Les Campagnes avec intrigues politiques - 2

Dans la 1e partie, j’ai expliqué ce qu’est la politique et comment développer une campagne de JdR avec des motivations, des intrigues et des stratégies autour de ce thème, en faisant varier les positions, titres et fonctions des PJ. Dans cette seconde partie, on verra comment gérer toute cette information une fois qu’on a établi le cadre et l’intrigue de notre campagne.

Une campagne de ce genre a beaucoup de nuances et de possibilités, donc le groupe ne sera jamais sûr de ce qu’il doit faire : cela va créer des doutes sur ce que les PJ savent, sur leurs allié.es et même sur eux-mêmes. Le Maître de Jeu devra à son tour improviser des personnages, des lieux et des trames au fur et à mesure que la campagne avance. On verra quels outils sont pertinents et comment on peut les utiliser.

Préservez la flexibilité

Le plus important dans une campagne politique, ce n’est pas l’histoire que le ou la MJ a créée, mais plutôt les solutions que les personnages trouvent (ou pas) aux différents conflits, et comment iels atteignent leurs buts et objectifs.

Par conséquent, un scénario où les événements sont décrits via des chapitres, avec des scènes préétablies, peut compliquer la narration pendant ce genre de campagnes - qui ont besoin de flexibilité pour se dérouler correctement.

Si l’on mène des scénarios linéaires, on peut obtenir cette flexibilité en jouant des aventures courtes reliées entre elles - plutôt qu’une longue campagne avec une seule intrigue centrale. Cette façon d’écrire des scénarios permet de préparer les réactions et conséquences de ce qui a été joué précédemment, développant ainsi une nouvelle intrigue qui prolonge l'histoire.

Toutefois, la manière idéale de mener une campagne politique est de faire jouer un bac à sable, qui offre la flexibilité et la liberté d'improvisation nécessaires.

NdT : « le bac à sable » est une campagne non-linéaire, où les péripéties sont liées à des emplacements, que les PJ explorent à leur guise. « Oui mais si on ne change pas d’endroit, par exemple on reste à la Cour - et que les PJ vont d’un chef de faction à l’autre ? ». Réponse : dans ce cas on parle d’un scénario en nœuds ptgptb, un « nœud » = une personne ou une faction, une scène ou une situation.

Ceci ne veut pas dire que les séances et la campagne ne doivent pas être préparées en amont. La meilleure manière d'improviser est d’avoir tout conçu tout en étant suffisamment agile pour savoir quand apporter des changements - au lieu de suivre rigoureusement ce qu'on avait préétabli (1).

peinture d'une séance du Sénat Romain

Cicéron dénonce Catalina, par Cesare Maccari (1889)

Définissez le gouvernement

Lorsque vous préparez une campagne politique, définissez les points forts et points faibles du gouvernement auquel les personnages vont être mêlés.

Pour cela, on peut à nouveau étudier les différents types de gouvernement qui existent ou ont existé dans le monde, sans pour autant reproduire toute leur complexité : la démocratie, le féodalisme, le communisme, les assemblées [le parlementarisme ? (NdT)], la dictature, la république, etc., ont chacun leurs avantages et leurs inconvénients.

  • La démocratie accorde plus de liberté de décision au Peuple en échange d'un niveau plus élevé de satisfaction sociale ;
  • Le féodalisme établit des castes sociales rigides où chacun et chacune connaît sa place, en échange d'un « contrat » (dont les conditions ne sont pas nécessairement justes) entre le vassal et son seigneur, où le premier sert et le deuxième protège ;
  • Une dictature a un chef fort qui dirige la nation selon son plan et celui de ses conseillers, mais qui doit contrôler la population d'une main de fer pour qu'elle ne se soulève pas pour obtenir des libertés sociales ; etc.

