La Trilogie des Origines III : Donjon, frontière de l’infinie… connerie

Coup de gueule d'Al Bruno n°21

AVERTISSEMENT ! Les prélogies sont souvent mauvaises, les troisièmes parties sont souvent mauvaises, donc ceci pourra doublement en agacer certains, mais je vous promets que cette troisième partie sera incroyablement exempte de dôme du tonnerre, d’Ewoks et de scène de disco provoquée par des symbiotes extraterrestres. [Contient aussi de l’antisémitisme primaire (NdT)].

On a tous fait en primaire l’expérience scientifique où on remplit une casserole d’eau, puis on y verse du poivre, qu’on laisse flotter un peu pour étaler les grains. Ensuite on prend du savon et on le plonge d’un côté de la casserole ; le changement de tension superficielle de l’eau repousse le poivre de l’autre côté. Je suis sûr que vous vous en souvenez. Eh bien, si vous remplacez la casserole par un night-club haut de gamme, le poivre par des filles plus ou moins canons, et le savon par moi, vous aurez une assez bonne idée de ce que le monde de la drague était pour le Sauvageon, le Nez-sarbacane et moi-même.

C’est peut-être pour cela que je m’étais résigné et avais renoncé à remuer mon Boris dans les “soirées disco”. À la place, je pris ma bourse à dés et mes crayons et me rendis chez Dave le Psycho.

À mon arrivée, Dave le Psycho avait retiré le capot de son aquarium en forme de navette de Star Trek [voir Episode I ptgptb(NdT)], et nourrissait ses petits animaux domestiques.

Moi : “Comment vont les petits monstres ?

Dave le Psycho : Ce ne sont pas des monstres, mais des artémies wiki.

Artémies

Moi : Singes de mer… Artémies… Quelle différence ça fait ?

Dave le Psycho : Ne pas te tromper de nom éviterait à ton personnage de perdre inopinément un membre ou deux.

Wes la Fouine : Il ne déconne pas. Fais gaffe.

Moi : Hé, Wes comment tu vas ?

Wes la Fouine : Ça va, je pense.

Moi : Toujours à la recherche d’une nouvelle fac ?

Wes la Fouine : Je crois que je vais me prendre un ou deux semestres de congé sabbatique et attendre que toute cette histoire se tasse.”

Là, je dois prendre un instant et expliquer que Wes avait été viré de la fac récemment à cause d’un accident monstre mettant en jeu un scooter avec des freins défectueux, une marche des étudiantes pour le droit de sortir la nuit et un oreiller de bain gonflable.

Bâtard de Tricheur : Qui a besoin d’aller à la fac ? Ils m’ont viré parce qu’il se trouvait que j’avais certaines des réponses à l’exam dans mes chaussettes. Je veux dire, si la triche est tolérée pour James T. Kirk, alors cela doit passer pour l’Université d’Albany [État de New York (NdT)].

Dave le Psycho : J’ai jamais rien entendu d’aussi vrai. Rajoute-toi 5000 XP.

L’Incroyable Pochtron : Purée. Je dois baiser qui pour augmenter mon personnage de deux ou trois niveaux ?

P'tit Pervers : Tu sais…

L’Incroyable Pochtron : J’ai du gaz lacrymo !

Nous sortîmes nos dés, nos crayons et fiches de perso. Je remarquai qu’un membre du groupe manquait à l’appel mais avant même de pouvoir le signaler, El Disgusto arriva en montant lentement les escaliers. Il avait des taches de sueur et était couvert de crasse.

El Disgusto : Pas un mot.

L’Incroyable Pochtron : On se demandait juste ce qu’il s’était passé. Si tu as la grippe, je pourrais boire à ta santé.

El Disgusto : Je ne tombe jamais malade. Mon corps est une machine sans faille.

Moi : Chais pas, on dirait que tu sens le mazout brûlé…

El Disgusto : La ferme, le nouveau ! Et pour votre information, mes parents m’ont relégué à la cave car ils pensent que le foutu chien a besoin de plus d’espace. Je déteste ce chien.

Dave le Psycho : Je suis sûr que tout le monde se souvient, à l’exception bien sûr de l’Incroyable Pochtron, où nous en étions la semaine dernière : vous vous remettiez de la dernière aventure dans le château d’Olaf, le Guerrier de Bâtard de Tricheur.

