Du boulot pour les copains
© 2004 Steve Darlington
Parlons jeu de rôle et carrière dans les jeux vidéo avec Erick Wujcik
Récemment, Marc Vezina, concepteur de jeux depuis longtemps, développeur et gros bonnet de Dream Pod Nine (Heavy Gear, Tribe 8) a annonçé qu’il quittait le secteur du jeu de rôle pour un travail plus rémunérateur juste à côté, dans l’industrie du jeu vidéo.
Un tel plan de carrière n’est guère nouveau dans le milieu ; Greg Costikyan raconte son départ dans les années 80 sur son site web, et plus récemment de grands noms comme John Tynes ou Dennis Dettwiller ont suivi le même chemin. En réalité, ceci s’est répété avec une fréquence si alarmante ces derniers temps que certains se sont demandés si la tendance ne représentait pas une dangereuse “fuite des cerveaux” de nos concepteurs de talent, courtisés par une industrie qui leur paie des sommes que le jeu de rôle ne pourrait jamais rêver leur offrir.
Erick Wujcik est un autre créateur de JdR qui travaille dans d’autres domaines. Ses œuvres incluent des jeux de rôles notables comme Teenage Mutant Ninja Turtles (grog) et Ninja & Superspies, de Palladium Games. Il fonda également sa propre entreprise, Phage Press, pour publier son JdR Ambre, Le jeu de rôle sans dés (grog), un travail qui fut révolutionnaire à la fois dans son système de jeu et dans son concept. Bien qu’Erick soit encore impliqué dans le milieu du jeu de rôle sur table, il a relevé de nouveaux défis, entre autres dans l’industrie informatique. Après avoir terminé un cycle de conférences sur la conception de jeu, il revient aujourd’hui en Amérique et est de retour sur le marché du travail. Sur son chemin, il est passé par l’Australie, et je l’ai attrapé au vol pour lui poser quelques questions sur la vie et les projets d’un ex-concepteur de jeu.
Erick, merci de me consacrer un peu de ton temps.
Pas de problème, Steve ! J’adore Places to Go People to Be !
Il est bien sûr loin d’être exact de dire que tu as quitté l’industrie du jeu : non seulement tu continues à diriger Phage Press et de publier Amberzine, mais tu continues également à travailler en indépendant, puisque tu viens juste d’écrire Wolfen Empire (le dernier supplément pour Palladium Fantasy), et de faire la mise à jour “After the Bomb RPG” de TMNT&OS RPG (Teenage Mutant Ninja Turltle & other Strangeness RolePlaying Game). Cependant tu sembles aussi avoir un “travail de jour”. Alors, te décrirais-tu plus comme un indépendant ou comme un professionnel ? Y a-t-il en fait une véritable distinction entre les deux ?
Je resterai dans l’industrie du jeu, même si pour cela je devais fabriquer des dés, passer le balai dans un magasin de jeux ou, comme je l’ai fait plus récemment, donner des cours en conception de jeu. Bien qu’il y ait une différence entre écrire des livres de jeu de rôle et écrire des notes de conception pour les jeux vidéo, tout cela fait partie de la même industrie du jeu ; ils impliquent tous deux la création d’une nourriture pour l’esprit des gens qui aiment un loisir imaginaire, virtuel et interactif.
Dans mon cas, écrire des jeux de rôles a toujours été un truc d’indépendant. J’étais indépendant dès les premiers petits bouts de textes que j’ai écrits en 1982 pour le premier JdR de Palladium, The Mechanoid Invasion, puis tout au long de mon travail sur divers produits de Palladium, les passages de Paranoïa que j’ai faits pour West End Games, et même le travail que j’ai fait pour ma propre entreprise, Phage Press. Le fait est que je n’ai jamais reçu de feuille de paie pour tout le travail que j’ai fait pour le jeu de rôle.
Si les droits de mes écrits dans le JdR m’ont permis, de temps en temps, d’avoir beaucoup de liberté, j’ai travaillé de façon continue dans un “travail de jour” dès le début, lorsque j’étais opérateur informatique de nuit dans un journal. La différence, depuis la fin 1997, est que j’ai eu des boulots principaux, à commencer par Sierra Studios, où je devais aussi concevoir des jeux pour gagner mon pain.