Tous les gouvernements existants ont des factions, même si elles appartiennent toutes au même parti, à la même maison noble ou au même conseil des ministres qui exerce le pouvoir. Prenons un exemple au monde réel : souvenons-nous de la division du  Parti Socialiste Ouvrier Espagnol wiki  entre les partisans d'Alfonso Guerra et ceux de Felipe González; ou des confrontations entre Pablo Echenique et Pablo Iglesias au sein du parti Podemos wiki.

Il faut bien comprendre que les objectifs personnels peuvent différer de ceux du groupe ou de la faction, même au sein de la même équipe gouvernementale à laquelle les PJ appartiennent. Il est même possible que p.ex. la cheffe d’État ait un objectif différent de celui de ses propres partisans et qu'elle ne partage pas avec d'autres membres du gouvernement. Et, comme partout, les niveaux hiérarchiques existent sous une forme ou l’autre. Les subordonné.es des principaux membres du gouvernement pourraient bien privilégier leurs propres buts avant ceux de leur faction ou du gouvernement.

Un gouvernement démocratique dirigé par un chef fort pourrait avoir pour objectif l'amélioration de l'économie de la nation ; la cheffe du parti pourrait essayer d'encourager la création d'un système de santé gratuit ; pendant que les personnes qui la secondent auraient comme unique objectif de s'enrichir.

Par ailleurs, celles et ceux qui exercent des fonctions mineures lors de la poursuite de l'objectif du gouvernement pourraient utiliser leurs succès pour progresser dans le parti et dans l’État.

Il est même possible que les objectifs personnels soient contraires à celui du gouvernement ou à ceux des autres PJ, créant ainsi des conflits internes et des situations qui enrichissent la campagne. Les joueurs et les joueuses doivent utiliser leur habilité et ingéniosité pour que leurs persos atteignent leurs objectifs.

peinture avec intriguants en toge dans un cabinet secret

La Délation secrète en République de Venise, par Ricardo María Navarrete y Fos (1887)

Le Pouvoir derrière le trône

Même s'il existe un gouvernement ou un représentant connu et accepté légalement et socialement, ça ne veut pas dire que c’est lui qui exerce vraiment le pouvoir. Il est possible (pas du tout théoriquement) que le gouvernement soit dirigé ou limité dans ses fonctions et ses choix par d'autres factions, tacitement ou publiquement :

  • Un royaume peut être officiellement dirigé par une monarque, mais elle peut être obligée de faire des concessions, faire passer des lois et prendre des décisions qui aident les marchands et commerçants - parce que ce sont eux qui financent ses armées.
  • Le ou la bourgmestre et le conseil sont formellement à la tête de la ville, mais sont en fait manipulé.es comme des marionnettes par une confrérie de voleurs qui gèrent certaines affaires.
  • Une méga-corporation pourrait être administrée par un comité exécutif avec un président à sa tête, mais uniquement parce que l'armée le soutient.

Les formes du pouvoir caché sont multiples, tout comme les groupes ou personnages qui l’exercent : le peuple, un roi, des guildes de voleurs, des syndicats, des commerçants ou des entreprises, l'Église, des mages, des créatures, etc.

Partagez (un peu) la narration

L'ombre du méta-jeu surplombe chaque partie de JdR, que ce soit délibéré ou pas. Je parle ici de la possibilité d'utiliser et d'abuser des connaissances dont dispose la joueuse et que son personnage ignore. D'un autre côté, il est tout aussi problématique que la joueuse ne possède pas les connaissances de son perso sur le fonctionnement du gouvernement dans la campagne politique qu’elle va jouer - puisque c'est un des points centraux de la campagne. Il faut donc l'expliquer ou le créer en consensus entre joueuses et MJ.

Ces informations ne se limitent pas au système de gouvernement auquel les PJ vont être mêlé.es. Sont également inclus :

  • les PNJ que connaissent les PJ,
  • la situation et l'histoire de la nation (ou pays, royaumes, corporation, etc.),
  • les rumeurs les plus répandues,
  • des informations privilégiées, etc.

