Dak/Niko : les 10 commandements du Défi

Peux-tu te présenter en quelques lignes ?

Hello, je m’appelle Nico. Je suis lyonnais, j’ai (très bientôt) 40 ans, je fais du Jeu de Rôles depuis l’âge de 13-14 ans, quand je me suis plongé dans Vampire la Mascarade et Warhammer Fantasy. 

Je suis aussi un GNiste depuis une vingtaine d’années. Je suis le président d’une petite asso de GN appelée Gnafron qui est probablement l’asso la plus gauchiste du milieu du GN ;) et où on fait de la remédiation culturelle et de l’éducation populaire. Et j’aime écrire.

Dans la vraie vie, je suis dans une coopérative dans l’informatique et je gagne ma vie en transformant du café en lignes de code PHP / React … Je suis ce qu’on appelle un “Tech Lead”.

Et sinon je participe au 3FF pour la 4^e fois, j’ai eu l’honneur que deux de mes jeux précédents de 3FF (ClairObscur et Larmes) aient reçu un accueil très chaleureux qui me pousse à continuer encore et encore.

Nico se cache derrière l'édition de luxe de Shadowrun, un des cadeaux de notre sponsor Black Book Editions
aux 3 auteurs de L'Éléphant qui se voulait fourmi, jeu vainqueur du 6^e Défi 3 Fois Forgé.

Clair-Obscur (6^e au Défi 3FF6)

Un jeu de rôles à narration partagée, sans meneur ni fiche de personnage.

Dans un monde en plein effondrement, les joueuses incarnent, au gré de scènes, un groupe de Porte-Nuits, en lutte pour leur survie et leur âme, jouets de forces qui les dépassent.

(Extrait des évaluations : On est des résistants en lutte contre la prise du pouvoir par un culte fasciste.)

Larmes (6^e au 3FF8)

Au pays de Samaah, la désolation est un quotidien. Dans ce jeu de rôle sans MJ, vous incarnez des civils pris dans les horreurs de la guerre, entre des nationalistes brutaux et des rebelles abominables.

Saurez-vous trouver de quoi survivre ?

(Extrait des évaluations : Thème brûlant s’il en est : la guerre, et surtout la guerre contemporaine, racontée du point de vue des civils.)

Première étape : un jeu de rôle de 6666 signes max

Quels étaient tes objectifs lors de l’écriture de Vivre Vite que tu as offert pour qu’il soit déformé (etc.) ?

En tant qu’anar j’adore casser les codes, les idées reçues, et faire de l’éducation populaire. J'ai pas vraiment d’objectif formel en tête mais j’essaye chaque année de proposer une idée originale issue de mes réflexions de l’année en cours… 

Soit en tranchant sur la forme (utiliser des cartes type Magic pour remplacer la fiche de personnage) soit sur le fond (ici, parler des illégalistes ^wiki, des anarchistes pour qui j’ai beaucoup d’affection…

Là c’était juste ça “tiens j’ai lu des trucs sur les illégalistes, ils ont l’air cool, j’aimerais bien en parler” et roulez jeunesse.

Les Illégalistes étaient-ils tous mus par des idéaux élevés, ou bien c’était une « couverture » pour un enrichissement personnel, en espérant obtenir le soutien des milieux anarchistes ?

Vaste débat, même encore au sein des mouvements anarchistes d’aujourd’hui… C’est des trajectoires personnelles les illégalistes, certains étaient très probablement mus par des idéaux, d’autres par des projets d’enrichissement.

Cela étant les historiens observent que la plupart ont donné l’essentiel de leurs gains à des caisses de solidarité ouvrières, à des proches et voisins dans le besoin, à des causes de gauche, des journaux anarchistes… C’est le cas pour la Bande à Bonnot ^wiki, qui a pas mal donné autour d’elle.

Donc dans leur grosse majorité, il y avait une vraie idée de redistribuer les richesses, notamment en faveur des défavorisés.

Il faut aussi comprendre qu’à la même époque, on a plusieurs catastrophes minières comme à Courrières, où l’on laisse crever des mineurs pour préserver le charbon. Et Clémenceau qui fait tirer à balles réelles sur les grévistes. Il y a l’idée d’une société inhumaine, où il faut arracher ses droits face à la brutalité. La violence de ces anonymes est une réponse vengeresse. Et c’est pour ça qu’ils étaient populaires à leur époque et c’est pour cela que je les trouve encore très actuels.