Bâtard de Tricheur : En fait c’est son château d’été, tu te rappelles ?

Dave le Psycho : Comment l’oublier ? Maintenant comme je disais, vous vous remettiez de vos blessures ou attendiez le retour dans l’équipe de Sonia la Rousse Incendiaire, le perso de P’tit Pervers.

Moi : Je la croyais derrière les barreaux.

P’tit Pervers : C’était le cas, mais Dave le Psycho et moi avons joué son évasion au téléphone pendant que je bossais. J’ai écrit un compte rendu et vous l’ai photocopié.

El Disgusto : Tu penses vraiment que je vais lire quelque chose que tu as écrit ? Comme si le Baron Raclée von Jassur ne méprisait pas assez le reste du groupe.

Bâtard de Tricheur : Je le range ici dans mon dossier, avec ces assignations à comparaître.

Moi : Eh bien, pour ma part, il me tarde de lire ceci, je pense que l’écriture créative est toujours un… AAAAAAHHHH. C’est quoi ça ? C’est quoi ça ?

P’tit Pervers : Ah désolé. C’est pour mon projet de Théorie Unifiée du Porno ptgptb. Je sais pas comment ça s’est retrouvé agrafé là.

Moi : Mais c’est… c’est…

P’tit Pervers : Ouais c’est pas totalement parfait à ce stade.

Moi : Y a une image d’une jeune elfe à la peau verte et aux gros seins habillée en écolière catholique… et elle pisse sur Ronald McDonald.

Ronald McDonald

P’tit Pervers : Ouais mais y a quelque chose qui manque, non ? Peut-être s’il y avait deux nanas elfes…

Moi : Je crois que je vais gerber.

L’Incroyable Pochtron : Tu les as en format portefeuille ?

Dave le Psycho : Et sans tenir compte de tout ce qui vient d’être dit, vous voyez arriver au château d’été d’Olaf, une Sonia la Rousse Incendiaire un peu plus débraillée que d’habitude.

P’tit Pervers : Sonia la Rousse Incendiaire salue chaleureusement tous ses vieux amis… C’était quoi encore le nom de ton guerrier nain, AB3 ?

Moi : Thad, il s’appelle Thad.

P’tit Pervers : Elle salue Olaf, Thad et Dean le magicien…

L’Incroyable Pochtron : À la tienne !

P’tit Pervers : Et Lord Raclée von Jassur, Premier du nom.

El Disgusto : Je suis un ninja ! Comment t’as fait pour me voir ? Comment t’as fait pour me voir ? Connaissance en métajeu !

Moi : Ouais c’est ça, reste derrière les rideaux avec Sganarelle.

Wes la Fouine : J’ai créé un autre voleur appelé Worrell… Est-il présent ?

Dave le Psycho : Pas encore.

Moi : Comment on a fait pour se retrouver ensemble après la débâcle du Tarot Merveilleux déjà ?

Bâtard de Tricheur : J’ai claqué des souhaits d’un de mes Anneaux de Triples Souhaits.

Moi : Un de tes… ?

Wes la Fouine : Alors je vois pas pourquoi tu n’as pas pu souhaiter que mon ancien perso revive.

El Disgusto : Parce qu’il était naze.

Bâtard de Tricheur : Désolé vieux, mais c’était soit sauver ton personnage, soit avoir un château en adamantium [le métal indestructible dont sont faites les griffes de Wolverine (NdT)]. Le choix allait de soi.

Wolverine

Moi : Tu as souhaité quoi…

L’Incroyable Pochtron : Ça déchire… La herse fait “Snikt !” et tout et tout !

Dave le Psycho : Un des gardes de ton palais sonne l’alerte… Un cavalier solitaire approche.

Wes la Fouine : OK, mon personnage est à cheval.

Dave le Psycho : Chut… Pas encore.

El Disgusto : Je me tiens prêt à faire une attaque sournoise.

Bâtard de Tricheur : J’ordonne aux gardes de prendre les armes !

L’Incroyable Pochtron : Je suis trop occupé à étudier le brassage dans ma chambre.

P’tit Pervers : Mon personnage suit tout le monde vers le portail pour voir ce qu’il se passe. Elle dégaine son épée, rassurée par la forme d’acier oblongue et rigide qu’elle tient dans sa main.

Moi : Je l’accompagne aussi.

Dave le Psycho : Le cavalier solitaire s’approche du portail.

