Structures de jeu (11-12)

Vers le chapitre 10

Chapitre 11 : structures complètes

Maintenant que nous avons abordé les structures incomplètes ptgptb, permettez-moi de continuer à procéder à l’envers en expliquant ce que je veux dire par une “structure complète”.

Par “structure complète”, je ne veux surtout pas dire que les joueurs ne pourront jamais agir hors de ladite structure. Comme je le dis depuis le début, les jeux de rôle sont ouverts par essence. Au contraire d’un jeu de plateau ou de cartes, les joueur·euses sont toujours libres de proposer n’importe quelle action qui leur passe par la tête.

À la place, nous parlons ici d’une structure qui peut théoriquement offrir une expérience complète. Si les participants·es choisissent de se tenir à une structure de jeu complète, elle ne va jamais amener la partie en un lieu où aucune structure n’existe.

L’expérience pratique à la table de jeu joue ici un rôle, et je m’attends aussi à une dose de bon sens : il est possible d’affirmer que Traveller grog offre une “structure complète” tant que les PJ ne quittent pas leur vaisseau. Mais, bien sûr, ce n’est pas ce qui va se passer à la table de jeu, n’est-ce pas ? Ce qui se passe en vrai, c’est que la structure d’un scénario de Traveller amène un vaisseau à un astroport, où les PJ descendent dudit vaisseau et… la structure du scénario les a menés à un lieu non défini.

En pratique, les structures complètes demandent des structures verticalement intégrées et des boucles de résolution fermées. Elles offrent aussi en général des transitions complètes d’un niveau macro à un niveau micro.

Par exemple, considérons la structure élémentaire des scénarios d'enquêtes ptgptb : vous commencez dans un lieu et cherchez des indices. Ces derniers vous mènent à un autre lieu où vous cherchez d’autres indices (qui bien sûr vous mèneront à un autre lieu).

Ça, c’est une boucle de résolution fermée : elle peut être répétée ad vitam æternam.

Je parlais plus tôt de la transition en douceur de l’exploration de donjon au combat dans D&D ptgptb : vous êtes dans une salle de donjon, vous choisissez une issue, vous allez dans une autre pièce (et voilà votre boucle de résolution fermée). Mais dans cette pièce, il y a une bande de monstres, donc vous basculez sur le système de combat (qui est aussi une boucle de résolution fermée) jusqu’à ce que les monstres soient vaincus. Une fois le combat fini, vous retournez à l’exploration du donjon, vous choisissez une sortie, vous allez dans une autre pièce (où il peut y avoir des monstres, auquel cas c’est retour à la case combat).

Ça, c’est une structure verticalement intégrée : la structure d’exploration de donjon offre un déclencheur spécifique (“Il y a des monstres ici”) qui nous fait passer à une structure de combat ; et la structure de combat offre un déclencheur spécifique (“Tous les monstres sont morts et la pièce n’offre plus d’intérêt”) qui nous fait revenir à la structure d’exploration du donjon.

Faisons un exercice mental, imaginons que nous ayons une structure d’exploration de donjon, mais pas de système de combat. Imaginez ce qui se passe quand l’exploration nous amène à une salle pleine d’orques. La structure est incomplète. Maintenant, imaginons que nous utilisions une structure d’exploration avec – à la place d’un système de combat – un mécanisme bien développé pour résoudre des concours de devinettes… Le donjon est vraiment très différent, n’est-ce pas ?

Il est également possible de développer la chaîne de transition d’un niveau macro à un niveau micro. On peut le démontrer facilement avec la carte d’un pays, recouverte d’une grille hexagonale, et un des hexagones est associé à un complexe souterrain. L’exploration de l’hexagone [selon la structure “exploration d’hexagones” ptgptb (NdT)] déclenche la découverte du donjon ; l’entrée dans le donjon nous fait passer dans la structure d’exploration de donjon et la rencontre avec des monstres nous fait passer à la structure de combat.