J’ai commencé comme indépendant et je le suis toujours. Entre les deux, longtemps avant que je décroche mon travail chez Sierra, on m’a collé l’étiquette de “professionnel” (mais je n’ai aucune idée de comment c’est arrivé – peut-être lorsque les conventions ont commencé à m’inviter).
Comme tu l’as dit, tu as récemment eu le titre de professeur assistant en conception de jeu à l’université polytechnique de Hong-Kong. Beaucoup seraient simplement surpris du fait qu’une telle matière soit enseignée à l’université, sans parler que l’on puisse en être professeur. Quelle est la nature de ces cours et qu’apprends-tu exactement à tes étudiants ? Existe-t-il un diplôme de conception de jeu que l’on puisse obtenir ?
Il se trouve que j’étais impliqué dans le milieu du jeu “universitaire” longtemps avant l’existence commerciale des jeux des rôles, c’était en 1970 (des années avant le D&D de TSR).
Le Dr. Andrew, mon professeur de “politique internationale”, était un des universitaires en science politique. Il avait commencé dans les années 60 et était intéressé par le jeu en tant qu’outil de simulation et d’enseignement. Un élément de mon cours était que chaque étudiant devait participer à une partie de Diplomacy qui durait un semestre. C’était un peu différent de la version jeu de société, en cela que chaque étudiant/joueur rejoignait un groupe représentatif des gouvernements de la période de la Première Guerre mondiale. Ainsi la France avait un Parlement de 14 membres qui votait pour le mouvement de chaque armée, alors que l’Allemagne ne comprenait qu’un Kaiser, deux généraux et un amiral.
Depuis cette période, j’ai suivi ce qui se passait dans le domaine du jeu à l’université, et j’ai même enseigné quelques cours de jeu à l’université du Michigan (qui offrait un Master’s Certificate en jeu jusqu’à ce que le professeur Richard Duke prenne sa retraite). Avoir un job à plein temps comme professeur de conception de jeu n’était pas un effort insurmontable.
De nos jours, la plupart des programmes universitaires sur le jeu tournent autour de l’industrie croissante du jeu vidéo. Jetez un œil à la section éducation de Gamasutra et vous trouverez, aujourd’hui, deux cent sept institutions dans le monde qui proposent des programmes sur le jeu d’un type ou un autre. En plus des écoles “spécialisées”, comme Full Sail (en Floride) et Digipen (à Redmond dans l’état de Washington), un grand nombre d’universités, d’écoles techniques et d’écoles d’art offrent des programmes pour ceux qui s’intéressent aux jeux. La plupart des diplômes liés au jeu comportent le terme “multimédia”, mais il est probable de voir de plus en plus l’accent mis sur la conception de jeu, et à terme, même sur le jeu de rôle.
Il est intéressant de noter que les jeux ont une influence sur de nombreux domaines. Quand j’étais à Sydney, une grande conférence s’est tenue sur le jeu et les arts, et en août dernier le premier concert symphonique de musique de jeu s’est tenu à Leipzig en Allemagne.
Je comprends aussi que tu as été invité à faire quelques cours alors que tu étais en Australie. Comment était-ce ? Est-ce que ce style de vie de jet set, de “célébrité” est typique pour toi, ou pour les ex-créateur de JdR en général ?
Difficile pour moi de dire ce qui est “typique”. Ma première semaine à Sydney a commencé par une apparition en tant qu’invité au Necronomicon (superbe convention, au passage !), où j’ai partagé une chambre avec trois rôlistes chez un des organisateurs de la conv’, puis maîtrisé ou joué de tôt le matin jusqu’à tard dans la nuit, et où j’ai terminé par un exposé de mes idées très arrêtées sur comment les rôlistes australiens devaient créer leur propre marché. Le jour suivant j’ai été logé dans un joli petit hôtel par l’École des Technologies de l’Information de l’université de Sydney, pour laquelle j’ai donné une présentation multimédia sur le thème “Création de jeux et jeux de création : créativité, innovation et techniques de collaboration dans la technologie et le design multimédia.”