Même pour ceux comme Marius Jacob ^wiki, qui vivaient de leurs crimes, il y avait au cœur une vraie réflexion politique et économique (« Le droit de vivre ne se mendie pas, il se prend ») derrière. On n’a pas d’exemple de personne devenue riche par ce biais.

Ça se voit que j’aime l’éducation populaire ? :)

Ton opinion sur ce qu’il est devenu ?

Proposer des jeux politiques est toujours un exercice aléatoire au 3FF : il suffit que ça effraie ou blase l’un des deux autres auteurs et le thème politique du jeu disparaît. Et c’est pareil avec un jeu historique : ça peut effrayer, et il y a toujours le risque que le contexte historique compliqué disparaisse. C’est ce qui est arrivé avec Canuts qui a perdu son thème lyonnais en seconde forge, puis l’a retrouvé en troisième, si ma mémoire est bonne.

Canuts ! (10^e au Défi 3FF7) par Tolkraft

Ce jeu historique vous invite à incarner des canuts et canuses – les tisserands de soie lyonnais – lors du premier soulèvement ouvrier de 1831, qui marqua l’Histoire de Lyon, et qui alluma l’étincelle des révolutions sociales qui transformeront le 19^e siècle.

(Extrait des évaluations) : « ce n’est pas tous les jours que l’on nous propose d’incarner des ouvriers et artisans s’opposant aux riches négociants lyonnais. L’auteur y va à fond avec une recherche approfondie et une reconstitution soigneuse des événements majeurs de l’époque : on s’y croirait ! »

Et qu’on soit bien d’accord : je ne leur aurais pas jeté la pierre, cela demande des tas de recherches, de parler correctement d’une époque. C’est lourd et des fois il est plus simple de changer le cadre. 

Et pis bon… des fois, le cadre d’origine historique est pas si intéressant que ça et il y a mieux à faire.

Bref, je m’attendais à ce que l’aspect politique ou historique saute. C’était pour moi une loi non-écrite du 3FF. Mais… en fait non. À ma grande surprise [mes continuateurs de Forge 2 et 3] Yaakab et Germi ont compris l’idée de base, y ont adhéré, l’ont soutenue, et l’ont même portée encore plus loin que je ne l’aurai rêvé.

C’est une chance rare, j’en ai conscience, et je suis incroyablement verni d’être tombé sur eux, leurs connaissances, leur capacité à embrasser le sujet.

Quel accueil la dernière version a-t-elle reçue ?

Pour ce que j’ai pu en lire, les retours étaient très positifs, et en même temps ils pointent plein de tous petits détails qui peuvent encore permettre de pousser le jeu plus loin. C’est une dynamique que j’adore. Et il finit dans les finalistes de manière très justifiée, Yaakab et Germi ayant fourni un super boulot.

Vas-tu produire une nouvelle version de ta première « Forge » ?

Ma première forge me plait toujours, mais j’avoue que ce qu’ont apporté les autres auteurs est utile, et intéressant. Nécessaire même. Je n’aurais clairement pas fait mieux.

Je pense que je préfèrerai les aider à polir leur version s‘ils souhaitent l’avancer (et s’ils souhaitent mon aide).

Ah oui, mais s’ils souhaitent s’arrêter là ?

Bonne question… Ce serait dommage, mais c’est la vie. Je ne me force pas à reprendre des jeux, c’est pas pour mettre le couteau sous la gorge aux autres pour qu’ils le fassent ;)

NdlR : L'Illégaliste de Germi est arrivé en finale.

Paris, Belle Époque. Sous les lumières de la ville, une génération révoltée se lève, prête à défier une société figée et une autorité inflexible. Découvrez la France d’avant-guerre, où le frisson des idées anarchistes croise la force brutale de l’ordre établi.

Deuxième étape : reprendre un JdR et en créer un de 11000 à 14500 signes

Comment as-tu perçu RÉPARS || MEURS, que tu as reçu pour l’étape 2 ?

Un de mes tours éculés de 3FF c’est de prendre un jeu un peu trop léger et de le tordre pour rajouter un contexte critique. Du type “alors qu’en fait le méchant c’était le capitalisme”.

Et là, la critique était déjà là. Zut je me suis fait avoir à mon propre jeu.

Plus sérieusement j’ai beaucoup aimé le jeu que proposait Erwik : on doit faire la maintenance d’un vaisseau. Il y avait ce côté un peu entreprise absurde (à la Kafka/Portal) qui me plaisait bien. Et un côté « PJ remplaçable » à la Paranoïa, des concepts un peu claqués du cul comme on en trouve en management (le CLIC)… Bref… Y avait un super terreau fertile, je n’ai plus eu qu’à me poser dessus et rajouter. C’est pour ça que la filiation entre la première et la seconde forge est évidente.

