Le Guide du Maître de Jeu salaud

Comment utiliser la maîtrise pour résoudre vos problèmes personnels

Des fois il y a dans la vie des coïncidences heureuses, même si elles ne sont pas toujours si fortuites que ça. Vos joueurs veulent relever des défis, affronter des épreuves, et se lancer dans des conflits risqués où ils pourront tester les limites de leurs personnages.

Pendant ce temps, votre vie personnelle est une vraie catastrophe, et vous vous sentez impuissant à redresser la barre. En fait vous vous sentez incapable de faire quoi que ce soit, et ça vous fait vous sentir encore plus mal.

Avez-vous envisagé de vous mettre à maîtriser ?

Comment la maîtrise peut vous aider

Maîtriser des parties vous permet de faire l’expérience du pouvoir de vie et de mort dans un monde virtuel où vous ne risquez pas de vous faire arrêter. Vous êtes le dieu de votre petit univers.

  • Vous pouvez être le dieu du Nouveau Testament : un père sage et aimant, guidant sa descendance vers un avenir meilleur.
  • Ou vous pouvez être le dieu de l’Ancien Testament : un père de l’ère victorienne, lançant des éclairs pour vous assurer la discipline et la loyauté de vos enfants rebelles.

Astuce : si vous voulez libérer vos frustrations, partez sur l’Ancien Testament.

Et le plus beau dans tout ça, c’est que vos joueurs se laisseront faire (*).

Parce qu’ils veulent une lutte âpre et loyale, des défis difficiles à relever.

Lancez les dés derrière l’écran… et mentez

C’est une évidence, alors je ne vais pas approfondir. La plupart des MJ font leurs jets derrière un écran, de façon à ce que les joueurs ne puissent voir le “mécanisme” en action. Ceux-ci présument généralement que si le MJ truque un jet, ce sera au bénéfice des joueurs, pour les protéger d’une mort injuste ou arbitraire(C’est la bonne vieille théorie du “Je ne tue un des PJ que s’ils font n’importe quoi et le méritent”).

Le principe est d’expliquer auparavant aux joueurs que vous pensez que que le réalisme doit être total pour que la partie ait un sens – et que par conséquent vous ne truquerez jamais un jet pour tricher en faveur des joueurs.

Et entraînez-vous à dire sans broncher “Désolé, [Machin], l’orque a obtenu un 20 naturel au toucher…”.

Comprenez les règles de résurrection

En médiéval-fantastique, les sorts ou les rituels de résurrection et de réincarnation sont trop souvent utilisés par des MJ sans volonté pour permettre aux joueurs d’échapper aux conséquences de leurs actions.

Ne les laissez pas faire. Lisez les règles, et quand les joueurs essaient une action de ce genre, appliquez-les strictement et rigoureusement.

“Tu veux dire que je suis passé d’un berserker de deux mètres à un putain de canard ? Eh bien je dis à cet enfoiré de prêtre de réessayer, ici et maintenant !

– Le prêtre ne comprend pas. Il ne parle pas aussi bien le *coin-coin* que toi !”

En fait, tuer quelqu’un, l’autoriser à être ressuscité sous une forme pathétique et inutile, puis le massacrer à nouveau peut être carrément plus drôle qu’une mort honnête et digne :

“Quoi, tu veux dire que les gardes qui m’ont capturé… vont tout simplement me tuer ?

– Non, pas tout de suite… Ils mélangent encore les herbes et les épices.”

Pièges mortels

Les pièges sont toujours une bonne façon d’imposer impitoyablement votre réalité aux joueurs. Il y a quelques façons de les envisager :

Subtil, avec une solution implicite

Cette forme de piège se déclenche sans que les joueurs ne puissent réaliser pourquoi. Ils vont bien sûr supposer qu’il y avait quelque chose à remarquer ou à comprendre mais qu’ils n’y sont pas parvenus. Détaillez un maximum.

Vous entrez dans la salle. Les murs sont recouverts de gravures de créatures fantastiques, et le sol est fait de panneaux de marbre poli. Au centre de la pièce se trouve un autel doré, avec la statue d’un serpent à plusieurs têtes en façade. Soudain, de puissants jets de flammes surgissent de plusieurs des bouches des créatures, engloutissant complètement la pièce dans les flammes. Jets de sauvegarde, tout le monde ?