Personnellement, j’adore le jeu de rôle, et le jeu. Les gens apprécient généralement mes exposés, donc c’est assez typique pour moi. D’un autre côté, l’Australie est seulement le second pays que je visite où je me suis adressé à autant d’officiels du gouvernement qui voulaient entendre ce que j’avais à dire sur la croissance de l’industrie des jeux.
Alors penses-tu que les cours sur le jeu vont être de plus en plus importants à l’avenir, menés par des opportunités d’emploi en nombre croissant pour les concepteurs de jeu ? Est-ce le prochain grand secteur de croissance du nouveau millénaire ? Est-ce que les jeunes concepteurs qui montent – en JdR ou en jeu vidéo – doivent envisager l’inscription à de tels cours ? Ou en fait doivent-ils plutôt chercher un emploi dans l’enseignement de ce domaine ?
Si on considère que l’industrie du jeu vidéo, d’après la plupart des experts, a maintenant dépassé l’industrie du cinéma, je le qualifierais certainement de “grand secteur de croissance”. En fait, j’ai vu des chiffres qui estimaient que le chiffre d’affaires mondial annuel pour le jeu serait de 77 milliards de dollars d’ici 10 ans.
D’un autre côté, que le secteur du jeu soit immense ou minuscule, mon conseil aux jeunes est toujours le même : faites ce que vous aimez. Il y a très très longtemps que les forgerons (maréchaux-ferrant) n’ont pas été considérés comme une profession “à la pointe”, mais j’ai lu récemment qu’il y a plus de chevaux aux États-Unis aujourd’hui qu’avant l’introduction de l’automobile, et ce n’est pas une si mauvaise carrière que ça pour quelqu’un qui aime les chevaux.
C’est la même chose pour le jeu. Et l’enseignement.
Dans mon cas, je me suis juste avéré être quelqu’un qui apprécie énormément le jeu et l’enseignement, et c’est une joie d’enseigner aux gens un sujet que j’aime.
Les cours que tu donnais étaient-ils principalement centrés sur le jeu vidéo ?
En fait, je ne me focalisais pas sur le jeu vidéo dans mes cours. J’essayais au contraire d’enseigner les bases de la conception de jeu, à partir de la théorie du jeu, pour que mes étudiants comprennent les fondamentaux. Selon moi, un bon concepteur de jeu doit être familier avec une large gamme de jeux, pour que la créativité ne soit pas limitée à une simple amélioration du best-seller de l’année précédente.
Mais le jeu vidéo est le pilier des jeux de loisirs et, comme tu l’as dit, il grossit en permanence. Verrons-nous un futur où les jeux de réalité virtuelle domineront la culture humaine ? Et comment réagiront (ou devraient réagir) les jeux de rôles sur table à ce futur ?
Oui, je crois en un avenir où le jeu dominera la culture humaine. Il est assez clair que l’interactivité est une caractéristique fondamentale de l’être humain et de toutes les cultures. Nous sommes tous des joueurs, à un degré ou à un autre. Et ce n’est qu’une question de temps avant que l’interactivité nous rattrape tous dans un ras-de-marée technologique.
Cependant, je pense aussi que le jeu de rôle contemporain sur table reste encore bien supérieur à tout ce que nous pourrons voir sur une plate-forme informatique dans un futur proche. Ceux qui apprennent de manière conventionnelle le jeu de rôle, la maîtrise d’une partie et la conception d’un JdR, seront ceux qui façonneront le futur interactif qui émerge aujourd’hui (en fait, je mène une partie de JdR précisément sur ce thème, qui porte le titre approprié de “Le meneur de jeu égotiste”).
Tu as beaucoup travaillé dans l’industrie du jeu vidéo – sur Return to Krondor de Sierra Studio ou Alter Echo d’Outrage Entertainment. À quel point les deux industries sont-elles complémentaires, à la fois en termes de théorie et de pratique dans la conception de jeu ? Dans quels domaines ton expérience dans le JdR t’a-t-elle bien servi, et quelles nouvelles compétences as-tu dû acquérir ?