Il m’arrive de voir ceci comme une pyramide inversée, mais pas forcément très rigoureuse ; par exemple, la rencontre associée aux hexagones peut facilement nous amener directement au combat.

Caractéristiques d’une structure complète

Arrêtons-nous un peu pour étudier les caractéristiques primaires requises par une structure complète. Par nécessité, ces caractéristiques feront office de conclusions préliminaires : il n’existe pas beaucoup de structures complètes dans les jeux de rôle et donc le corpus d’étude est un peu maigre.

Premièrement, chaque partie d’une structure de jeu demande un déclencheur clair et précis (par exemple, le combat se déclenche quand quelqu’un veut faire une attaque et lance ses dés pour le jet d’initiative). L’intégration verticale de la structure exige que la macrostructure produise les déclencheurs nécessaires aux microstructures (par exemple, la structure “exploration du donjon” produit le déclencheur pour le combat quand les personnages entrent dans une pièce pleine de monstres non avenants).

Deuxièmement, il vous faut une accroche de scénario. C’est en fait simplement le déclencheur de la macrostructure qui contient les microstructures. L’accroche n’a pas besoin d’être particulièrement complexe : par exemple, l’accroche de scénarios par défaut pour une exploration de donjon c’est “Vous êtes devant l’entrée du donjon.”.

Troisièmement, il vous faut un objectif par défaut. C’est ce qui motive les joueur·euses à mordre à l’accroche de scénario. Par exemple, les PJ entrent dans un donjon (c’est-à-dire qu’ils acceptent l’accroche que présente l’entrée du donjon) parce qu’ils veulent trouver un trésor.

Notons que l’accroche de scénario et l’objectif par défaut sont souvent les premiers éléments à être remplacés quand vous adoptez une structure de jeu à une vraie partie. Par exemple, les PJ pourraient bien rentrer dans ce donjon, qui est en fait une forteresse, parce que leur ami a été enlevé par des marchands d’esclaves et est emprisonné à l’intérieur.

Quatrièmement, il vous faut une action par défaut : choisir une porte dans une exploration de donjon, choisir une direction dans une exploration d’hexagones, chercher des indices pour résoudre un mystère, attaquer un ennemi pendant un combat, etc.

Et cinquièmement, entreprendre l’action par défaut devrait vous placer dans une position (soit directement, soit après une suite d’actions) où vous pouvez entreprendre de nouveau l’action par défaut. C’est là où vous fermez la boucle de résolution et où vous achevez la structure de jeu.

Structures de jeu efficaces

Il y a également des choses qui ne sont pas vraiment nécessaires pour avoir une structure complète, mais qui sont probablement de bonnes idées.

Premièrement, la structure se doit d’être flexible. Pour les joueur·euses, la flexibilité signifie la capacité à faire des choix qui ne sont pas contraints par la structure. Pour le MJ, la flexibilité signifie la capacité à inclure une gamme étendue et originale de contenus dans les “paquets” de la structure (ceci fait référence aux principes de “structure, pas camisole de force” et de “flexibilité dans la forme” dont nous avions parlé précédemment ptgptb).

Deuxièmement, l’action par défaut devrait en général autoriser les joueurs à prendre des décisions qui ont un sens. Les jeux de rôle ont pour principe de prendre des décisions alex et les structures qui n’autorisent pas ces prises de décision auront, à mon avis, du mal à tenir. Par ailleurs, une structure qui n’inclut pas de points où les joueur·euses peuvent prendre des décisions va fortement entraver leurs possibilités de faire des choix qui ne soient pas contraints par la structure (voir ci-dessus).

Comme contre-exemple, considérons une structure hypothétique d’exploration dans un monde de pirates, où les joueur·ses choisissent une direction pour leur navire et où le MJ va déterminer au hasard le type de navire qu’ils vont rencontrer. Cette situation offre beaucoup de flexibilité pour le MJ puisqu’il est pour ainsi dire libre d’inclure tout ce qui rentrera dans un “paquet” en forme de navire. Mais vous remarquez que la décision prise par les joueurs pour la direction de leur voyage n’a aucune incidence, ce qui aura pour résultat un jeu assez peu satisfaisant.

