L’art d’arbitrer 8 : Test d'ensemble
© 2016 Justin Alexander
Une mauvaise application de la technique de résolution d’actions en plusieurs étapes entraîne un problème que j’appelle le lancer de dés vers l’échec alex (en).
L’exemple le plus courant de lancer de dés vers l’échec [rolling to failure (NdT)] est sans doute la façon dont beaucoup de MJ gèrent la Discrétion. Ils demandent de faire des tests de Discrétion pour un PJ chaque fois qu’il se déplace ou qu’il rencontre un nouvel adversaire. S’il a 75 % de chances de réussir un test de Discrétion, après seulement trois tests, ses chances de tous les réussir ont chuté à 42 %. Après cinq tests, elles ne sont plus que de 23 %. Et la première fois qu’il échoue à un test, évidemment, sa tentative de furtivité est terminée.
Les chances sont encore pires si le MJ effectue chacun de ces tests en demandant que tous les PJ fassent un test de Discrétion, que tous les PNJ fassent un test de Perception, et si un seul test de Perception est supérieur à un seul test de Discrétion, c’est foutu.
Bien sûr, la conséquence est que les joueuses cesseront tout simplement que leurs persos essayent d’être discrets. Et, par conséquent, tout un ensemble de tactiques - et les trucs vraiment cools pouvant découler de ces tactiques - disparaissent dans un nuage de fumée.
« Pourquoi mes joueuses foncent-elles toujours dans le tas sans réfléchir ? »
C’est peut-être parce que vous ne leur laissez pas le choix.
Test d’ensemble
La solution ici est de faire un test d’ensemble (let it ride).
Lorsqu’un PJ tente une action particulière, faites un unique test et laissez le résultat s’appliquer. S’il essaie d’escalader une falaise, faites un seul test d’Escalade pour déterminer si le perso arrive ou non au sommet (même s’il lui faut plusieurs tours, minutes ou heures pour y parvenir). Si l’intention est de « se faufiler à travers la base ennemie », alors vous faites un test de Discrétion pour toute l’opération et cela détermine son degré de discrétion pour ça. (Et la réponse peut être, « Pas très furtif, donc quelqu’un va probablement te repérer ». Et ce n’est pas grave).
Poursuite de l’interaction :
Une erreur courante lorsqu’on demande un test d’ensemble, est qu’on laisse le MJ juste résumer toute la tentative. Par exemple, une joueuse dit que son perso veut se faufiler dans le camp des orcs, alors le MJ demande un test de Discrétion, voit une réussite, et dit : « OK, tu as réussi à passer les gardes qui patrouillent les abords du camp, à te frayer un chemin jusqu’à la tente du chef et à t’emparer du diadème. »
Évidemment, c’est une option possible. Mais ce qu’il y a de bien dans le Test d’ensemble, c’est qu’une joueuse peut toujours faire des choix significatifs pendant que son résultat n’a pas fini d’être déterminé. En laissant la joueuse aux commandes, le ou la MJ peut découvrir qu’elle veut que son perso assomme les sentinelles ou se cache près d’une tente pour écouter les plans des orcs.
Ces choix peuvent également avoir des conséquences sur le succès ou l’échec de l’action. Par exemple, si elle choisit un trajet à travers les endroits du camp plus sécurisés, il est possible que sa réussite au test de Discrétion ne soit pas assez élevée pour y faire face.
Point d’échec : En parlant de rater son jet, comment un Meneur ou une Meneuse, qui utilise l’approche du Test d’ensemble, peut-elle déterminer à quel moment d’une tentative l’échec se produit ?
Lorsque le résultat du test est comparé séquentiellement à une série de défis variables (comme un test de Discrétion comparé à plusieurs sentinelles et gardes), cela reste relativement facile à établir : le PJ se fait repérer par le garde qui bat en premier son test de Discrétion.
Mais qu’en est-il de quelque chose comme le test d’Escalade pour grimper une falaise ? En cas d’échec, à quelle hauteur de la falaise se trouvait le perso avant d’échouer ?
