Cinq règles pour rendre vos combats plus palpitants
© 2011 GGG et Geek’s dream girl
La poussière du champ de bataille est encore en suspension lorsque Ghost la Rôdeuse Férale [race et classe de D&D4 (NdT)] interroge le gobelours-barghest Brekhu. Celui-ci ricane avec mépris malgré le goût du sang dans sa bouche… il est en train de mourir, il le sait. Il vit ses derniers instants.
Ghost le dévisage froidement. « Pourquoi ? Pourquoi fallait-il que ma famille meure ? Pourquoi as-tu attaqué mon village il y a tant d’années ? »
Le ricanement de Brekhu se fait plus cruel. « Si cela n’avait pas été ton village, cela aurait été un autre. Les tiens se trouvaient sur mon chemin au mauvais moment. »
Ghost sent son estomac se tordre. Cela faisait si longtemps qu’elle attendait des réponses, et au final il n’y en avait aucune. D’une voix étranglée par la rage, elle lui demande « De quelle manière veux-tu mourir ?! ».
Brekhu éclate de rire. « Tu penses que tu as le pouvoir de me détruire ? La rage des Enfers coule dans mes veines. Je te maudis de mon dernier souffle. Tout ce que tu chériras sera voué à disparaître. »
Les yeux de Ghost se plissent au moment où elle enfonce les lames de ses épées jumelles dans les entrailles de Brekhu. Puis elle se penche sur son corps et murmure : « Tout ce que j’exècre également ».
Brekhu rit de plus belle, un filet de sang dégoulinant de ses lèvres pendant que de la fumée commence à s’échapper de sa bouche, ses yeux, son nez et ses oreilles. Il se réduit rapidement en cendres tandis qu'un feu infernal brûle également en Ghost. Elle extrait ses épées et déchiquette le corps carbonisé de Brekhu. Elle le fixe du regard… La joueuse lève les yeux sur moi, me sourit et s’exclame : « C’était un beau combat ! »
Eh non, ceci n’est pas une tentative d’écriture romanesque, mais la scène finale de ma toute dernière séance de D&D4. Le combat fut très éprouvant et les joueurs ont pratiquement épuisé toutes les ressources de leurs personnages, mais le lendemain ils en parlaient encore. J’en étais heureux car les combats marquants sont ceux qui reviennent dans les récits de campagne pendant des années.
Les joueurs m’ont demandé le nombre d’ennemis qu’ils avaient massacrés et j’ai fait le décompte.
Je suis rarement les règles à la lettre quand je peux améliorer l’histoire
Cela m'a fait réfléchir posément à la manière dont j'aime construire mes scènes de combat. En y réfléchissant, un certain nombre de règles que j’essaie de suivre lors de la création des affrontements me sont venues à l’esprit. Aucune d’entre elles n’est vraiment innovante ou stupéfiante, mais peut-être que les voir réunies dans cet article vous inspirera pour la création de vos propres escarmouches.
1. Rendez intéressants les ennemis
Cette règle est explicite. Je n’aime pas balancer les mêmes adversaires à mes joueurs, encore et encore. Je voulais qu'avec ce combat ils aient l'impression de prendre d’assaut un grand camp gobelin dirigé par un barghest, avec des lanceurs de sorts, de l’artillerie, des tirailleurs, des adversaires embusqués, etc. Mon groupe de cinq Personnages-Joueurs de niveau 5 et leur compagnon PNJ de niveau 1 avaient fait deux rencontres s'enchaînant rapidement sans qu’ils aient la possibilité de prendre un repos complet(1), même si je leur ai accordé de « reprendre leur souffle », comme expliqué ci-après.
Ils avaient massacré 22 gobelins de niveau 1, répartis entre archers et combattants au contact ; 3 gobelins (niv. 2), 2 loups (niv. 2), 5 hobgobelins (niv. 5), 1 sorcier gobelin (niv. 4), 1 gobelin fendeur de crânes (niv. 3), 1 gobelours étrangleur (niv. 6), 1 mage de bataille hobgobelin (niv. 6) et 1 barghest étrangleur (niv. 6). Dans ce combat, les antagonistes étaient suffisamment diversifiés pour que les joueurs réfléchissent à la meilleure façon de procéder. Ils étaient toujours en train d’en découdre avec les monstres de la première rencontre lorsque je fis intervenir ceux de la deuxième, en donnant aux joueurs assez de temps pour récupérer 1 pouvoir de rencontre ou dépenser 1 sort de guérison. Ils finirent par utiliser presque tous leurs pouvoirs quotidiens et même certaines de leurs potions, cartes de rencontre et points de faveur. C’était super !