Troisièmement, puisque nous considérons que nous parlons de jeu de rôle et pas de jeux de stratégie, il faut que les décisions des joueurs à l’intérieur de la structure soient liées et correspondent aux PJ (pour en fait les mêmes raisons qui font que les mécanismes d’un JdR doivent être liés alex).

Quatrièmement, les structures de récompense de la partie devraient probablement être associées à l’action et aux objectifs par défaut de la structure de jeu.

L’exemple facile ici, dont j’ai parlé plus haut, est D&D : la structure par défaut de découverte de donjon/combat récompense les joueurs avec des points d’expérience (XP) pour l’action par défaut de vaincre les monstres et avec des pièces d’or (et des XP alex) pour l’objectif par défaut de l’acquisition de trésor.

Cinquièmement, la structure de jeu doit être amusante. Ceci est bien sûr une qualité plutôt indéfinissable et elle varie d’un groupe à l’autre. Mais ce qui est important ici c’est qu’une structure complète sera la fondation de votre scénario ou votre campagne. Si cette base est amusante, alors tout ce que vous ou vos joueur·euses construirez dessus sera amusant.

Si votre structure est simplement un processus laborieux de comptabilité, vous pourrez toujours vous amuser si ce que vous construisez sur cette base est amusant – mais ça sera moins garanti.

Sixièmement, la structure de jeu doit être facile à préparer. Vous pouvez fournir une structure claire pour la préparation (et je pense que vous réaliserez vite que des structures bien définies offrent spontanément des directions évidentes pour la préparation). Mais il s’agit aussi de limiter la quantité nécessaire de préparation avant de commencer à jouer. Si la structure demande au MJ de préparer 500 pages d’informations et d’aides de jeu pour être utilisée, elle ne va pas être souvent utilisée en vrai. Et tout ceci peut bien sûr être facilité en donnant au MJ des outils pour l’aider dans la préparation, comme les anciennes tables de remplissage aléatoire de donjons et d’hexagones qui étaient des piliers de D&D.

J’allais également ajouter “facile à jouer” à cette liste, mais je pressens que ceci est une caractéristique qui apparaît naturellement dans les structures correctement construites. Si vous avez cependant besoin d’un rappel, relisez le chapitre 8 ptgptb de cette série.

Chapitre 12 : utiliser des structures de scénarios

Jusqu’ici, une grande partie de ce bavardage sur les “structures de jeu” pouvait apparaître comme une perte de temps qui n’intéresse que les créateurs et créatrices de jeu de rôle.

Mais les structures de jeu sont au contraire l’outil principal et le plus important dans la panoplie du MJ. Plus le meneur ou la meneuse aura maîtrisé de structures de jeu, plus il ou elle trouvera faciles la préparation et la maîtrise d’un scénario. Moins il en aura maîtrisé, plus ses scénarios seront limités et plus sa préparation sera difficile.

On peut également affirmer que par principe, tout MJ se doit d’agir comme un créateur de jeu : un JdR sans scénario est comme un jeu de Monopoly wiki sans plateau. Ou, en d’autres termes ; si le Monopoly était maquetté comme un JdR classique, on y trouverait des règles pour déplacer ses pions et pour acheter des propriétés, mais il serait attendu du groupe qu’il conçoive ses propres plateaux. La conception de scénarios est une forme de création de jeu (1).

Pour démontrer ce que je veux dire au sujet de l’utilisation de structures de scénarios en tant qu’outils, considérons cet exemple plutôt simple de trame d’aventure :

Les PJ doivent accompagner un avoué à qui on a demandé de se présenter comme le mandataire de la duchesse de Canterlocke ptgptg pour négocier l’achat d’une propriété délabrée en face des Jardins de Dweredell. Les PJ doivent le protéger tout en cherchant des informations au sujet des tiers qui portent un intérêt à la propriété, et sur des activités religieuses suspectes tout autour du château.