Bien sûr, comme pour tout test, vous devez encore déterminer ce que signifie l’échec. Est-ce que cela signifie qu’il tombe ? Qu’il doit se rattraper avant de tomber ? Qu’il reste bloqué ? Qu’il se rend compte qu’il ne peut pas atteindre le sommet pour une raison quelconque et qu’il doit redescendre ?
En général, il existe trois approches.
- Vous pouvez faire un choix en fonction du résultat qui vous semble le plus intéressant.
- Vous pouvez le déterminer de manière purement aléatoire ; par exemple, vous pouvez lancer des dés de pourcentage pour déterminer jusqu’où le PJ est monté sur la falaise ou combien il a perdu de son argent de départ au casino.
- Ou vous pourriez utiliser la marge d’échec ptgptb du test pour calculer le résultat (ou façonner votre jugement).
Point d’incertitude : une autre technique que j’ai développée pour le Test d’ensemble est le Point d’incertitude. C’est le point où le résultat du test initial risque d’être un échec, mais le personnage a la possibilité de sauver le résultat via une autre action..
Le Point d’incertitude peut être la conséquence de l’échec au test initial.
Par exemple, en se faufilant dans le camp des orcs, le PJ rencontre un éclaireur dont le score de Perception est suffisamment élevé pour la repérer. Peut-elle l’assommer (ou prendre d’autres mesures préventives) avant qu’il ne donne l’alerte ?
Si vous voulez que les règles vous aident à déterminer, vous pourriez décider qu’une petite marge d’échec déclenche un Point d’incertitude et que seule une grande marge d’échec entraîne une catastrophe immédiate.
Cependant, un Point d’incertitude peut aussi être le résultat d’une action tangentielle qui vient interférer de biais avec votre test original. Par exemple, le PJ a fait un test de Social pendant une escroquerie avec l’approche Test d’ensemble. Le perso est en train de discuter avec la cible lors d’une soirée chic, lorsqu’il aperçoit une ancienne victime à l’autre bout de la pièce. Si elle repère le PJ, elle va ruiner sa nouvelle couverture. Peut-il faire un test de Discrétion pour éviter d’être vu ?
Ce que le Point d’incertitude vous permet de faire, c’est d’ajouter des complications pendant que la résolution globale continue d’avancer. Regardez n’importe quel film de braquage jamais réalisé pour voir pourquoi cela peut être utile.
Notez que vous ne faites jamais un test de Discrétion pour maintenir votre test de Discrétion ou un test de Social pour maintenir votre test de Social. Si vous vous faufilez et que vous avez atteint le point où la seule façon de réussir est de réessayer de vous faufiler, cela ne signifie pas que votre tentative initiale est en danger de rater. Cela signifie que votre tentative initiale a échoué.
Fin du voyage : Ceci étant dit, à quel moment une tentative se termine-t-elle réellement et une nouvelle tentative commence-t-elle ? L’échec est certainement un moyen. Si les PJ ratent leur test pour se faufiler dans le camp des orcs, combattent les orcs qui les ont repérés, puis tentent de reprendre leur approche furtive, alors c’est une nouvelle tentative et ils doivent faire un nouveau test.
En l’absence d’échec, la première chose que la MJ doit rechercher [pour détecter le moment d’un nouveau test] est un changement d’approche. Si les PJ se faufilent, et décident de tendre une embuscade à des orcs qui n’ont pas réussi à les repérer, et se lancent dans une grosse mêlée avec eux, c’est aussi la fin de leur approche furtive ; s’ils décident plus tard de revenir à la furtivité, ils devront probablement faire un nouveau test.
Notez que ce n’est pas la même chose qu’une tentative interrompue. Si vous escaladez une montagne et que vous combattez des yétis à mi-chemin, cela ne signifie pas que votre test d’Escalade pour atteindre le sommet de la montagne a échoué ou que les PJ ont changé leur approche. Il a juste été interrompu par le combat contre les yétis. Le test d’Escalade initial devrait se poursuivre.
Plus rarement, le MJ peut également rechercher des changements significatifs de circonstances. Cela devient assez confus, cependant, car il est très facile de tomber dans le piège du « Chaque sentinelle qu’ils rencontrent est un changement de circonstance ! Nouveau jet ! » Ce qui est, bien sûr, l’exact opposé de ce que vous voulez faire. Mais dans certains cas, un événement d’amplitude sismique se produira et les choses changeront tellement qu’il s’agira d’une tâche complètement différente.