Wes la Fouine : Mon perso….

Dave le Psycho : Chut ! Le cavalier a des cheveux noirs et bouclés, un nez extraordinaire, il porte une tunique qui flotte à la Gandalf couverte de signes kabbalistiques. Il commence : “Po ! Po ! Po ! J’ai ontondu dire qu’il y a ici des avontiriers qui cherchent l’avontire et au lié de ça ché voua une bonde d’archers et un pourtail fermé, Aïe Aïe Aïe.

Moi : Pourquoi tu imites Popeck ? Et une mauvaise imitation par-dessus le marché.

Popeck

Dave le Psycho : Le cavalier solitaire s’écrie “Qui est ce meshuga de Popick ? Jamais ontondu parler de li ? J’aura di ontondre parli de li ? Moi c’i Apollo Dec. Aïe Aïe Aïe.

Bâtard de Tricheur : Je demande à l’excentrique pourquoi il est venu trouver la Ligue des Aventuriers Aventureux.

Moi : Notre groupe a un nom maintenant ?

Wes la Fouine : S’ils avaient eu un souhait de plus, on aurait eu des vestes avec notre logo.

L’Incroyable Pochtron : Avec une finition en adamantium. La fermeture éclair aurait fait “Snikt” et tout et tout.

Dave le Psycho : Apollo Dec dit “La ligue des Avontiriers Avontireux, Po ! Po ! Po ! Quel nom ! Je ponse que cela vit dire que vous ites partonts pour l’avontire. Ça vous tonte l’avontire pas vri ? Aïe Aïe Aïe.

Moi : Steuplait, arrête ça !

Dave le Psycho : Arrête quoi ?

Moi : Finir chaque phrase par “Aïe Aïe Aïe !”. C’est antisémite.

Dave le Psycho : De quoi tu parles ? Y’a pas de juifs dans Greyhawk.

Moi : C’est un stéréotype dégradant… Si t’étais un comique juif, ça passerait peut-être pour de l’humour mais là tu fais entrer la partie dans une période de sinistre mémoire.

L’Incroyable Pochtron : Punaise ! T’aurais grave flippé si t’avais été là quand on a rencontré la foire aux monstres elfes noirs.

P’tit pervers : Pause clope !

L’Incroyable Pochtron : Je t’accompagne.

Dave le Psycho : Allez dehors messieurs, je ne veux pas que des taches de fumée fassent baisser le prix de revente de la maison.

P’tit Pervers : Pourquoi ? Elle appartient à tes vieux, pas à toi.

Dave le Psycho : Ils ne sont pas éternels, non plus !

P’tit Pervers et L’Incroyable Pochtron descendirent pour fumer. Tout fut calme pendant un moment, Dave le Psycho relisait ses cinq pages de tables de coups critiques, Wes la Fouine contemplait avec une aura palpable d’impatience sa miniature de Halfling récemment peinte, et Bâtard de Tricheur gribouillait les bords de sa fiche de perso. Ce n’est qu’après qu’on a compris qu’il ajoutait des choses dans son inventaire. Finalement j’ai rompu le silence, obligé !

Moi : Dave le Psycho, je ne comprends pas ton racisme.

Dave le Psycho : Eh bien moi, ce que je ne comprends pas, c’est l’idée de quotas, de discrimination positive et de traitement de faveur dans un pays où l’égalité des chances est pour tout le monde.

Moi : Ces choses-là existent parce que la discrimination était si répandue.

Dave le Psycho : Oui ! Était si répandue. Pourquoi devrais-je payer pour les péchés d’une génération antérieure ? C’est du racisme inversé, rien d’autre !

Moi : Mais non !

Dave le Psycho : C’est comme quand ce pays monte au créneau pour la liberté d’expression de NTM, mais si j’essaye d’organiser une White Pride en pleine convention Star Trek, tout à coup il y a un gauchiste déguisé en Gorn qui me fout un coup de pied dans les testicules.

Un Gorn dans Star Trek

Moi : Ouais et puis autre chose, comment peut-on être raciste et fan de Star TrekStar Trek, ça parle avant tout de races et cultures différentes qui apprennent à collaborer pour explorer la galaxie.

Dave le Psycho : Non ça, c’est simplement ce que les crétins s’imaginent à propos de Star Trek.

Moi : Hein ?