Il y a quinze ans, ma maîtrise des structures de jeu était limitée. J’en avais pour l’essentiel deux : l’exploration de donjons et le dirigisme [ou l’approche linéaire ptgptb] Confronté à ce concept pour un scénario, j’aurais été forcé d’utiliser l’approche linéaire : une suite de scènes préprogrammées que les PJ auraient vécues (et sans vouloir me féliciter rétroactivement, j’aurais probablement essayé de rendre ces scènes les plus flexibles possible parce que je n’étais pas vraiment amateur de cette approche. Mais cela m’aurait forcé à lutter contre ma structure de préparation, et cela signifie souvent beaucoup plus de préparation ptgptb.

De la même manière, l’absence de structure de jeu pour les aventures en milieu sauvage ptgptb a eu pour résultat la présentation des voyages terrestres dans la plupart des modules d’aventure modernes comme une séquence linéaire de rencontres préprogrammées.

Mais aujourd’hui, avec une plus grande gamme de structures de jeu à ma portée, je trouve qu’il est relativement facile de décomposer ce concept de scénario de manière plus facile à préparer, plus facile à mener et offrant aux joueur·euses une bien plus grande liberté dans leur façon d’aborder le scénario.

  1. “Les PJ sont ici pour le protéger…” : je considère que ceci signifie qu’il y a effectivement quelque chose contre lequel protéger l’avoué. Pour préparer cela, je constitue une liste de menaces (les attaques à son encontre). Celles-ci peuvent être déclenchées par un lieu (“Quand il atteint la rue des Quais, les assassins attaquent”), mais une chronologie des événements fonctionnera aussi.
  2. “Pour négocier l’achat d’une propriété délabrée…” : quand je prépare des rassemblements sociaux ou professionnels d’importance, je prépare deux pistes : une pour les participants importants avec leur profil et la façon de les interpréter ; et une pour les événements notables.
    Parfois, les événements notables surviennent à un horaire déterminé. Parfois ils sont liés à certains PNJ ou à des lieux particuliers. Parfois, c’est simplement une liste de sujets de conversation qui reviennent souvent lors du rassemblement. Au final, c’est ce qui fait sens et qui m’est le plus utile. Voir ici alex pour en savoir plus.
  3. “…une propriété délabrée en face des jardins de Dweredell en.” : la question clé est “Est-ce que les PJ sont censés explorer la propriété pièce par pièce (comme une maison hantée) ? Ou ne sera-t-elle qu’un décor pour la vente aux enchères ?” La première est préparée (et menée) comme une exploration de donjon. La seconde est préparée avec quelques descriptions brèves, et peut-être un plan générique du lieu si je considère que ça sera important pour une raison ou une autre.
    Ça peut également être les deux : la propriété peut n’être qu’un décor pour la vente aux enchères, mais la crypte familiale sous le manoir peut nous faire passer en exploration de donjon. Ou encore, c’est pendant la nuit qu’on la considère comme une exploration, quand tous les fantômes sortent du Puits des Âmes.
  4. “les activités religieuses suspectes autour de la propriété.” : Comme toutes les structures d’enquête, je m’en tiens à une conception de scénario en nœuds ptgptb pour le décomposer en scènes faciles à gérer et à concevoir. Pour lancer les joueurs et les joueuses dans la structure en nœuds, je vais disséminer généreusement les indices dans les menaces en #1, les PNJ en #2, et les pièces en #3 (si j’avais pris l’option “exploration de donjon”). Une liste standard de nœuds ressemblerait à ceci :
    • Équipe d’assassins fanatiques
    • Sanctuaire du Dieu noir
    • Temple du prêtre borgne
    • Le Conseiller Jaffar (secrètement cultiste)

    Le groupe d’assassins est un nœud proactif ptgptb qui attaque l’avoué protégé par les PJ. Un des assassins a un tatouage distinctif (une enquête en ville indique qu’on a vu des gens tatoués ainsi autour du Sanctuaire du Dieu noir). L’interrogatoire d’un des assassins révélera qu’ils sont des envoyés du Temple du Prêtre borgne. On trouvera peut-être un message signé par Jaffar ordonnant à l’un d’entre eux de tuer un de ses acolytes une fois la sale besogne accomplie.