Par exemple, si les PJ se faufilent à travers le camp des orcs et qu’à mi-chemin un énorme peloton de Géants de feu attaque le camp, le MJ peut décider que « au milieu d’un champ de bataille rempli de feu » est suffisamment différent d’un « camp d’orcs endormis, la nuit » pour en faire une situation complètement différente nécessitant un nouveau test.
Modificateurs Une autre technique que vous pouvez utiliser pour gérer les changements de circonstances consiste à modifier le test initial. Par exemple, si l’interface cybernétique d’un PJ hacker est touchée par un méchant virus alors qu’il est en train de pirater un serveur principal, le MJ peut simplement appliquer une pénalité au résultat du test initial pour refléter l’affaiblissement de son équipement au lieu de demander un nouveau test.
La suite : l’objectif initial a-t-il été atteint ? Si les PJ tentaient de séduire le Baron von Isbury et qu’il a été séduit, alors cette approche de Test d’ensemble est terminée. S’ils escaladaient une montagne et qu’ils ont atteint le sommet, alors ils ont réussi à franchir l’obstacle.
Dans le même ordre d’idées, vous pouvez également chercher à savoir si une étape ou une réalisation importante a été atteinte. Cela aussi peut devenir confus (« Chaque fois que vous passez une sentinelle, vous avez accompli quelque chose ! Faites un nouveau test ! »). Ce que vous recherchez, ce sont les accomplissements qui ne peuvent pas être trivialement annulés par un échec ultérieur. Par exemple, au lieu d’avoir un seul test d’Escalade pour toute la montagne, vous pourriez avoir un test d’Escalade séparé pour atteindre chaque camp d’étape. En cas d’échec, au lieu d’être contraints de revenir au pied de la montagne, ils peuvent retourner au camp d’étape précédent (ce qui en fait un accomplissement important).
De même, après que les PJ ont pénétré les défenses extérieures d’un complexe ennemi et placé leur dispositif d’accès à distance pirate sur le serveur principal, vous pouvez leur demander de faire un autre test de Discrétion pour sortir du complexe.
Plusieurs étapes contre Test d’ensemble
Vous avez peut-être remarqué qu’à ce stade, j’ai maintenant préconisé, à la fois de décomposer une intention unique en plusieurs étapes et de résoudre de grands laps de temps avec un seul test. Ces deux manières de faire ne sont-elles pas contradictoires ?
Pas vraiment. Ce sont des outils différents et ils peuvent être utilisés de différentes manières pour obtenir des effets différents. Mais comment savoir lequel utiliser ?
Dans une certaine mesure, il s’agit d’un autre domaine qui explique pourquoi cette série d’articles traite de l’art d’arbitrer et non de l’organigramme des règles. Mais voici quelques éléments à garder à l’esprit :
Premièrement, notez que si vous appliquez correctement la résolution d’actions en plusieurs étapes, alors chaque vecteur se termine par une conséquence ou un choix significatif. Vous remarquerez également que l’une des façons dont le Test d’ensemble peut prendre fin est que les PJ choisissent une nouvelle approche ou qu’ils aient atteint une sorte de point de repère (c’est-à-dire qu’il y a eu une conséquence). Dans de nombreux cas, ces approches mécaniques sont en fait les deux faces d’une même pièce.
Deuxièmement, à chaque fois que vous effectuez le même test de compétence à plusieurs reprises et que la conséquence d’un échec est d’effacer toutes les réussites précédentes… Vous devriez probablement Tester l’ensemble par défaut au moins 99 fois sur 100.
L’exception à cette règle concerne les tests d’Endurance, c’est-à-dire les situations où l’échec est assuré et où il s’agit de savoir combien de temps le personnage peut éviter cet échec. Par exemple, combien de secondes pouvez-vous rester conscient dans le vide ? Combien de temps pouvez-vous continuer à nager dans une terrible tempête ? Combien de temps pouvez-vous survivre à l’exposition au froid, au milieu d’un blizzard ?