Qu’as-tu changé et pourquoi ?

Je me suis creusé la tête. Il m’arrive de reprendre un jeu, ne garder qu’un vague lien avec le thème, et de tout refaire. Ce fut ma stratégie pour Clair-Obscur ou Face au Géant. Ou dans une moindre mesure, Larmes.

Mais là, l’idée de base me plaisait pas mal, donc j’ai fait une liste, belle et bien consciente, de ce que je voulais garder et jeter. En plusieurs participations, c’est la première fois que je me pose vraiment pour ça.

Au final j’ai voulu accentuer l’aspect “Elon-Musk-esque” de la chose, pousser les concepts existants à 11/10, j’ai également essayé de m’inspirer de Paranoïa pour insister sur le côté absurde de la chose. Et un petit délire perso sur les copyrights et les trademarks, un coté « manuel » que je trouvais sympa sur la forme…

Bref, pour une fois, pas de révolution mais une suite logique poussée à fond. Et un début de maquette, pour marquer le coup, mais une maquette un peu en mode “automatique/facile” →.

Ton opinion sur ce qu’il est devenu en 3^e étape – Sous un Ciel d’Emeraudes –, et l’accueil que ce jeu a reçu ?

Je connais bien Kergan et j’étais du coup curieux de voir ce que le jeu allait devenir sous sa plume.

Kergan m’a dit qu’il était très difficile de pousser davantage le jeu dans ses inspirations actuelles sans tomber dans une pâle copie de Paranoïa. Elle a raison : il fallait changer quelque chose pour ne pas se peindre dans un coin, et retrouver un allant.

Passer des “larbins” aux “capitalistes” qui dirigent est une idée très intéressante qui permet de changer un peu le jeu d’angle de caméra, c’est cool et encore plus original.

Personnellement j'ai du mal à savoir où j'aurais pu amener le jeu, je pense que j’aurais pas pensé à cette idée et que je serais parti ailleurs… Mais où ? Aucune idée là… Du coup je ne pense pas que j’aurais fait mieux.

Sous un Ciel d’Émeraudes (11^e) est un JdR spatial où vous jouez de riches capitalistes embarquées sur un vaisseau-colonie à destination des étoiles.

De réveil en réveil, vous devrez gérer incidents techniques et révoltes... quitte à sacrifier des membres d’équipage pour conserver votre fortune intacte !

Je trouve les critiques intéressantes. Surtout que mine de rien, l’humour c’est dur à faire et là… tout le monde est unanime sur le fait que Kergan a su faire quelque chose qui passe bien :) bravo !

Perso je suis fan du jeu, donc je lui aurai mis 23/20. Mais j’ai peur de ne pas être objectif ;)

Vas-tu produire une nouvelle version de Bienvenue à The Company ^TM, ton jeu de 2^e étape ?

Non, je ne pense pas. Ce que je pourrais écrire souffrirait de la comparaison avec le jeu de Kergan. Je suis toujours plus hypé par reprendre mes 1^e et 3^e forge, je ne saurais même pas expliquer pourquoi ?

Troisième étape : récupérer un JdR de 2e étape et le passer à 28000 signes max

Quelle fut ta réaction en recevant Un Mystère au dîner que tu devais développer et qui allait être jugé ?

Sincèrement ? La pire panne d’inspi que j’ai eue de toutes mes participations du 3FF. Impossible de trouver la moindre idée qui me botte. La zer-mi.

Les idées de jeux des précédents auteurs me plaisaient mais impossible de voir comment les faire évoluer. Et je n’arrivais pas à voir le coté fun et ludique de faire un simulateur d’engueulade au dîner… ayant déjà vécu ce genre de dîner houleux où on cache les bouteilles de vin au plus vite, à cause d’un papy ou d’un tonton qui devient raciste ou toxique après 3 verres ;)

D’habitude j’arrive à trouver une idée qui me redonne la flamme, me passionne, et qui se rapproche de près ou de loin de l’idée de base. Là rien… le néant. Plus vide qu’un discours de député.

Heureusement qu’on a eu une semaine de plus que les éditions précédentes (merci !)… Sinon là j’aurais rendu feuille blanche. 

Qu’en as-tu fait ?