Et ainsi de suite…

Analysons tout ça

La première chose est l’accroche du scénario : la duchesse de Canterlocke veut engager les PJ pour protéger un commis à son service.

Cette accroche est reliée à une structure chronologique simple : le préposé doit partir pour la propriété au moment A ; les tentatives d’assassinat seront faites aux moments B et D ; les portes ouvertes et la vente aux enchères commenceront au moment C.

On trouve d’autres déclencheurs dans cette chronologie : les indices sur les assassins déclencheront une enquête en nœuds. Escorter le préposé pour inspecter la maison va déclencher l’exploration de celle-ci. Escorter le préposé à la vente aux enchères déclenchera la structure sociale de la réception.

L’exploration de la maison va probablement inclure des déclencheurs pour des combats (mort-vivants dans la crypte sous la maison, ou autre). La structure de la réception aura, elle aussi, des indices supplémentaires déclenchant l’enquête en nœuds. Et elle aboutira aussi bien au Sanctuaire du Dieu noir qu’au Temple du Prêtre borgne, qui sont probablement préparés comme des explorations de donjon.

Utiliser les bons outils

Comme pour la plupart des projets, une fois que vous avez les bons outils, il n’y a plus qu’à identifier l’outil approprié au travail à réaliser, puis à l’utiliser.

Pour notre démonstration, imaginons que nous avons au contraire utilisé les mauvais outils :

  1. On essaye de préparer l’escorte du préposé à travers Dweredell comme une exploration. Ça signifie qu’on doit préparer chaque rue avec des rencontres indexées, de manière à ce que les PJ rencontrent quelque chose, quelle que soit la rue qu’ils décident de suivre. → Résultat : beaucoup trop de préparation, de nombreuses décisions de joueurs n’auront pas d’importance particulière, vu les objectifs immédiats des PJ avec, en plus, de graves problèmes de rythme.
  2. On prépare la crypte sous la maison comme une chronologie de rencontres sur le thème des morts-vivants : après 5 minutes d’exploration, on déclenche la rencontre 1 ; après 10 minutes la rencontre 2, etc. → Résultat : la seule participation des joueurs est de dire “On continue d’explorer”. On a probablement le désir d’au moins improviser une carte au fur et à mesure qu’ils explorent, mais bien sûr, ça nous fait revenir à une structure d’exploration de donjon que nous évitons à tout prix pour les besoins de cet exemple dysfonctionnel.
  3. Au lieu de préparer les PNJ enchérisseurs dans le but de les interpréter, on leur donne au contraire des caractéristiques de combat et on tire l’initiative à chaque fois que les PJ veulent leur parler.

Et ainsi de suite.

Utilisez les structures appropriées et la préparation sera facile et autorisera naturellement les joueurs à prendre des décisions significatives et appropriées. Utilisez les mauvaises structures (soit par erreur, soit parce que vous ne savez pas laquelle utiliser) et vous allez compliquer vos préparations et vos joueurs auront du mal à prendre les décisions qu’ils veulent prendre.

Mais que faire si la structure de jeu appropriée n’existe pas ?

À suivre…

Articles originaux : Game Structures – Part 11 : Complete Game Structures et Game Structures – Part 12 : Using Scenario Structures

Sélection de commentaires

Quirky DM

Et ça continue de s’améliorer.

Je suis tout à fait d’accord pour dire que tu ne peux aider ta maîtrise qu’en examinant la conception de jeu. La création de JdR et la maîtrise d’un jeu de rôle sont très similaires et on peut utiliser beaucoup d’outils communs entre les deux.

jdh417

Puisque les aventures sont finalement ce que le MJ a préparé ou improvise, les joueurs se soucient-ils vraiment de leur choix ? Ils ne font que réagir à ce que le MJ jette sur leurs personnages.

