Retrospective: En Garde !

© 2009 James Maliszewski

Le fait que le jeu de rôles soit issu des wargames avec figurines est bien connu ; cela paraîtra évident à quiconque a lu la toute première édition de OD&D. Ce qui est moins connu est que la relation avec le wargame n’a pas été immédiatement retirée une fois que les gens ont commencé à se pencher sur cette idée de jeu de rôles. Beaucoup de manières de créer des JdR des années 1970 montrent encore une forte connexion avec les wargames, tels que Boot Hill ^grog [duels et autres bagarres au Far-West (NdT)]. Un autre jeu similaire est En Garde ! ^grog édité par Games Designer’s Workshop.

Publié pour la première fois en 1975, ce qui en fait un proche contemporain de OD&D, En Garde ! est un jeu atypique. Sous-titré « Être dans l’ensemble un Jeu sur la Vie et l’époque d’un Gentilhomme Aventureux et ses Compagnons », c’est au fond un simulateur de duels individuels dans le Paris du XVII^e siècle mais avec des options orientées roleplay pour ce qui est en dehors des duels, comme faire la bringue en société, courtiser de potentielles maîtresses et partir en guerre avec l’armée.

Le système de duel a cependant les mécanismes les plus complexes du jeu et le système de combat est intelligemment fait. Chaque joueur choisit une arme et une série de douze manœuvres. On révèle ensuite ces mouvements et on les croise sur une table qui détermine leur efficacité relative. C’est certes simple, mais permet l’utilisation de tactiques puisque les joueurs peuvent savoir quelles attaques ou défenses fonctionnent mieux contre d’autres. Il y avait aussi des règles pour annuler certains mouvements pour répondre à ceux de l’adversaire, donc le système de duel n’était pas entièrement « mécanisé ».

En son cœur, En Garde ! est un jeu d’ascension sociale. La motivation principale des actions des personnages est de gagner du statut sous la forme d’influence sociale, de richesse et position. Chaque activité dans le jeu est orientée à cette fin, augmentant ou abaissant le statut social du personnage selon ses réussites et échecs. Chaque activité est dirigée par une table et des mécanismes simples, et vous pouvez clairement voir le début de Traveller ^grog dans ces règles. Le service militaire, par exemple, nécessite de choisir entre des postes sûrs (ou lâches), pour assurer sa survie, et des postes dangereux qui peuvent faire bondir le statut du personnage – s’il survit. Ces règles sont simples aussi, mais, comme celles du duel, les joueurs doivent faire une analyse coût-bénéfice des actions de leur personnage et, grâce à l’utilisation de tables aléatoires, même le choix le plus prudent ne finira pas forcément bien.

Même comparé à OD&D, En Garde ! est bien plus un wargame que ce que l’on considère aujourd’hui comme un jeu de rôles. Ses composantes  « ludistes » pèsent beaucoup et, bien que je sache qu’il est possible de tirer beaucoup de vie de ces règles, il serait aussi possible de traiter le tout comme un jeu de hasard. Peut-être sans surprise, En Garde ! était très adapté au jeu par correspondance, lui donnant une sorte de seconde vie après que GDW ait cessé de la publier en 1983.

Ce jeu s’est aussi avéré être très populaire en convention, particulièrement au Royaume-Unis. Bien sûr, le jeu continue de vivre de nos jours grâce à une entreprise britannique qui a sorti une nouvelle édition [en anglais], que l’on peut acheter ici. Je suis surpris de ne pas avoir vu plus de parties de En Garde ! en ligne, parce que je pense qu’il fonctionnerait bien avec ce média. Mince, j’imagine qu’il serait assez facile de créer une application simple qui ferait tourner le jeu sur un site internet et ce serait sûrement très amusant d’y jouer.

Article original : Retrospective : En Garde