Le mieux est de laisser les joueurs réfléchir eux-mêmes à ce qu’ils ont pu manquer, comme il a été décrit dans la phase III de Maîtriser avec que dalle. S’ils arrivent à trouver une explication plausible…

Le serpent avait trois têtes, et dans l’ancien culte ka-ga-ree, le serpent est un symbole protecteur, ce qui signifie que seules trois personnes pouvaient entrer sans danger dans la pièce. Nous étions quatre donc nous avons déclenché le piège…

…approuvez d’un air entendu, comme si vous étiez satisfait qu’ils aient trouvés la solution au problème que vous leur avez soumis (En réalité vous souriez en imaginant leurs personnages titubants, horriblement mutilés).

Il est vital que vous donniez l’impression qu’il ne s’agissait pas d’un piège mortel arbitraire, mais qu’ils se sont plantés en manquant un indice.

Carrément salaud

Le meilleur exemple de ce type de piège est celui que j’ai lu dans un vieux fanzine des années 80 que j’adorais lire, nommé Balrog Banter (D’ailleurs, si quelqu’un est en contact avec quiconque publiait cette revue, merci de demander de me contacter).

Le piège consistait en une porte verrouillée, avec un profond trou cylindrique dans le mur à côté, au fond duquel se trouvait un bouton. Un personnage crédule, pensant qu’il s’agit là, soit de la sonnette, soit du bouton d’ouverture, mettrait son bras dans l’ouverture (large d’environ dix centimètres et profonde de soixante centimètres) et appuierait sur le bouton. À ce moment, une lame tomberait soudain, tranchant net son bras.

Maintenant, il est vrai qu’un personnage a peu de chances de tomber dans ce piège, mais imaginez à quel point ce serait jubilatoire s’il le faisait. Ce personnage serait estropié de façon définitive (pas de points de vie à soigner sur ce coup-là), et les joueurs sauraient que c’est entièrement à cause de leur propre stupidité.

Évitez seulement de vous réjouir trop ostensiblement.

Note : vous devrez vous servir de cette sorte de piège avec beaucoup de parcimonie, sans quoi les joueurs commenceront à se poser des questions sur votre état d’esprit (et l’équilibre de vos donjons).

Scénarios “du commerce”

Le problème de l’utilisation d’un scénario rempli de pièges mortels (et autres joyeusetés mesquines de ce genre), c’est que les joueurs ne tarderont pas à se lasser de vos donjons “mortels”, et refuseront de jouer.

Vous pouvez repousser cette échéance en utilisant des scénarios du commerce. Vos joueurs seront beaucoup plus à même d’accepter les événements déplaisants d’un scénario, s’il a été écrit par un tiers impartial.

Bon, bien sûr, quand nous parlons “d’utiliser” des scénarios publiés, par “utiliser” nous entendons de temps en temps attraper et ouvrir votre scénario publié, y jeter un coup d’œil un moment, marmonner “mmmm” et confronter vos joueurs à une scène directement issue de votre imagination dérangée et qui n’a absolument rien à voir avec quoi que ce soit qui figure dans les pages du livre.

Astuce : quand vous faites semblant de lire un scénario, soyez certains de le tenir dans le bon sens. Rien ne réduit la crédibilité à néant plus vite que de faire semblant de lire un livre à l’envers.

Descriptions évocatrices

Expliquez à vos joueurs – avant de commencer à jouer – que votre technique de maîtrise implique des descriptions détaillées de ce qui arrive à leur personnage, ce qui leur permettra de se sentir complètement immergés dans la réalité du scénario.

Puis décrivez en détail tout ce qu’ils auraient sans doute préféré passer sous silence.

Par exemple, pour reprendre l’exemple précédent :

“Ok Torven, tu passes le bras par le trou et appuies sur la *sonnette*.” [Ne ricanez pas maintenant] “Fais un jet de sauvegarde contre la douleur… Raté ?”

Vous continuez la description.

“Au moment où Torven presse le bouton, une énorme lame vient frapper son avant-bras. Il pousse un hurlement, comme une fille, et recule en titubant, révélant un moignon ensanglanté là où se trouvait son bras. Sans cesser de crier, il tourne sur lui-même, arrosant chacun d’entre vous de torrents d’un sang épais et poisseux.

Torven, peux-tu faire un test de Dextérité… Raté ?” [NdT : là ça devient carrément et délicieusement sadique !]

Vous reprenez la description. “À présent, le sol carrelé est couvert du sang de Torven, et alors qu’il effectue un nouveau tour sur lui-même, il glisse sur une des flaques. Il s’écroule au sol, écrasant le contenu de son sac à dos, y compris l’œuf de dragon que vous étiez venus chercher. À ce moment, Torven, tu entends des couinements, tu vois sept rats émerger des restes de meubles brisés sur le côté gauche de la pièce. Leurs moustaches frémissent d’excitation lorsqu’ils commencent à lécher le sang répandu.”