Dave le Psycho : Oui, Star Trek, ça parle de différentes races et cultures qui apprennent à collaborer pour explorer la galaxie sous le commandement d’un homme blanc viril. Sous l’autorité de James T. Kirk, toutes les races et cultures savent bien qui est le chef et à quoi s’en tenir. Je ne comprends pas comment tant de gens ont pu louper un point aussi important de la série.

Moi : Ouah ! Délire à tribord ! Tout ça car on t’a refoulé quand t’as essayé d’être pompier.

Dave le Psycho : Penses-y. Penses-y : chaque fois qu’on voit un amiral ou un capitaine noir dans les séries ou l’un des films, il se trouve être un incompétent fini. Jim Kirk doit voler à leur secours, gâchant un temps précieux au lieu de prêcher la bonne parole aux races inférieures de la galaxie. Prends l’Amiral Cartright dans Star Trek IV : “On ne peut survivre sans le soleil !” Quel crétin des Alpes !

Moi : Mais dans Deep Space 9

Dave le Psycho : Je refuse de discuter de Deep Space 9. C’est pas canonique.

Moi : Comment ça pas canonique. Il y a de la continuité, c’est dans l’univers de Star Trek et…

Dave le Psycho : Ça. N’est. Pas. Canonique.

C’est alors que l’Incroyable Pochtron et P’tit Pervers revinrent, gloussant d’un ton conspirateur. Un regard réprobateur de Dave le Psycho et le bruit de ses dés les remirent à la table de jeu et dans la peau de leur personnage. La Ligue des Aventuriers Aventureux eut un dîner d’affaires avec Apollo Dec. Étaient présents le magicien yiddish, mon PJ nain, Sonia, Olaf et Dean autour d’un somptueux repas servi dans de l’argenterie en adamantium qui faisait “Snikt” à la moindre provocation. [Le ninja] Lord Raclée Von Jassur se cachait sous la table et de temps en temps piquait un feuilleté et nous injuriait. On ne pouvait que supposer que le personnage de Wes était en route.

Il se trouva qu’Apollo Dec avait en sa possession une carte qui révélait l’emplacement de cinq cachettes au trésor qui se trouvaient comme par hasard dans les environs. Il promit de partager le trésor équitablement si nous l’aidions. Il promit aussi de révéler à l’Incroyable Pochtron un endroit où se procurer des tuniques à prix de gros.

Dave le Psycho : Donc vous vous équipez et vous sortez. Apollo Dec est en tête sur son destrier.

L’Incroyable Pochtron : Mon personnage lui demande dans quel type de magie il est spécialisé ; on pourrait faire des échanges de sorts.

Dave le Psycho : Il te répond “Tu me pronds pour quoi, Schlomo le Grimoire ambulant ou quoi ? Va achiter tes sorts comme tit le monde… Mais je connis un scribe qui peut te faire un bon rabais si t’achètes en gros. Aïe Aïe Aïe.

Moi : <Soupir>

Dave le Psycho : Contre toute attente, le groupe maintient une bonne vitesse de croisière, mais vous devez établir un campement pour la nuit.

El Disgusto : J’enduis mes dagues de poison paralysant. Le prochain raton-laveur géant qui tente de bouffer mon perso le regrettera.

Bâtard de Tricheur : Mon perso prend le premier tour de garde.

Dave le Psycho : Lançons les dés sur la table des rencontres aléatoires… et tu as du bol. Une déesse itinérante te donne…

L’Incroyable Pochtron : Une quête ?

El Disgusto : Un katana ?

P’tit Pervers : Une branlette ?

Moi : Bordel, pourquoi pas tout cela à la fois ?

Dave le Psycho : Hum, j’aime bien ce que tu viens de dire AB3. Vraiment. OK, Bâtard de tricheur, tu obtiens une épée vorpale qui vise magiquement un endroit particulier de l’anatomie. La déesse Solanas te raconte que l’épée s’appelle Fendeuse d’Entrejambes. Elle a deux épées sœurs : Couperet à Glaouis et Massacreur de Bites ; peut-être les rencontrerez-vous un jour.

Moi : Quelque part dans le monde, Michael Moorcock pleure en ce moment.

P’tit Pervers : Je prends le deuxième tour de garde.

Dave le Psycho : OK lançons les dés pour ta rencontre…

Moi : Tu sais, ce n’est pas parce que le Guide du Maître de Donjon a des tables de rencontres aléatoires que tu dois absolument les utiliser à chaque heure de la vie des PJ.