Comme dit précédemment, la manière de mener la partie devrait s’inspirer des bacs à sable sans pour autant en être un à proprement parler, car il est difficile de s’appuyer sur un scénario dirigiste. Pour y arriver, le ou la MJ peut demander aux joueurs et joueuses leurs intentions ou projets pour la prochaine séance. Cela lui laisse le temps de préparer entre chaque session de jeu, au lieu d'écrire toute la campagne d'un coup.

Le.la MJ et les joueurs.euses doivent y travailler ensemble et que le groupe soit proactif, simplifiant la création des [aventures lors des] séances suivantes. Ces décisions et contributions peuvent donner lieu à des scènes improvisées, des aventures secondaires non prévues à l'origine et des propositions qui vont plus loin que le concept originel de la campagne.

paravant asiatique ; paysage doré à l'or

Vues à l’intérieur et à l’extérieur de la Capitale (Kyōto), par Kanō Eitoku (1561-1562)

Pour transmettre la sensation de jouer dans un monde vivant, dont les personnages n’ont pas le contrôle total, pensez à inclure des éléments extérieurs supplémentaires, non-liés à l'intrigue principale ni aux objectifs des PJ. Pensez aussi à tous les détails apparus au cours des sessions précédentes.

Tous ces détails « bonus » de la campagne doivent apparaître dans les parties avant que les PJ atteignent leurs objectifs ou surmontent les défis présentés. Si tous les obstacles sont surmontés, la campagne risque de perdre de l'intérêt et de la tension. Tout comme pour une campagne typique de JdR d’aventures, les campagnes d'intrigues ne doivent jamais perdre leur rythme, et les joueuses ne doivent jamais croire que tout est sous contrôle.

Tant que des problèmes, des défis et de nouveaux objectifs apparaissent, les joueurs et joueuses auront la sensation qu'il reste encore quelque chose à faire, que tout peut partir en cacahouète et ne tient qu'à un fil - et que leurs choix seront déterminants.

Les personnages devront affronter des complots et des trahisons au lieu de monstres. Souvenez-vous de l'arrivée d'Eddard Stark à Port-Réal dans la saga du Trône de Fer. Pendant tout son séjour, Eddard n’assiste qu’à un seul affrontement armé. En revanche, la tension est palpable dans chaque scène, lors de chacune de ses actions :

  • ses recherches sur la mort de Jon Arryn ;
  • la présence d'espions qui informent divers ennemis ;
  • les sourires d'amis qui ne le sont pas vraiment ;
  • les tentatives de lui imposer des actions ou de l'intimider ;
  • les nouvelles de la capture de Tyrion Lannister ;
  • les décisions irrationnelles du roi ;
  • et, à la fin, un mauvais choix guidé par ses principes…

… lui font perdre la tête.

Des cas semblables pourraient arriver dans notre campagne politique et, en lieu et place de l'embuscade classique, on présentera des défis comme :

  • obtenir des informations ;
  • empêcher d'autres factions d’atteindre leurs buts ;
  • ou encore convaincre un certain PNJ de devenir un allié ou de briser son alliance avec un personnage d'une autre faction.

Souvent, on ne saura pas immédiatement si l’opération a été un succès ou un échec, et les conséquences pourraient mener à la défaite totale des PJ, voire à leur mort.

Alternez les scénarios

On discute souvent beaucoup pendant les campagnes politiques, et l'une des difficultés pour le MJ est de faire en sorte que les différents défis offrent la même tension et le même attrait pour les joueurs qu'une bataille ou l'exploration d'un donjon. C'est une bonne chose d'alterner les séances :

  • d'interaction avec les PNJ ;
  • d'utilisation de ressources (sous forme d'alliés et de faveurs) ;
  • d'exploration (pour rechercher des informations) ;
  • de combats (interaction et intrigue décisive) ;
  • et de moments plus calmes (2).

     Car malgré tout, rares sont les joueur, joueuses ou MJ qui n’aiment pas les scènes d'action.