Maintenant que nous avons vu ce que vous pouviez faire avec votre scénario, examinons ce vous pouvez faire pour votre vie sociale.

Les femmes

Il ne s’agit pas ici d’expliquer comment humilier les femmes, en partie parce que je n’aime vraiment pas l’idée d’écrire là-dessus mais surtout parce que humilier une femme n’est vraiment pas un truc à faire quand vous essayez de la convaincre de coucher avec vous. Ce qui, en tant que polard pathétique et étrange, est certainement un de vos objectifs à long terme. Vous êtes un polard si vous cherchez dans cet article de véritables conseils, plutôt que pour rire… Mon Dieu, dites-moi que vous ne lisez ceci que pour rire.

Cette partie traite de la façon d’utiliser les femmes pour humilier les joueurs masculins.

Les femmes lisant ceci pourraient ne pas connaître un certain principe, que je vais donc rappeler ici :

“Le degré d’humiliation subi par un mâle du fait d’un échec public de l’affirmation de sa virilité (comme ne pas parvenir à tuer un buffle, à remporter une joute, à accrocher une étagère sur un mur, ou faire démarrer cette satanée bagnole par une froide matinée) est multiplié par un facteur d’environ cinq si des femmes en sont témoins, et par dix si elles éclatent de rire.”

Oui, nous (les hommes) sommes pathétiques à ce point.

Je peux illustrer mon propos (oui je m’écarte du sujet, mais c’est mon fanzine, je fais ce que je veux) avec une anecdote (malheureusement vraie) datant de mes années d’école.

C’était l’été, et nous étions en cours d’E.P.S (Éducation Physique & Sportive). Puisque c’était l’été, le sport que nous pratiquions était l’athlétisme. Étant donné que l’athlétisme est composé de plusieurs disciplines différentes, nous avions le choix de pratiquer celle que nous préférions (il me semble que nous devions choisir entre saut en longueur, course, lancer de poids ou javelot).

Cela peut sembler être un choix simple, mais si vous essayez de concevoir un programme de modélisation d’une population d’une soixantaine de garçons de 13 ans et de leurs choix, vous découvrirez qu’en vérité c’est un problème très complexe, plus encore lorsqu’on en arrive à la dizaine de garçons les plus empotés (et devinez quoi, j’en faisais partie).

Dans ce cas, vous avez à prendre en compte deux facteurs très différents dans votre tentative d’éviter l’humiliation :

a) Votre degré de performance dans chaque sport – que vous connaissez (dans mon cas c’était respectivement mauvais, mauvais, très mauvais et très mauvais).

b) Les sports que les autres garçons vont choisir, ce qui est très difficile à prévoir.

En général, vous vous fichez de faire un sport dans lequel vous êtes particulièrement mauvais, à partir du moment où seuls vos amis vous regardent vous planter. Donc, nous avons mené une réunion remue-méninges avec mes amis tout aussi empotés.

Notre choix : le javelot.

Nous étions tous lamentables en la matière, mais nous supposions que les bourrins choisiraient le lancer de poids, et que les sportifs opteraient soit pour la course, soit pour le saut en longueur.

Et nous avions raison. Tandis que nous nous éloignions vers un coin du terrain, nous avons réalisé que nous étions seuls avec le prof.

C’est alors que tout est allé de travers. Quelqu’un avait eu l’idée géniale (peut-être pour faire au mieux avec un nombre limité de professeurs, mais plus probablement dans une tentative maladroite d’éducation mixte) qu’à partir du moment où une fille avait envie de faire du javelot, il était logique qu’elle se joigne à notre groupe.

Avant que toutes les femmes ne tentent de m’étrangler, je voudrais juste faire remarquer que ce n’était pas sa présence qui me posait problème (bien que ça ne me rendait pas particulièrement joyeux). Ce qui me dérangeait radicalement c’était que les enseignantes d’EPS avaient ramené avec elles près de 30 filles pour regarder.

Vous avez bien compris. Pour regarder.

Elles ne lançaient pas le javelot. Elles ne faisaient rien du tout. Leur cours d’EPS consistait à s’asseoir sur l’herbe et à regarder d’autres personnes lancer un javelot.

Ou plutôt, dans notre cas, complètement rater le lancer de javelot.

C’était horrible.