Enfin, vous ne pouvez généralement pas vous tromper en vous contentant d’une simple question : lequel vous semble le plus amusant ?
Article original : Art of Rulings – Part 8: Let it Ride
Sélection de commentaires
Gamosopher
Je pense que le nœud du problème est que pour certaines tâches, un seul échec condamne toute l’entreprise (l’exemple de furtivité est excellent). Je suppose que faire des tests à chaque fois que les PJ doivent passer une autre sentinelle pourrait avoir un sens si un échec signifie qu’un « Point d’incertitude » a été atteint, au lieu d’un échec total. De cette façon,
- on suit la « logique » d’un combat (où un échec ne signifie pas une défaite instantanée, mais la nécessité de surmonter/faire face à d’autres dangers),
- on enlève au moins une partie de la difficulté de décider quand et dans quelle mesure il faut « faire un Test d’ensemble » ou « en plusieurs étapes »,
- et on résout le problème principal de condamner certains types d’actions à l’échec.
S'mon
C’est une approche raisonnable dans certains cas. Pour les défis complexes, je m’inspire des défis de compétences de la D&D4 grog et je demande 3 échecs avant un échec catastrophique, alors que la réussite de la mission globale peut nécessiter 3 à 6 succès. De cette façon, la tension et l’incertitude augmentent au cours de la mission lorsqu’un test est raté. J’ai fait cela récemment pour une mission d’infiltration en solo et cela a très bien fonctionné. C’est également suffisamment intéressant pour que l’on puisse attribuer de l’XP en cas de réussite.
gaynorvader
Pour la Discrétion, j'ai généralement une politique de triple échec et de réussite unique. Par exemple, si le PJ furtif a raté son test de Déplacement silencieux, cela fera un petit bruit, attirant l’attention du garde, puis l’intruse devra réussir un test de Se cacher à Degré de Difficulté +2, car le garde est plus vigilant qu’il ne l’aurait été.
Si l’intruse rate ce nouveau test, la sentinelle examine avec intérêt la zone où le PJ se trouve ; et la sentinelle se déplace pour mieux voir. Maintenant le PJ doit réussir un test de dissimulation à DD +6.
J’utilise une technique similaire avec les tests d’Escalade ; un échec signifiant qu’ils ont raté leur prise et doivent la rétablir. S’ils échouent, ils perdent l’équilibre en plus de leur prise et ont une dernière chance de la retrouver avant de chuter.
Wyvern
En appliquant l’exemple des « camps d’étape » aux tests de Discrétion, il me semble qu’il serait possible de demander de nouveaux tests lorsque les PJ pénètrent dans de nouvelles zones du camp, tant qu’un échec ne signifie pas que la « tout est raté ». Ils doivent peut-être maîtriser la sentinelle avant qu’elle ne donne l’alerte. Peut-être doivent-ils la fuir (en utilisant les règles de poursuite prévues par le jeu), puis effectuer un nouveau test de Discrétion, éventuellement avec une valeur DD plus élevée en raison de l’état d’alerte élevé. Peut-être doivent-ils battre en retraite et trouver un autre chemin.
Jon
Je peux voir que cela fonctionne aussi pour les combats de masse. Les combats de grande envergure ont tendance à prendre beaucoup de temps et il peut être difficile de maintenir l’intensité tout au long du combat. Je vois bien comment l’utiliser pour en faire une bataille narrative.
Au début du combat, tout le monde fait un jet d’attaque et de dégâts, puis indique le résultat au MJ. Le MJ fait la même chose pour les adversaires. Ensuite, le MJ fait un tour de table et demande aux joueurs de raconter leurs attaques dans l’ordre d’initiative (ou dans l'ordre du tour utilisé) pendant un nombre de rounds égal au modificateur de constitution du personnage, après quoi ils refont un jet. Le MJ peut également demander des jets de dés chaque fois qu’il y a un changement majeur dans le déroulement de la bataille [C’est un peu le système de bataille de Pendragon grog (NdT)].
Pour aller plus loin…
Article supplémentaire (en anglais) : Let It Ride on the Death Star alex (en)
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