J’avais besoin de changer après le 3FF précédent où j’avais vraiment mis mes tripes dans un jeu sur une situation qui me rend (toujours) malade, et un système particulier. Là je voulais quelque chose de bien plus léger… mais du coup rien ne venait.

Finalement, en creusant laborieusement l’idée du dîner, j’ai fini par me dire que j’aimais bien l’idée de faire un jeu organisé autour d’un repas. Et je trouvais surtout dommage de ne pas avoir de cadre précis pour jouer. Et je voulais une structure light, compatible avec un jeu à table. C’est de ça dont je suis parti.

C’est là, à mon avis, que j’ai fait une erreur : j’ai choisi le cadre le plus classique qui soit. À savoir l’Angleterre de l’Entre-deux-guerres, de Downton Abbey à Agatha Christie…

Certes c’est simple et ça s’écrit tout seul. Mais ça manque cruellement de ce petit sel d’originalité qui fait les grands jeux.

Après j’ai placé des choses auquel je tiens (une sécurité émotionnelle diégétique simple et efficace, un rappel qu’on fait pas un simulateur d'oppressions… Ah zut j’ai oublié de mettre un logo antifasciste ou l’Olivia Hill Rule) et j’ai fini par voir en mon jeu une jolie porte ouverte entre le JdR et le GN/la murder-party… mais rien de fifou.

Bref… C’est comme ça qu’est né Meurtre au Diner (COMPOSFES-3) … dans la douleur.

Meurtre au dîner

Écosse, 1917.
Lors d’un dîner à Coral Manor, l’hôte de la soirée est assassiné. Hélas, le coupable ne peut être que l’un des convives.
Scotland Yard a été appelé. En attendant, les convives peuvent enquêter et pincer le coupable. Ils vont devoir se cuisiner les uns les autres, pendant le repas.

Si j’avais eu un peu de temps, je pense que j'aurais fini par choisir un autre cadre. J’ai pensé par exemple à une anti-murder où tu es invité à dîner par un Comte Vampire, et chacun doit deviner les préférences alimentaires du Comte et éviter de se faire croquer au dessert. Un peu original au moins :)

Là par contre, où je suis fier de ce que j’ai fait, c’est sur l’idée d’utiliser des illustrations libres qui datent de plus d’un siècle. Ça donne une âme et une esthétique au jeu (appuyée par les couleurs PC CGA volontaires : violet, cyan, rouge…) que je ne renierai pas ; et surtout ça change radicalement de Larmes et de ses photos d’urbex en Creative Commons.

Meurtre au Diner est parti en finale, quels ont été les retours des pairs et du jury ?

Les retours critiques étaient intéressants et mérités : le jeu tourne mais il est ARCHI-classique.

Et bon c'est autant un jeu apéritif (ahah) qu'un jeu de rôle.

En vrai, je ne pense pas que le jeu mérite sa place en finale. Il y a des tas de jeux qui méritaient plus que celui-là (ne serait-ce que Sous un ciel d’émeraude).

Pour le jury, à la date où j’écris, je n’ai pas encore ses réactions. Je pense que je vais me faire allumer par Anne (que je connais bien) parce que c’est vraiment le classico des classico de la ‘murder que j’ai fait. À la limite, si elle ne me le reproche pas, je serai déçu ;) Mais je le sais, tout ça se règlera autour d’un verre de Sangria premier prix (désolé private joke entre elle et moi).

Mais plus sérieusement, j’aime cette simplicité qui rend le jeu accessible à des débutants tant coté PJ que MJ. On manque toujours de jeux qui soient accessibles. 

Et quand tu vois que certains recommandent Naheulbeuk comme jeu pour débuter, il y a de quoi se la prendre et se la mordre la place pour de l’amélioration :)

(image sérial Râlistes)

Les retours t’aideront-ils à écrire une 4^e version ce jeu ?

Les critiques que j’ai reçues de mes pairs vont certainement m’aider. Y a à boire et à manger (et pour un repas, c’est pas plus mal… pardon xD ).

Même si je ne suis pas d’accord avec tout… Oui le jeu est léger et sans dés. Mais c’était prévu comme ça : jeter des dés au milieu du repas c’est pas pratique, laissez le jeu être simple.

Bref, peut-être que je reprendrai ça tranquillement quand j’aurai pu me reposer. Je finis ce 3FF encore plus sur les rotules que les précédents. Il va me falloir du temps.

Notation des pairs

Parmi les jeux que tu as notés, lesquels recommanderais-tu ?