Si le groupe n'est pas convaincu par cette forme de jeu ou s'il y a un joueur ou une joueuse qui préfère des aventures plus typiques, on peut alterner des scènes d'action avec celles d'intrigue. Ces scènes devraient survenir même si le groupe aime [le ton central de] la campagne, parce que ça égaiera les séances et ça montrera que, en politique, l’échec peut tout aussi bien être mortel.

village vers 1880 ; arrestation et fouille par des militaires

L'Espion, par Alphonse de Neuville (1880)

Les intrigues à la Cour et en politique ont des conséquences bien réelles, nuisibles à la santé :

  • tentatives d'assassinat;
  • embuscades dans les rues ou les couloirs du palais,
  • déclarations de guerre entre nobles,
  • empoisonnements,
  • tueurs à gages, etc.

La MJ peut utiliser ces menaces comme ressources, avec logique et modération ; elles donneront une saveur adéquate à la campagne, et feront augmenter la tension.

Ces menaces-là doivent avoir un lien avec l'intrigue ou les objectifs des personnages, sinon elles pourraient être peu crédibles et donner l’impression d'être rajoutées « à l'arrache ».

Les Personnages Non-Joueurs

La quantité de PNJ que les PJ peuvent rencontrer pendant une campagne politique démontre l’utilité particulière de dresser des listes de noms de personnages et contacts connus. Beaucoup de personnages ne seront connus qu’à travers leur nom et une description, ou par leur lien avec quelqu'un d'autre (3). Même si ces listes sont courantes dans des campagnes plus classiques, les campagnes politiques verront ce type d'informations apparaître à la même fréquence que les valeurs de combat, les armes et les sorts des scènes d'action pour les campagnes classiques.

Au fur et à mesure d'une succession d'aventures, ou bien après plusieurs séances de la campagne, les PJ vont normalement gagner en puissance. Ce pouvoir est représenté par l'amélioration des compétences, la montée de niveaux, l'acquisition d'objets magiques, etc. Dans une campagne politique, un des moyens de gagner en puissance est l'obtention d'une meilleure position ou d'alliés. Alors que la puissance est habituellement liée à l'expérience (les XP), dans une campagne politique, un personnage « de faible niveau » peut être un.e opposant.e aussi formidable qu'un autre de haut niveau, grâce à sa position sociale, ses allié.es et son influence.

C'est pour cela que, dans une campagne politique, les alliés sont un des enjeux les plus importants. Iels peuvent aider dans les moments critiques, donner des informations ou aider contre les rivaux politiques. Perdre un allié peut vouloir dire gagner un ou une ennemie. Il faut donc les traiter avec précaution et ne pas abuser d’eux.

La position sociale des alliés est très variable. Le pouvoir politique est normalement lié aux rois, nobles, maires, gouverneurs, ambassadeurs, ... mais il ne faut pas oublier celles et ceux qui utilisent leur force de travail pour gagner leur pain quotidien. Iels sont souvent réunis en guildes, syndicats, ont des chefs, etc. Avec le temps et selon leur importance, ces groupes ont beaucoup de pouvoir et il n'est pas bon de les avoir parmi ses opposants.

Bien que leur influence à la Cour n'est pas suffisante pour déstabiliser un puissant noble, ces groupes peuvent contribuer à inciter les travailleurs à se révolter, à faire grève ou à vendre leurs marchandises à d’autres. Il ne faut pas sous-estimer la classe moyenne ou la paysannerie, car elles pourront refuser leur aide sur certains champs de bataille.

Réunion dans une salle d'école ; un ouvrier intimidé se lève pour s'exprimer et des intellectuels l'écoutent attentivement

La Liberté de parole, par Norman Rockwell (1943)

D'un autre côté, les nobles puissants ou les membres du haut clergé (comme les abbés, les évêques et les archevêques) ont du pouvoir, de l'argent et de l'influence. Il s'agit de personnages capables de lever des armées et les envoyer au combat, d'influencer les décisions des rois ou de prendre des décisions légales et politiques qui affecteront la population d'un royaume entier (4).