Dave le Psycho : Ah oui bien sûr, on n’est pas obligé, Al Bruno III. Et maintenant tu vas nous dire que la fin de Mississippi Burning n’est pas horrible.

Moi : Aïe Aïe Aïe.

Wes la Fouine : AB3, pourquoi te pinces-tu les yeux comme ça ?

Dave le Psycho : P’tit pervers, Sonia la Rousse Incendiaire ne fait aucune rencontre pendant son tour de garde. Le prochain c’est L’Incroyable Pochtron. Durant ta garde, tu rencontres un paladin errant qui se déplace en direction du campement.

L’Incroyable Pochtron : Je m’assure qu’aucun récipient n’est ouvert.

Dave le Psycho : Le Paladin se présente comme B-Laster, il est vieux mais d’allure très noble. Il te demande si vous êtes la Ligue des Aventuriers Aventureux.

L’Incroyable Pochtron : Je réponds “Je veux, mon neveu.”

Dave le Psycho : Il explique qu’il est chevalier de l’ordre sacré de [la déesse de la torture] Loviatar et voudrait savoir ce qui est arrivé aux deux prêtres que vous avez engagés pour votre périple [voir Episode I ptgptb et Episode II ptgptb, les PJ les ont laissé mourir ou tués après avoir lancé tous leurs sorts de soins. (NdT)].

L’Incroyable Pochtron : Ah oui, eux ! Je lui dis qu’on les a envoyés en éclaireurs.

Dave le Psycho : Ah vraiment ?

L’Incroyable Pochtron : Je veux dire qu’on les a laissés au château pour plus de sécurité.

Dave le Psycho : Il demande où se trouve le château.

L’Incroyable Pochtron : Je lui donne les indications pour l’emmener jusqu’aux Grottes du Chaos.

Dave le Psycho : Il s’éloigne à cheval mais avant, il te dit de rester sur tes gardes. Il t’annonce que des bandes de pillards rôdent dans la région et que personne n’est en sécurité. AB3, pendant ta garde, ton perso doit faire un jet de sauvegarde contre la magie.

Moi : En quel honneur ?

Dave le Psycho : Qui sait ? P’têt’ pour rien.

Moi : OK.

Dave le Psycho : Et tu as obtenu un magnifique échec critique, AB3. Thad le nain s’endort pendant sa garde et se réveille avec un brocoli géant en guise de tête.

Je fus pris d’un fou rire, puis je me rendis compte qu’il ne plaisantait pas.

Moi : Ma tête est un quoi ?

Dave le Psycho : Un brocoli géant.

Moi : Pourquoi ?

Dave le Psycho : C’est magique.

Moi : Mais pourquoi ? Que s’est-il passé ?

Dave le Psycho : On t’a lancé un sort et tu as raté ton jet de sauvegarde contre la magie.

Moi : Mais est-ce que ma tête est toujours faite de chair qui a l’air d’un brocoli géant ou est-ce de la matière végétale qui a été d’une quelconque façon greffée sur la chair de mon cou ? Comment je fais pour voir ? Comment je fais pour respirer ?

Dave le psycho : C’est magique, je n’ai pas à donner plus de détails.

El Disgusto : Ça t’apprendra à t’endormir pendant ton tour de garde. Je prends la garde d’après et je m’assure de rester dans l’ombre. Je suis sûr qu’en son for intérieur, le Baron Raclée pense que son Sensei aurait été très fier de lui, si le Baron Raclée n’avait pas été obligé de le tuer.

P’tit Pervers : Ooooh, de l’historique de perso…

El Disgusto : Et par “été obligé” je veux dire “avoir envie”.

Dave le Psycho : El Disgusto, pendant sa garde, ton perso repère une Halfling qui approche du campement.

El Disgusto : Je lance ma dague, qu’importe qui ça peut être.

Dave le Psycho : Très bien alors Wes, fait un jet de sauvegarde contre le poison paralysant sur la dague.

Wes la Fouine : Mais.. Mais…

Dave le Psycho : Ah là la! Un autre jet de sauvegarde raté. Le nouveau PJ de Wes s’évanouit en dehors du camp. Son nom c’était Worrel ?

Wes la Fouine : Oui.

Dave le Psycho : Il ne s’est pris que 2 point de dommage donc à part ça et la paralysie, il se porte à merveille.