Ce que j’aimerais, en tant que joueur, c’est que mon personnage se retrouve dans des situations intéressantes qu’il peut gérer de manières différentes. C’est difficile de demander au MJ de mettre ça en place, et encore plus de l’improviser.

Le dirigisme semble survenir avec des personnages génériques, dont l’objectif générique est de tuer des monstres, d’obtenir de l’or et d’accomplir des quêtes (et de monter en niveau). Sans direction, des personnages impersonnels sont forcés par le MJ d’agir d’une certaine manière pour que l’aventure préparée puisse avancer, et c’est là où il y a friction.

Si les personnages n’avaient même qu’une toute petite motivation intrinsèque, on pourrait créer une aventure qui présuppose certaines actions des joueur·euses ainsi que leur participation volontaire, plutôt que de lutter pour avancer dans un sens, ou pour au contraire sortir volontairement des rails (et si ça doit arriver, il y aura une raison pour ça). Les personnages continuent de tuer, piller et partir en quête, mais au moins leurs joueur·euses savent pourquoi iels le font.

Justin Alexander

jdh417 : “(…) C’est difficile de demander au MJ de mettre ça en place, et encore plus de l’improviser.”

Il est en fait bien plus simple (et ça demande bien moins de préparation) de créer une situation intéressante et de laisser les joueurs et les joueuses interagir avec, de la manière qu’ils le souhaitent, plutôt que de créer une situation intéressante ET une séquence dirigiste d’événements basée sur cette situation.

Jono

C’est intéressant que tu utilises une rencontre sociale avec une structure de combat. J’ai acheté récemment le jeu de rôle du Trône de Fer grog dans lequel les mécanismes sociaux, les intrigues, sont très similaires aux mécanismes de combat.

Chaque personnage a un bonus d’attaque et un score de défense basés sur ses caractéristiques sociales, ainsi qu’un nombre de points de sang-froid (points de vie). Est-ce que tu connais ce jeu ? Et si oui, que penses-tu de ces mécaniques ?

Hautamaki

Justin, je pense que je sais de quoi jdh417 veut parler.

Ce qu’il dit c’est que les joueurs ont la responsabilité de créer des personnages qui ont des objectifs et des motivations intrinsèques, et le MJ a la responsabilité de concevoir ses accroches d’aventure avec ces motivations à l’esprit.

Si les joueurs n’assument pas leurs responsabilités au préalable et qu’on leur présente des accroches d’aventure qu’ils considèrent sur-le-champ et arbitrairement comme inintéressantes, un MJ frustré peut se voir forcé quand même de les pousser dans l’aventure.

Si le MJ crée des accroches d’aventure ou des scénarios qui rentrent précisément en contradiction avec les motivations initiales des personnages-joueurs, pour ensuite les forcer dans ces scénarios quoi qu’il en soit, les joueur·euses vont se sentir frustré·es et dirigé·es.

Voici un bon exemple : un groupe de joueurs et de joueuses crée un groupe de personnages d’alignement Bon qui veulent vaincre le mal et protéger les innocents. Le MJ voulait depuis toujours une campagne avec des personnages plutôt orientés Mauvais. Donc, dans la première session, les PJ sont jetés dans une bataille ingagnable, où ils sont assommés et maudits par une marque mauvaise. Ils se réveillent avec le désir de dévorer les cœurs d’innocents et sont animés d’une faim toujours croissante qui les affaiblit jusqu’à ce qu’ils passent à l’action.