C’est intéressant que le jeu de rôle et le jeu vidéo soient exactement opposés en terme de dynamique de groupe. Pour le jeu de rôle, les aventures sont créées par un concepteur/écrivain individuel, puis sont consommées par des groupes. Dans le jeu vidéo, un groupe composé de programmeurs, d’artistes et de concepteurs doivent travailler ensemble pour créer des jeux qui sont ensuite consommés, en général, par des individus.
Il apparaît alors qu’être un rôliste et/ou un meneur de jeu procure en fait une grande expérience, car cela vous apprend comment coopérer dans un groupe de gens soudés (qui, au passage, sont en général exactement le même genre de geeks ou quasi-geeks avec tous les traits de personnalité qui vont avec).
Comme je l’ai dit dans l’introduction, il semble que beaucoup de créateurs de jeux de rôles poursuivent leur carrière dans l’industrie informatique. Pourquoi penses-tu qu’un tel plan de carrière est naturel ? Est-ce que cela continuera ? Cela doit-il continuer ?
Un énorme avantage du jeu de rôle est la vitesse à laquelle quelqu’un peut passer du concept au prototype et au test du JdR. Toi, Steve, peux avoir une excellente idée de jeu de rôle, noter quelques remarques, décrire quelques personnages, appeler tes copains rôlistes et avant dimanche soir, tu connaîtras son potentiel ou sauras à quel triste point c’est nul.
Le problème dans l’industrie du jeu vidéo est que cela prend souvent six mois, voire neuf, voire dix-huit, avant de comprendre si un jeu est amusant ou non. Et cela représente des mois et des mois de charges énormes et une masse importante de salaires.
De plus en plus de gens comprennent qu’il est intelligent de coucher d’abord un prototype sur papier. Manifestement, les gens qui font du jeu de rôle, qui maîtrisent, et qui créent des scénarios de JdR, ont un talent naturel lorsqu’il faut rapidement effectuer un premier essai. Ainsi, pour moi en tout cas, il semble que ce plan de carrière naturel va se poursuivre encore pendant un certain temps.
Est-ce que tu recommanderais à d’autres créateurs de jeux de rôles de poursuivre un tel plan de carrière ? Et si oui, quel conseil leur donnerais-tu pour y parvenir ?
Bien sûr, pourquoi pas ?
Quant au conseil, je dirai ce que j’ai toujours dit. Si vous voulez être un créateur de jeux de rôle, il vous faut créer des jeux de rôle. Pas seulement pour être publié, pour la célébrité et/ou la gloire, mais juste pour le plaisir. Créez des jeux pour vos copains, pour la convention du coin, et rien que pour le faire, que diable ! Plus vous écrirez, plus vous créerez, plus vous expérimenterez, et plus vous deviendrez compétent.
Si vous voulez devenir un concepteur de jeu vidéo, vous devriez faire la même chose. Et pas qu’un peu. Commencez par bidouiller des fictions interactives (je recommanderais Adrift pour les débutants). Créez quelques niveaux en utilisant les éditeurs qui sont livrés avec vos jeux vidéo préférés (vous pouvez facilement les créer vous-même pour la plupart des FPS ainsi que pour certains des meilleurs jeux de stratégie en temps réel). Si vous êtes super ambitieux, localisez quelques-uns des nombreux moteurs de jeu vidéo disponibles en ligne et commencez à faire vos propres jeux vidéo.
Est-ce que cela signifie que le JdR doit être vu comme un tremplin de carrière logique – ou même mieux – comme un incubateur de talents, qui façonnerait les futurs grands (et couronnés de succès) créateurs de jeux vidéo ?
Steve, je ne pourrais être plus d’accord.
Si c’est un incubateur, les grandes compagnies de jeux vidéo en sont-elles conscientes ? Est-ce qu’avoir “écrit des livres de JDR pour Palladium Games (ou SJG, ou Eden)” fait vraiment bien sur un CV ? Les équipes d’Electronic Arts partent-elles à la chasse aux talents lors de la GenCon ?