El Disgusto : Je coupe une longue branche solide d’un des arbres et je l’y attache.

Et voilà comment notre groupe se retrouva avec un guerrier nain avec une tête en forme de brocoli, une meuf en bikini en maille, deux magiciens, le guerrier le plus chanceux du monde et un ninja qui brandissait un demi-homme redoutable au bout d’une branche. Apollo Dec nous mena vers la première cachette au trésor. Le trésor était gardé par un bon nombre de hobgobelins sauvages desquels nous nous départîmes avec plus ou moins d’aisance. Bien des crânes ont été brisés et encore plus d’entrejambes furent fendues. On passait en revue le trésor quand L’Incroyable Pochtron et P’tit pervers s’excusèrent à nouveau.

P’tit Pervers : Pause clope !

L’Incroyable Pochtron : Yabon !

Moi : Depuis quand tu fumes, toi ?

P’tit Pervers : C’est une habitude très sexe. Tu sais, si une femme te souffle sa fumée à la figure, ça veut dire qu’elle veut que tu la sautes.

El Disgusto : Ça compte si ça sort de sa trachéo et pas de sa bouche ?

P’tit Pervers : On revient dans 5 minutes.

El Disgusto : Allez on partage le trésor.

Wes la Fouine : Est-ce que mon personnage peut enfin bouger ?

Dave le Psycho : Cela ne fait pas 24 heures, non ? Bon alors…

Moi : Peut-être qu’on ne devrait pas laisser le ninja se servir d’un PJ sur une branche d’arbre comme arme de corps à corps.

El Disgusto : Tu crois que tu peux m’en empêcher… tête de brocoli ?

Dave le Psycho : Wes a toujours la moitié de ses points de vie donc il ne devrait pas pleurnicher autant.

Bâtard de Tricheur : On peut juste se partager le trésor siouplaît ?

El Disgusto : …tête de brocoli…

Dave le Psycho : Bien sûr … Vous regardez parmi les douzaines de coffres au trésor et sacs à butin, et la seule chose de valeur que vous trouvez c’est une seule pépite d’or.

Moi : Une pépite d’or ? Nous avons fait tout ce chemin pour une pépite d’or ?

Bâtard de Tricheur : Est-ce une grosse pépite d’or ?

Dave le Psycho : Apollo commente “Bien qui auri pridit cici ? Ces monstres ont di fire fondre l’or et le vondre ? Qui auri imaginé ça ? Le prochain ondroit, ce sera la baraka, je suis sir. Aïe Aïe Aïe.

El Disgusto : …tête de brocoli…

Moi : Loin de moi l’idée de remettre en question le management de la Ligue des Aventuriers Aventureux mais peut-être que toute cette opération est un fiasco. On pourrait peut-être retourner au château et voir si on peut trouver un moyen pour que ma tête n’ait plus l’air de faire partie d’une salade composée.

Bâtard de Tricheur : Enfin, voyons, AB3. Ceci est du Donjons et Dragons dans la pure tradition gygaxienne. Si les personnages-joueurs ne se retrouvent pas mutilés, ne changent pas de sexe, ou ne sont pas drainés de leurs niveaux de vie, comment sauront-ils qu’ils ont vraiment mérité le trésor ?

Moi : Quel trésor ? Tu parles de la pépite ?

Sans trop tarder, P’tit Pervers et L’Incroyable Pochtron revinrent de leur pause cigarette décontractés et l’œil vitreux. Notre troupe persévéra vers la deuxième cachette au trésor et nous nous retrouvâmes à combattre une petite armée d’orques. Pour la deuxième fois, nous triomphâmes d’eux sans difficulté particulière après qu’Apollo Dec eut invoqué un escadron d’élémentaires en soutien. Nous pansâmes nos blessures, ou, dans le cas de Wes, pleurâmes la perte de nos doigts, puis nous recommençâmes la répartition du butin.

El Disgusto : … tête de brocoli…

Dave le Psycho : Les coffres au trésor contiennent des restes de métal rouillé et de vieux vêtements mais à part ça, tout ce que vous trouvez c’est une pépite d’argent.

Moi : Encore une pépite ! Tout ce qui nous reste à faire est de trouver la pépite de bronze et on organise les jeux olympiques de D&D.