Les petits nobles, comme les chevaliers, les hidalgos wiki [nobles sans titres, caractéristiques de l'Histoire Espagnole (NdT)] et le bas-clergé, ont une influence moindre à la Cour, mais sont néanmoins de bons alliés ou de redoutables ennemis. Souvent, cette classe de PNJ se situe au même rang social que les PJ et pourrait par conséquent donner du fil à retordre aux aventurières si elles ne font pas attention.

Pour toutes ces raisons, les PJ devraient engranger des alliés.es dans toutes les classes sociales :

  • Des informateurs parmi les serviteurs et les servantes ;
  • Des ami.es parmi les chef.fes de la plèbe ou de la classe moyenne ;
  • Des alliés parmi les nobles et les confidents des rois et reines ou président.es.

Plus l'objectif visé sera élevé, plus les ennemis seront puissants, raison pour laquelle la loyauté des alliés est importante. Celle des personnes aux charges importantes est pratiquement impossible à obtenir, mais les gens du bas peuple éprouvent plus fréquemment de la ferveur, de la loyauté ou de la reconnaissance envers ceux qu'ils servent. Un serviteur, un fidèle ou un contact mineur mû par la gratitude est parfois vraiment précieux et les joueuses ne devraient pas le sous-estimer.

Avec une telle quantité de PNJ, le travail pour tous les créer peut être vertigineux…Procédez méthodiquement. On ne peut pas créer une fiche pour chaque personnage mineur qui apparaît au cours de l’aventure. On peut faire celle des PNJ les plus importants, ceux qui interviennent directement dans l'intrigue, comme s'il s'agissait de PJ supplémentaires. Ceux qui ont une certaine importance mais peu de pertinence peuvent être décrits dans les grandes lignes, au niveau du physique, de leur personnalité, de leurs compétences ou caractéristiques notables, ainsi que leurs objectifs et motivations.

Ceux qui ne sont là que pour meubler peuvent être mentionnés uniquement à travers une description physique, leur nom et leur métier. Dans certains cas, il faudra peut-être ajouter une motivation - mais ce ne sera généralement pas nécessaire pour ce type de PNJ.

Les motivations, les buts et la personnalité sont particulièrement importants pour les descriptions des PNJ, car ils aideront les MJ à interpréter leurs réactions lorsque les PNJ parleront aux PJ.

Pour ce genre de campagne, la création d'une grande quantité de PNJ et d’événements mineurs quotidiens donnera aux joueurs la sensation que le monde est vivant et que leurs PJ n’en sont qu’une petite part.

beaucoup d'invités avec des cols à fraises font place au couple de mariés

Le Bal des noces du duc de Joyeuse, anonyme (1581-1582)

La religion est aussi à prendre en compte. Peut-être qu'actuellement certains voient ça comme un archaïsme dépassé, mais il suffit de lire les journaux pour se rendre compte que les croyances ont autant d'influence sur la politique que l'économie. Si notre campagne prend place dans un univers semblable à notre Antiquité ou Moyen-âge, la religion y sera très importante ; si la magie y existe et que les divinités vivent parmi les humains, cette influence deviendra beaucoup plus notable. Beaucoup de tribus ou de royaumes de l'Antiquité prenaient des décisions selon ce que leur dictaient les prêtres ou les devineresses, ces représentantes des entités supérieures canalisant leurs pouvoirs à travers la chair de leurs serviteurs dévots.

Éléments de fantasy

Si l’on prend en compte les différentes races et pouvoirs magiques des mondes de Fantasy, les campagnes de nature politique deviennent encore plus complexes.