En vrai, chacun de ces jeux est intéressant. Dans le cadre de l’exercice, j’ai été critique sur ces jeux. Mais quand on regarde, ils ont chacun des trucs importants à montrer, et sympa à voir. Et je pense ce que j’ai dit sur le discord : qu’ils avaient un réel potentiel. Je n’aurai pas dit ça de tous les jeux du 3FF que j’ai eu entre les mains.

Le 7ème Rempart (17^e)

Ce jeu explore les thèmes de survie, de pouvoir et de sacrifice dans un monde à la dérive ou la noirceur qui plane dehors n’a d’égale que l’enfermement des êtres sur eux-mêmes.
Le système se veut volontairement très léger pour laisser l’improvisation percer les brumes de l’intrigue.

Le 7ème Rempart réussit un tour de force de subtilité. Certes il louche du coté de classiques éprouvés (la corruption de Warhammer ou le côté tribal-famille-choisie-traumatisée d’un Tribe 8) mais il arrive à faire quelque chose de neuf, de simple, d’un peu poétique et horrifique. On sent que l’auteur – Yaakab – a digéré ses références et su les utiliser avec doigté. Comme je lui ai dit, il ne manque presque rien pour que le jeu soit excellent. J’ai hâte de voir s’il le reprendra.

Désertez ! (26^e)

Les PJ ont déserté et ils forment un groupe soudé qui devra permettre à chacun d'eux d’accomplir son objectif personnel. C'est un jeu d'exploration et de survie dans lequel la victoire éventuelle repose avant tout sur l'inventivité des PJ.

Désertez ! propose de simuler la fuite d’un groupe de déserteurs qui fuient les boucheries de la première guerre mondiale. L’idée de mettre ça sur une carte de wargame, est très bien vue. Et d’un point de vue « devoir de mémoire », c’est un thème qui manquait au 3FF. C’est intéressant parce que si Meurtre au Diner lorgne définitivement trop du côté de la Murder-party, Déserteurs! tire peut-être trop du côté du wargame. 

Mais quand on sait le lien de filiation entre jeu de rôles et wargame, ça en fait un calque sincère de ce qu’ont été les premières tentatives de JdR. C’est super enthousiasmant à lire, il y a un amour mérité et sincère du wargame derrière ce jeu.

Coven (25^e)

Incarnez une assemblée de sorcières luttant contre les forces du Mal. Alliant fantastique et bienveillance, ce jeu s’inspire de sorcières bien-aimées, comme celles de Charmed ou Sabrina, la petite sorcière. Chaque magie a sa propre mécanique, offrant une expérience unique et immersive.

Coven est paradoxalement une lecture importante… parce qu’il parle énormément de magie mais ne définit pas assez son sujet… Je pense que c’est un bon exemple pour comprendre à quel point la proposition ludique (“on joue quoi ?”) doit être au cœur du jeu. 

Ça peut paraître dur comme analyse, mais en vrai ce jeu mérite mieux que de s'arrêter là. Il y a une amorce de propos d’empouvoirement (concept féministe qui parle de retrouver sa capacité d’action, à être autonome, actif) intéressant, sur les sorcières. Même si c’est en passe de devenir un cliché,  c’est toujours mieux que les poncifs rôlistes. 

Et surtout il propose des mécanismes de résolution originaux et liés à chacune des magies et ça vaut le coup d'œil, pour l’originalité. Avec un peu de boulot, il y a une base très saine pour un jeu type (séries télé) Sabrina ou Charmed.

3FF conv'

Participeras-tu à la convention 3FF, où l’on joue en ligne aux JdR des Défis ?

Je ne fais pas les 3FF Conv. C’est un tort, mais ça tombe généralement mal niveau dates pour moi et j’ai une santé qui me permet rarement d’envisager l’exercice.

Sans compter que je finis pas mal d’éditions du 3FF avec un gros syndrome de l’imposteur à soigner, et un épuisement consécutif à cette période d’écriture forcée. Elle tombe souvent trop tôt pour que l’un et l’autre soient cicatrisés.

Bref, prenez soin de vous c’est important.

J’admire ceux qui le font cela étant :) d’autant que les retours ont l’air très positifs… j’essaierai d’avoir assez la foi pour venir cette fois.