Wes la Fouine : Siouplait, ne remettez plus le feu à mon perso. Un demi-homme non allumé comme un pétard fait tout autant de dommages par contusion qu’un demi-homme en feu.

P’tit Pervers : Hé ! Il a dit pétard.

L’Incroyable Pochtron : Tope-m’en cinq !

El Disgusto : … tête de brocoli…

Bâtard de Tricheur : Je suis sûr que le prochain sera un gros trésor.

Moi : Moi, je crois qu’on nous balade. C’est comme ce vieux dicton. Trompe-moi une fois, honte à toi, trompe-moi deux fois honte à moi … enfin honte à nous... Au groupe.

Dave le Psycho : Apollo Dec dit…

Moi : Attends une seconde… Apollo… Dec… Apollo Dec… Holodeck ? On est dans un hologramme ? Espèce d’enfoiré ! Apollo Dec, mon cul ouais ! Attends que je m’occupe de son cas ! J’attaque le sorcier yiddish ! J’arrive pas à croire que je viens de dire ça…

Holodeck

Dave le Psycho : Parfait ! Fais ton jet d’attaque.

Moi : Et bim ! 20 naturel !

El Disgusto : … tête de brocoli…

Moi : Oh, ferme ta gueule !

Dave le Psycho : Loupé !

Moi : Quoi ?! Mais j’ai fait un 20 naturel.

Dave le Psycho : Loupé. Et tout d’un coup Appolo Dec s’envole en riant d’un air de juif.

Moi : S’envole ! Il peut voler maintenant ? Quoi ? Il a un objet magique, un sort de vol ?

Dave le Psycho : Et alors qu’il s’éloigne en volant, le sort d’illusion qu’a lancé Apollo Dec, illusionniste niveau 20, se dissipe et tu découvres que non seulement ta tête n’a pas été transformée en brocoli mais aussi que Bâtard de Tricheur a utilisé un bâton sculpté dans de la fiente de dragon en guise d’épée magique, et que le personnage de Wes est mort depuis quelques heures.

Wes la Fouine : J… Je le connaissais à peine.

Bâtard de Tricheur : Merci beaucoup AB3.

Dave le Psycho : Vous vous rendez compte aussi que la cachette au trésor gardée par des monstres était en fait un orphelinat d’enfants handicapés, géré par des nonnes hémophiles de l’ordre de Loviatar.

Moi : Et pourquoi on n’a pas eu de jet de sauvegarde pour nous apercevoir de tout ce micmac ? Bon sang, il y a même des jets de sauvegarde de contrôle de la vessie dans ce putain de jeu !

Dave le Psycho : J’ai fait ces jets pour vous. En secret. Je les ai tous ratés.

Moi : Est-ce que c’est une soif de domination malsaine de ta part ? Sommes-nous juste des pantins que tu agites pour ton bon plaisir ?

Wes : Comment peut-on danser si on n’a pas pieds ?

Moi : La ferme, Wes !

P’tit Pervers : Pause clope.

L’Incroyable Pochtron : Appelez-nous quand la dispute sera finie.

Dave le Psycho : Hey, je suis là pour jouer à un jeu mais je ne vais pas lobotomiser ou édulcorer mon monde pour un type qui lève les yeux au ciel à chaque fois que j’affirme que Bill Cosby est un instrument de la conspiration sioniste gay.

Bill Cosby

Moi : Non seulement tu es un mauvais Maître de Donjon mais en plus tu es complètement barge !

Dave le Psycho : Je ne suis pas un mauvais Maître du Donjon.

Wes la Fouine : Ça sent le brûlé, non ?

L’Incroyable Pochtron et P’tit pervers remontaient l’escalier en trombe. Il s’avéra que, puisqu’ils ne fumaient pas exactement du tabac pendant leurs pauses clope, ils avaient décidé de descendre à la cave plutôt que de sortir. Une pipe à eau tombée plus tard, et la pile de bois pour la cheminée désaffectée avait pris feu, et maintenant les flammes se propageaient lentement. Dave le Psycho garda son calme pendant la crise.

Dave le Psycho : Mon Dieu ! Sauvez les suppléments !

On a donc attrapé autant de livres et de boîtes que possible, mais pour chaque livre de Runequest qu’on a pu sauver, on a dû sacrifier des exemplaires de Gurps Space Opera et de Deadlands. Nous courûmes à travers la fumée, et nous nous effondrâmes à bout de souffle sur le gazon. Les flammes léchaient déjà le rez-de-chaussée et nous entendîmes les sirènes au loin.