La fille (Jennette, une fille que je détestais tout particulièrement en raison de son passe-temps favori qui consistait à se foutre de moi chaque fois qu’elle le pouvait) lança en premier.

Elle prit son élan, lança son javelot, et cette saleté de truc s’envola sur près de trente mètres. Évidemment, ça parait pitoyable si on le compare aux Jeux Olympiques, mais en ce jour d’été, sur ce terrain, ça faisait une sacrée distance.

Puis ce fut mon tour.

Je pris mon élan, trébuchai et plantai mon javelot à guère plus d’un mètre.

Le reste de l’après-midi continua dans la même veine. C’était comme une humiliation rituelle pour chacun d’entre nous. Je crois que le meilleur d’entre nous est parvenu à environ cinq mètres.

Je me dis que les enseignantes d’EPS ont peut-être essayé de donner une sorte de cours de confiance en soi aux filles, leur montrant comment une fille compétente peut largement dominer et humilier un groupe de garçons.

(Bon, je suis sans doute à côté de la plaque, mais je me demande toujours pourquoi l’heure de cours d’EPS d’une trentaine de filles a consisté à être assises sur l’herbe sans rien faire).

Peu importe, j’en ai fini avec ma tragédie personnelle.

Là où je voulais en venir est que s’il y a une chose que le mâle moyennement sûr de lui déteste plus que d’être humilié, c’est d’être humilié devant une femme, et plus particulièrement devant une femme qu’il aurait bien aimé séduire (s’il ne s’était pas ridiculisé devant elle).

Maintenant, tous les hommes ne sont pas sensibles à cette technique. Il faut repérer la bonne cible (c’est mieux s’il n’est pas gay par exemple).

Imaginez que Linda crée une prêtresse, et que Ken, qui a des projets pas très nets à son sujet, crée un grand et puissant barbare, qui accompagne la prêtresse partout, se comportant comme son garde du corps (c’est le genre de chose déplorable que je ferais sans doute s’il y avait des femmes dans mon groupe de joueurs).

Dans ce cas, vous pourriez mettre en place une scène où un PNJ pourrait faire des avances outrageuses et importunes à la prêtresse de Linda. Le barbare de Ken s’avancerait alors pour défendre son honneur, et se ferait tailler en pièces de façon fort embarrassante…

Ken ne serait clairement pas des plus joyeux.

Note : Linda n’aura probablement pas une bonne opinion de vous à ce moment. En fait, elle pensera sans doute que vous êtes un c—–d fini. Donc vous devez évaluer votre désir d’humilier Ken, et le comparer avec celui de coucher avec Linda. Il est intéressant de noter qu’on peut considérer là qu’il s’agit d’une sorte de test permettant de savoir à quel point vous êtes un psychopathe (devant un pareil choix, les mecs normaux préfèreraient impressionner Linda plutôt qu’humilier Ken (1).

Éliminer les autres MJ

Pour que vous ayez le contrôle total de votre groupe, le mieux est d’être le seul MJ.

Bien ; il y a plusieurs méthodes pour éliminer définitivement les autres MJ potentiels, mais elles sont susceptibles de vous donner l’opportunité de rester quelques dizaines d’années à la disposition de Sa Très Gracieuse Majesté (une condamnation à la prison à vie). Et vos chances de trouver un bon groupe de rôlistes dans un quartier de haute sécurité sont sans doute très limitées.

Donc posez ce pistolet…

Et ce revolver…

Et la corde à piano…

Et ce… bon sang, c’est vraiment une croix de bois de deux mètres ? Mais quelle sorte de malade êtes-vous ? Posez ça…

Je voulais juste dire que vous devriez tenter de dissuader les autres membres de votre groupe de maîtriser. Il ne doit en rester qu’un…

En conclusion

Je ne crois pas qu’il y ait une façon saine de conclure cet article, alors je ne le ferai pas.

Si vous essayez d’appliquer n’importe laquelle de ces techniques, ne me tenez pas au courant de la façon dont ça s’est passé. Je ne veux pas le savoir.

(*) NdA : Au moins pendant quelque temps. Au bout d’un moment, ils comprendront que vous êtes un malade ; mais rien n’est éternel, et vous pourrez toujours trouver d’autres groupes. [Retour]

Article original : The Bastard GM's Handbook

(1) NdlR : D’un autre côté, si Linda vous a clairement fait comprendre que vous ne l’intéressiez pas, défoulez-vous sur son perso. Croyez-vous que ce PNJ horripilant qui vient de massacrer Ken va s’arrêter là ? [Retour]

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Pour aller plus loin… panneau-4C

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