour]

(2) NdT : La trilogie Freeport (grog) comprend Terreur à Freeport, Mort à Freeport et Démences à Freeport. [Retour]

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