Dave le Psycho : Je vais être grave privé de sortie.

Moi : Où… Où est Wes ?

El Disgusto : Je me disais bien que j’avais marché sur quelque chose.

L’Incroyable Pochtron : Le feu… C’est comme s’il dansait.

P’tit Pervers : Moi, je vois des strip-teaseuses dans le feu… Voyons si nous pouvons avoir une table près de la scène.

Bâtard de Tricheur : Je ne le vois pas.

Dave le Psycho : Oh mon dieu. Vous vous rendez compte de ce que ça veut dire ?

Dave le Psycho se releva et s’engouffra dans la maison en courant et en évitant les flammes. Nous avions les yeux rivés sur la maison sauf El Disgusto qui nous insulta, monta dans sa voiture et partit. Une minute passa, puis deux. Les flammes gagnaient du terrain. Soudain une forme noirâtre s’extirpa de la maison, courant sur la pelouse en s’arrêtant seulement sur la chaussée, les mains sur les hanches pour essayer de contenir sa toux et de reprendre son souffle. La fumée épaisse avait noirci la silhouette de la tête aux pieds, mais on ne pouvait pas se tromper sur le profil.

Moi : Wes, où est Psycho Dave ?

Wes la Fouine : Je le croyais avec vous. Je l’ai jamais vu.

Bâtard de Tricheur : Pourquoi y est-il retourné ?

Puis Dave le Psycho tituba hors de la maison, aveuglé par la fumée, les cheveux et les épaules fumants, tenant fermement son précieux aquarium en forme de navette Galileo. Il parvint jusqu’en bas des marches juste pour se prendre les pieds sur L’Incroyable Pochtron qui était assis sur la pelouse les jambes croisées, à regarder le feu. L’aquarium vola hors des mains de Dave qui tomba la tête la première sur les genoux de P’tit Pervers. L’aquarium fit un vol plané d’un bout à l’autre de la pelouse. Je fermai les yeux. Je ne pouvais pas voir ça. Mes oreilles résonnèrent d’un fracas qui secoua le sol.

J’ouvris les yeux et vis que Wes avait rattrapé de justesse l’aquarium dans ses bras. À quelques pâtés de maisons de là, je vis la vraie cause du fracas : El Disgusto avait essayé de faire une queue de poisson devant un des camions de pompiers, avec un résultat désastreux.

En ce qui me concernait, c’était la goutte d’eau qui faisait déborder le vase. J’étais résolu de ne plus jamais jouer avec ces joueurs-là ou toute autre bande de dégénérés et de cas sociaux. Avec précaution, je séparais Dave le Psycho d’El Disgusto : il me fixa d’un regard vague mais je n’étais pas sûr qu’il me voyait vraiment. J’avais l’impression qu’il allait tomber dans les pommes à n’importe quel moment, donc je lui confectionnai un coussin avec de vieux exemplaires du magazine Dragon.

Moi : Dave le Psycho !

Dave : Artémies… Sauvées ? (1)

Moi : Oui.

Dave le Psycho : Je n’ai jamais réussi l’examen d’entrée des pompiers. Qu’est-ce que tu penses de mon intervention ?

Moi : Dave le Psycho.

Dave le Psycho : Tu as été… malgré tes pleurnicheries et tes gémissements… mon meilleur joueur.

Moi : Oh mince, alors.

Dave le Psycho trembla un peu et s’évanouit. J’enrageai intérieurement… Super, maintenant si j’arrêtais leur parties idiotes, je me sentirais coupable. Ou peut-être qu’il me laisserait maîtriser quelque chose, ou qu’on pourrait faire une campagne de super-héros. Ça ne serait pas si mal. En plus, me fréquenter pourrait faire évoluer ces marginaux et sociopathes. Peut-être que pour la première fois de ma vie, je pourrais être un exemple positif ! Je cherchai Wes la Fouine du regard, sans trop savoir ce qu’on dirait aux policiers à qui on devrait sûrement quelques explications. Il leva la main pour me saluer.

L’aquarium en forme de navette Galileo se brisa au sol dans un bruit de verre mouillé.

Article original : All Hands on dec


(1) NdT : Tout ce qui suit est une allusion à la mort de Spock dans Star Trek 2 : La Colère de Khan. [Retour]

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