Eh bien, cela ne peut pas faire de mal. Pas parce que les chasseurs de têtes (que vous ne verrez malheureusement jamais à la GenCon) épluchent les CV à la recherche d’expérience rôliste, mais parce que les vraies décisions d’embauche sont généralement prises par des initiés qui sont d’habitude des créateurs de jeu possédant une grande expérience du JdR.
Alors, est-ce que le fait de travailler chez des éditeurs de JdR ne devient pas soudain beaucoup plus intéressant ? Assez pour altérer – même un peu – la perception stéréotypée de l’édition parmi les joueurs, vers le fait que cela peut être davantage qu’un simple travail de passionné menant principalement à des poches vides et à une tension artérielle élevée ?
Coïncidence, je parlais exactement du même sujet avec Kevin Siembieda ce midi.
À savoir, quel mal y a-t-il à effectuer un travail de passionné ? Quel mal y a-t-il à faire quelque chose que tu apprécies, juste pour t’amuser, simplement pour te divertir, toi et tes copains ? Pourquoi cela doit-il être quelque chose de plus que cela ? Pourquoi cela devrait-il être quelque chose de plus que cela ?
Mais si c’est un travail de passionné, alors pourquoi ne pas l’effectuer plutôt dans une industrie qui paie bien mieux ? Ce n’est pas, bien sûr, que ce soit impossible de faire les deux, mais à intérêts créatifs équivalents, qu’est-ce qui peut empêcher les créateurs de reléguer le jeu de rôle à un hobby, plutôt qu’à une carrière à plein temps ? Un tel état ne réduirait-il pas, en fin de compte, le nombre et, de fait, la qualité des jeux sur le marché ?
Non, je ne pense pas.
Après tout, avec cette logique, le nombre et la qualité des romanciers devraient être drastiquement plus bas, puisque l’écriture de scripts de cinéma est clairement plus lucrative.
Certains ne seraient pas d’accord avec toi ici, en adoptant une vision bien plus terne de cette progression de carrière, et craignent une “fuite des cerveaux” de nos meilleurs éléments. En réponse, ils affirment qu’il faut davantage d’incitations à rester dans le jeu de rôle – une idée qui semble impossible au vu de la taille minuscule des productions, même publiées par les plus grandes entreprises de JdR, comparées à celles des titanesques sociétés du jeu vidéo. Quel élément doit être mis en avant pour pousser à devenir créateur de JdR, à part son potentiel en tant “qu’incubateur” ?
Il existe déjà la plus grande incitation possible à rester dans le jeu de rôle.
À savoir, c’est la chose la plus amusante que tu peux faire. Point final. Il n’y a simplement rien de plus raffiné, rien de mieux, et même rien de vaguement plus intrigant pour quelqu’un qui a véritablement besoin d’étendre son imagination. C’est toute l’“incitation” dont nous avons besoin. Les meilleurs d’entre nous seront toujours obsédés par la création de contenu pour le jeu de rôle le plus génial qui soit. Ils ne vont nulle part ailleurs.
Quant à ceux qui n’aiment pas ça ? Ceux qui pensent que ce n’est pas assez riche ? Tout ce que je peux dire est bon vent !
Concernant la question des incitations, pourquoi as-tu, personnellement, cherché à travailler dans l’industrie du jeu vidéo ? Et cela a-t-il été, globalement, un changement qui en a valu la peine ? Était-ce la réalisation d’un rêve, parachevé par des chaudrons d’or et des voitures de fonction au pied de l’arc-en-ciel ?
Je suis arrivé dans l’industrie des jeux vidéo avec les mêmes objectifs que j’avais pour celle du jeu de rôle. J’aime créer des jeux qui soient amusants pour moi et mes copains. Je savais déjà que je pouvais faire de chouettes jeux de plateau et des jeux de rôles papier sympas.