Du coup, sachant que la 3FF9-CONV, couplée au 25^e anniversaire de PTGPTB, se déroulera du 6 au 16 février (au lieu de janvier) sur notre Discord, seras-tu assez remis pour y venir ? :)

Peut-être, je verrai :) Déjà c’est plus loin des fêtes, ça aidera… En février j’ai aussi un truc avec l’association Gnafron (on fait du JdR en MJC pour les gosses de mon quartier) du coup faut que j’arrive à m’organiser. Mais ça me semble déjà plus faisable.

Et même si tu ne mènes pas, n’aimeras-tu pas demander à leurs auteurices de mener des parties de jeux qui t’intéressent, et jouer aux parties proposées ? :)

Si je suis en état, je passerai, promis. C’est plus facile de me poser autour d’une table, que de meujeuter. Même si je suis à 99% un MJ, et à 1% un PJ.

Le Défi

Quel bilan tires-tu de ta participation au Défi PTGPTB Trois Fois Forgé de cette année ?

À chaque défi 3 Fois Forgé j'apprends encore, sur le JdR comme sur moi-même, tant en créant qu’en relisant les créations des autres. C’est un exercice que je conseille à tous les apprentis-créateurs et créatrices de jeux. Par contre, ne le faites pas pour soigner votre égo : c’est un exercice souvent douloureux.

On se fait la main, dans des conditions qui nous poussent dans nos retranchements, c’est un exercice très formateur.

Participeras-tu au défi 2025 ?

Très probablement.

Expression libre ?

Je voulais terminer par quelques conseils à ceux qui auraient peur de se lancer dans l’exercice. Je ne prétends pas que c’est LA vérité, c’est plutôt MA vision des choses, partiale et subjective :

1. Ayez une proposition ludique.  Qui on incarne ? Qu’est-ce qu’on fait ? Pourquoi ? C’est la pierre centrale, fondamentale de votre jeu. Tout doit tourner autour de ça. C’est ce qui fera qu’on comprendra, appréciera et retiendra votre jeu.
2. Bannissez “tu peux tout jouer, dans toutes les époques” de votre vocabulaire. Avant de vouloir étendre votre jeu au moyen-âge, dans l’espace ou ailleurs, il faut déjà avoir un jeu avec une proposition ludique et un cadre clair. Soyez certain que ça soit hyper-défini avant de rajouter ce genre d’idée qu’on trop vu.

(image sérial Râlistes)

3. N’essayez pas de faire un système trop riche. Le 3FF ne permet pas de s’étendre sur 40 pages. Faites un système simple et lié à votre idée de cadre. C’est dur mais nécessaire. Vous aurez besoin de place pour parler du thème, de l’ambiance… Le système est important (System does matter ^ptgptb). Un système qui marche, c’est celui où il n’y a plus rien à enlever.
4. Faites un minimum de calculs de probabilités ou inspirez-vous des probabilités de jeux existants. Si vous utilisez des dés, il faut que ça doit pensé, mathématisé, réfléchi, et que les statistiques (les chances de réussites) soient adaptées à votre proposition ludique ⁽¹⁾. Attention particulièrement aux jeux de cartes : 1 chance sur 54 de réussir, c’est pourri.
5. La fiche de perso est vraiment utile. Mieux elle est bien présentée et hiérarchisée, mieux ça aidera les gens à comprendre votre jeu. Une fiche bien faite t’aide à comprendre le design du jeu. Tu vois la hiérarchie des informations, toutes les mécaniques à travers la fiche.
   Un scénario est aussi utile pour le MJ.
6. En termes de mise en page, la lisibilité est votre plus important critère. Certes une jolie maquette aide à l’immersion dans le jeu… Mais un truc simple et efficace en noir et blanc passera toujours mieux qu’un truc joli, bariolé, mais illisible et1 foutraque.
7. Beaucoup de critiques conseillent à juste titre de faire un encart avec le matériel nécessaire si votre jeu en a besoin. Je suis du même avis. Pareil, la mention de la sécurité émotionnelle n’est pas un luxe.
8. Vous ne ferez jamais l’unanimité. Et ce n’est pas grave. Certains auteurs vont aimer votre choix d’un jeu politique et/ou historique, d’autres non. Certains critiques vont aimer les propositions excentriques, d’autres non. Certains vont kiffer voir des adaptations de For The Queen ou un Powered by The Apocalypse, d’autres non. C’est le hasard et vous n’y pourrez rien. Lâchez prise ⁽²⁾.
9. Pétez les codes du genre, osez les trucs étranges, surprenez-vous. Si vous ne le faites pas ici, vous ne le ferez jamais.
10. Amusez-vous. Croyez en vous et vos jeux. Personne ne le fera à votre place.

Merci !