Dans les séances suivantes, les PJ sont expulsés de la ville alignée Bonne qui leur servait de base, car les stigmates mauvais deviennent trop visibles. Ils doivent partir à la poursuite du sorcier maléfique qui leur a jeté le sort. Cela les mène à travers un village, mais ayant ensorcelé également ses habitants, les PJ sont forcés de se battre contre eux et blesser des personnes âgées, des enfants et des femmes enceintes. En réalité, les PJ avaient essayé d’éviter le village et de fuir plutôt que de le raser, mais dans les deux cas, c’est un PNJ les accompagnant qui a rejeté leurs décisions et leur a forcé la main.

Arrivé là, j’en avais marre de la campagne. C’était du dirigisme parce que la campagne rejetait les intentions et motivations déclarées des PJ. Si les joueurs et les joueuses avaient déclaré clairement vouloir jouer une campagne sombre avec un thème maléfique, cette campagne aurait été parfaite. Mais comme c’était la mauvaise campagne pour les PJ, ça n’allait pas du tout.

jdh417 :

@Hautamaki

Oui, tout à fait. C’est comme une session sado-maso avec une dominatrice. L’esclave est en fait celui qui pose les règles de la rencontre (bon sang, l’analogie est vraiment discutable… ) Les joueur·euses et le MJ doivent s’accorder et établir qui sont les personnages, ce que ces PJ recherchent, ainsi que le genre d’aventures que les joueurs et les joueuses souhaitent. Dans un univers de jeu préétabli, le ou la MJ devrait en principe annoncer le genre d’aventure qu’il ou elle propose et les joueurs devraient soit accepter, soit ne pas jouer.

Vu comme ça, je me demande si la 4e [édition de D&D] (et à un moindre niveau la 3e) ne poussent pas un peu trop le style “vieille école”. Étant donné le caractère central des rencontres, les joueur·euses ont plutôt tendance à suivre ce qu’a préparé le MJ, tout simplement parce que s’ils ne le font pas, il n’y aura peut-être pas beaucoup d’aventure. Ou alors les joueurs considèrent la 4e plus comme un scénario de wargame ou un jeu sur ordinateur, avec les parties roleplay représentant les interludes.

S’mon

Hautamaki : “(…) le MJ a la responsabilité de concevoir ses accroches d’aventure avec ces motivations à l’esprit.”

Cette approche place un bien trop lourd fardeau sur les épaules du MJ à mon avis. C’est mieux que le MJ ou les règles (par exemple “des XP contre de l’or”) disent aux joueurs et aux joueuses ce que sont les objectifs des PJ ; comme ça tout le monde est sur la même longueur d’onde. Ou du moins, en faire une discussion où le groupe décide ensemble des objectifs de la campagne.

Une fois les objectifs clarifiés, les PJ ont une grande liberté d’action parce que le MJ peut autoriser toutes les tentatives raisonnables des PJ pour atteindre leurs objectifs. Alors que si les objectifs des PJ ne sont pas clarifiés avant que la partie ne commence, on a tout en place pour la planter. Par exemple, j’ai joué dans une partie de Savage Worlds grog dans un environnement d’apocalypse zombie (War of the Dead grog) où les objectifs des PJ n’étaient pas clairement établis avant la partie, et finalement les PJ ont été poussés d’une scène à l’autre, sans tenir aucunement compte de leurs propres motivations.

Hautamaki

S’mon, c’est exactement ce que je fais : des XP pour l’or avec un peu de XP en bonus pour avoir accompli la quête si je pense qu’il n’y a pas eu assez d’or pour récompenser assez les personnages dans celle-ci (par exemple, sauver la fille d’un fermier, prisonnière d’une bande de troglodytes qui n’auraient pas grand-chose comme trésor).

Et je suis 100 % d’accord qu’il devrait y avoir un accord à l’amiable entre les joueurs, les joueuses et le MJ au préalable. Je pense que comme je suis en général le MJ et que je m’efforce de tout faire pour que tout le monde passe un moment agréable, ça se retrouve dans la manière dont je dis les choses.

Vers les chapitres 13 et 14


 (1) NdT : Lire à ce sujet Modes de jeu cachés et création de Steve Darlington. [Retour]

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