Le pied de l’arc-en-ciel est encore loin dans le futur. Jusqu’à présent, j’ai fait du bon travail en finissant les jeux que d’autres personnes avaient entamés, mais il me reste encore à pouvoir commercialiser une de mes propres petites réalisations. Cependant, le salaire était très sympathique, j’ai passé des moments grandioses à travailler avec des gens excellents et ai été en mesure de passer un an dans mon pays des merveilles personnel, Hong-Kong. Bref, ça a vraiment valu le coup, mais je suis loin de la fin du voyage.
Tu es maintenant, d’après ce que j’ai compris, à nouveau en train de chercher du travail. Quelles opportunités vois-tu pour toi là-dehors ? Tes options ont-elles changé lors des cinq dernières années, et cela nous apprend-il quelque chose sur les industries du jeu de rôleet du jeu vidéo ?
Tu connais le vieux dicton, “plus ça change, plus c’est la même chose”.
D’un côté, la technologie est bien meilleure, les équipes plus grandes, et les objectifs de jeu beaucoup plus complexes et difficiles. Pourtant, je suis toujours à la recherche du même travail ; le poste de concepteur en chef où je peux créer un jeu entièrement nouveau, quelque chose auquel des millions de personnes seront impatientes de jouer.
En pensant longuement à la fois au présent et au futur proche, à quelles autres industries et postes un créateur de jeu pourrait-il être bien adapté, et pourrait être avantagé par rapport à d’autres candidats ? Peux-tu citer quelques-uns des nouveaux et excitants domaines où le jeu de rôle pourrait faire embaucher ces temps-ci ?
Steve, je pense qu’il y aura d’autres industries, et d’autres postes, pour lesquels nous, rôlistes, seront idéalement adaptés. Ma boule de cristal est un peu floue sur les détails, et je continue à tirer la mauvaise carte au tarot, mais je suis passablement sûr que ces emplois arrivent.
Pour l’instant, je recommanderais que les gens continuent simplement à repousser les limites du jeu de rôle. Expérimentez. Jouez. Faites quelque chose d’étrange. Faites quelque chose de différent. Virez votre dé ou nagez dans un seau qui en est rempli. Amusez-vous. Jouez un dieu. Ou le dieu des chiens. Ou un mollusque. La réponse est dans les paroles immortelles de Bruce Sterling :
“Suivez vos lubies, mesdames et messieurs. Oubliez d’essayer de passer pour quelqu’un de normal. Suivez votre crétinité. Embrassez votre geekitude ! Il est possible que vous soyez un geek, vous pouvez avoir marqué sur tout votre corps que vous en êtes un ; vous devriez désirer être un geek qu’ils n’oublieront jamais. N’aspirez pas à être civilisé. N’espérez pas que les gens normaux vous garderont comme une sorte d’animal de compagnie. Qu’ils aillent au diable ; c’est eux qui vous ont mis là.
Vous devriez réaliser pleinement ce que la société a fait de vous et vous venger de façon épouvantable. Devenez bizarres. Devenez carrément bizarres. Devenez dangereusement bizarres. Devenez bizarres jusqu’au bout et ne le faites pas à moitié, mettez-y chaque once de puissance que vous avez sous le capot. Ayez le *courage* artistique de reconnaître votre propre signification culturelle !”
Un message magnifique, Erick, merci encore.
Quand tu veux, Steve, quand tu veux !
Références Internet
Simulations & jeux
An Interdisciplinary Journal of Theory, Practice and Research http://www.unice.fr/sg/
L’association internationale de simulations et de jeux (ISAGA): http://isaga.pm.it-chiba.ac.jp/
L’association nord-américaine de simulation et de jeux (NASAGA): http://www.nasaga.org/
Hong Kong Polytechnic University’s Multimedia Innovation Centre (MIC): http://www.mic.polyu.edu.hk/
Diplomatie
http://www.diplomacy-archive.com/ http://www.diplomacy.org.uk/
Divers
Le premier concert de musique symphonique de jeux vidéo en Europe: http://www.leipziger-messe.de/gc/gamesmusic_eng.shtml
L’éditeur Adrift Runner de fiction interactive: http://www.adrift.org.uk/
Le discours de Bruce Sterling
http://www.eff.org/Global/America-US/Publications/Bruce_Sterling/comp_game_designers.article
Article original : Job's for the Boys
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