La présence de certains êtres dans une communauté ne doit pas forcément être perçue comme une menace guerrière. Un vampire ne souhaite pas révéler sa véritable identité ; un dragon ne veut pas que de braves aventuriers et aventurières prennent le chemin de sa tanière pour le tuer ; un tyrannœil wiki pourrait contrôler de nombreux adeptes pour obtenir plus de pouvoir, etc. L'habitude de voir ces créatures comme de simples sacs à XP avec des caracs de combat nous fait parfois oublier leur potentiel lorsqu’elles se mêlent à la politique.

  • Un dragon, de par son potentiel de combat, pourrait gouverner un petit royaume et défendre ses habitant.es tant qu'iels le servent - ou au contraire se dissimuler en pleine ville en se faisant passer pour un simple mortel, évitant ainsi d’être une cible. Vous douteriez-vous qu'une très riche et ambitieuse marchande soit, en réalité, une énorme dragonne qui serait entrée dans le rivalités commerciales des mortels afin d’augmenter encore son trésor ?
  • Un vampire pourrait diriger une guilde de voleurs et manipuler plusieurs fonctionnaires et membres de la Garde pour que les opérations de sa guilde ne soient pas gênées.
  • Les doppelgänger wiki sont d'excellents espions. Si un seul d'entre eux s'infiltrait à la Cour ou au gouvernement et faisaient fuiter des informations, les dommages pourraient être énormes.

Mais il ne faut pas seulement prendre en compte le pouvoir et les intrigues : les possibilités d'interaction avec des êtres surnaturels et fantastiques sont très diverses. Un royaume allié avec celui des fées pourrait disposer de champs de blé résistant, et d'abondantes récoltes.

Si au contraire ils étaient en conflit, le royaume serait maudit et les famines augmenteraient le mécontentement social.

Les mages, avec tous leurs talents, pourraient être organisés en Ordres, avec un pouvoir équivalent à celui de l'Église, ou même supérieur.

Les possibilités sont infinies, l'imagination est notre seule limite.

L'interaction des diverses races et cultures des PJ a une importance évidente ; par exemple les désaccords entre Elfes et Nains, la bellicosité des Orcs ou la « folie » des gnomes (5). Le choc des cultures ne doit pas se percevoir uniquement dans le roleplay des personnages, mais aussi dans les relations des différentes communautés lorsqu'il faut négocier.

Passage du grand équipage royal (un peu ridicule)

Le Roi des nains et sa suite, par Fritz Rehm (1915)

Conclusions

Cet article essaie de fournir une vision et des options de jeu pour les MJ qui veulent mener une campagne axée sur la politique et ne savent pas par où commencer.

Nombreuses sont les sources où le ou la MJ peut puiser des informations, à commencer par l'Histoire-même de notre monde et de ses nombreuses nations : les guerres, l’essor et la chute des empires, les périodes de paix, etc. Mais toutes les informations pertinentes ne proviennent pas uniquement du monde réel : on peut aussi trouver des idées intéressantes dans les livres comme Le Trône de Fer, Battletech wiki, Dune, Dôme wiki et plein d'autres.

Une campagne politique est un vrai défi pour les MJ, les joueurs et les joueuses ; mais si elle est bien menée, elle peut procurer une joie si intense que le travail de création, d'organisation et de maîtrise qui y a été investi en vaudra la peine.

Comme l’a dit un jour le célèbre politicien John Buchan wiki :

"La politique est toujours la plus grande et la plus honorable des aventures."

[PX Magazine] Desarrollando campañas políticas en los juegos de rol II, por Funs Athal


(1) NdT : Nos articles sur l’improvisation ptgptb ne vont pas nécessairement dans ce sens exact, mais sont aussi intéressants à lire. [Retour]

(2) NdT : en pratique, ce sont souvent des phases « d’intendance »; les PJ font des achats, refont le plein de leur équipement, font le point sur les finances etc. Sinon, ce court article ptgptb nous fait réfléchir à l’importance de ces instants où “il ne se passe rien”. [Retour]

(3) NdT : Bien mieux que des listes, nous vous conseillons de récupérer les répertoires téléphoniques des agendas des années passées (inutilisés ou en solde). L’avantage est que vous pouvez classer les PNJ par ordre alphabétique ou leur nom de famille ! Si vous êtes djeunz qui ne travaillez qu’avec des ordis, procurez-vous une app avec un annuaire…
Encouragez aussi au moins un.e des joueurs ou joueuses à remplir un répertoire de « contacts » au fur et à mesure des rencontres. Qu’ils y ajoutent des colonnes pour leurs impressions (souvent erronées) et leurs sentiments à l’égard des PJ (« celui-là je le déteste »). Nous l’avons fait, et c’est très amusant ! [Retour]

(4) NdT : exemples pour les contextes de cape et d’épée : Richelieu, Mazarin et le Père Joseph surnommé « l’Éminence grise wiki ». [Retour]

(5) NdT : Un autre article ptgptb pour apporter quelques nuances à la vision qu’on peut avoir sur les Orcs. Quant à la “folie” des gnomes, il s’agit d’une référence à la réputation de ceux de Dragonlance grog. [Retour]

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Commentaires

Un régime politique est fondée sur trois types de politiques:

- Les politiques utiles à celles et ceux qui gouvernent.

- Celles utiles à ceux qui leur procurent les moyens de gouverner.

- Les politiques qui dissuadent les soulèvements, les dissidences et la désobéissance - en particulier la résistance politique de ceux qui peuvent renverser les dirigeant.es.

Dans le cadre d'une campagne à intrigue politique, les PJ appartiendront idéalement à une organisation qui tente d'obtenir les prérogatives et actions politiques utiles à son objectif. Ils formeraient un groupe de membres chargés de certaines actions, parfois en concurrence avec d'autres groupes internes.

Une telle organisation n'est pas forcément spécialisée dans l'action politique et les scénarios liés à l'intrigue politique peuvent très bien être intercalés dans des scénarios d'autres types.

L'intrigue politique peut également être échelonnée. Il y aurait

  1. une intrigue politique interne à l'organisation,
  2. l'intrigue de l'union d'organisations à laquelle elle est affiliée
  3. et l'intrigue liée au gouvernement central.

On pensera à la série "Les Piliers de la Terre" qui met en scène un prieuré

  • dont le chef est élu par les moines (échelon 1)
  • impliqué dans une querelle de prélats pour l'obtention de l'évêché local (échelon 2)
  • et les intrigues liés à la conquête du trône d'Angleterre (échelon 3).

Quelques exemples d'organisations: une petite mégacorporation, une agence de renseignement publique ou privée, une maison noble mineure, un ordre de templiers, une organisation humanitaire, un ordre de mage, une université, un syndicat de fonctionnaires, etc.

Les organisations ne sont pas forcément formelles : un personne influente peut créer différentes organisations de différentes nature et y recruter des équipes interdisciplinaires.

Pour conclure, quelques options politiques non envisagées pour le régime politique:

- Gouvernement par un Sénat dont les sièges sont attribués par le biais de combat à mort dans des arènes électorales. Chaque sénateur est le vainqueur de la compétition électorale de l'arène liée à son siège où à la personne qu'il représente.

- Stochocratie aristocratique: Le pays est gouverné par mandataires tirés au sort parmi les nobles volontaires comme c'était le cas dans certaines cités italiennes au 16e siècle.

- Stochocratie populaire:  gouvernemnt par comités locaux spécialisés tirés au sort parmi les citoyens de chaque localité pour des mandats courts.

- Ploutocratie: les mandats des assemblées délibérantes sont vendus périodiquement aux enchères et chaque mandataire a un nombre de voix proportionnel à la somme déboursée pour acheter sa charge.

- Principat militaire : le chef d'État et d'état-major général, nomme les chefs d'état-major de branche qui nomment chacun les chefs d'unités stratégiques qui élisent le chef d'Etat et d'état-major général.

Auteur : 
Lame

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