Ils finirent tous blessés à un moment donné : plusieurs d’entre eux tombèrent sur le champ de bataille et furent ramenés à la vie par les pouvoirs de guérison que le groupe pouvait utiliser. Il y eut beaucoup de « changements de partenaires » quand les PJ se téléportaient les uns les autres et que les ennemis repoussaient une cible pour en engager une autre. Ce fut à la fois chaotique et extraordinaire, et personne ne trouva le combat trop long.
Et oui, je sais, les barghests ne lancent pas de malédictions et ne se consument pas dans des flammes infernales quand ils meurent, mais cela me semblait pertinent et les joueurs ont adoré. Je suis rarement les règles à la lettre quand je peux améliorer l’histoire par ces petits ajouts.
2. Rendez intéressant le champ de bataille
Il n’y a rien de plus monotone qu’un grand champ de bataille vide. Les lieux d’affrontements doivent être dynamiques et intéressants avec de nombreux types de terrains et les effets qui vont avec, mais pas trop pour ne pas embourber votre partie. Cela fait passer « ce combat contre des gobelins » à « ce combat contre des gobelins dans les grottes derrière la cascade ».
Pour ce combat, j’ai pris la carte du Fort de Gisombre utilisée pour la tristement célèbre rencontre de « Dendefer ». Elle montre une rivière qui traverse des bois (qui sont devenus des sous-bois pour l'occasion) et une cascade abritant un réseau de grottes. Il y a également un cercle magique dont le sorcier gobelin s’est servi pour gagner des avantages et dont n'importe qui pouvait prendre le contrôle grâce à un test d’action mineure d’Arcanes. Il y avait beaucoup de couverts potentiels, du terrain difficile, des pièges dans la rivière - que personne n’a finalement déclenchés - et les grottes cachées [derrière la cascade, NdT]. Il y avait bon nombre de choses représentées sur la carte avec lesquelles on pouvait interagir, et tant les PJ que les PNJ les ont utilisées à leur avantage à un moment ou à un autre.
3. Rendez important les combats
Je me suis servi de cette rencontre pour introduire un jeune goliath, Ilikan Lance-Épieu. Je voulais donner aux joueurs une raison d’envoyer les PJ à un village goliath proche (et au mystérieux monastère dans les montagnes qui le surplombaient). Je pensais alors qu'il pourrait être intéressant qu’un PNJ se joigne à eux pour une courte durée. Une poignée des gobelins recherchés par les PJ s’en prenaient au jeune homme au début de la scène. Au moment où les PJ arrivèrent sur le bord de la carte, Ilikan avait réussi à tuer un gobelin avec une lance et à saisir sa grande hache. Les autres gobelins rendus furieux s'avançaient pour la curée ; les PJ se précipitèrent pour aider le jeune garçon et venger Ghost, le PJ dont la famille avait été massacrée par cette même troupe de gobelins quand elle était enfant.
Ce combat aurait pu se résumer à venger la famille de Ghost, mais introduire quelqu’un que les gobelins persécutaient - comme ils s’en étaient pris jadis à la jeune Ghost - a donné à ce combat une portée beaucoup plus personnelle. Ghost se précipita sans hésiter et quand Brekhu entra en scène, je dis au joueur de Ghost que ce gobelours avait une oreille déchirée. Cela indiquait au joueur que c’était ce « gobelin » que Ghost avait blessé dans sa fuite quand elle était enfant.
Soudain, ce combat était devenu une affaire « vraiment » personnelle.
4. Créez-leur des conséquences
Il devrait toujours y avoir des conséquences à tout combat digne de ce nom, au-delà du simple « tu gagnes ou tu meurs ». Si les PJ avaient perdu le combat, non seulement le village de Ghost n’aurait pas été vengé, mais les gobelins auraient poursuivi leurs massacres et leurs pillages. Ce n’était pas acceptable.
Et qui plus est, l’introduction d’Ilikan a amené une autre conséquence potentielle. Les PJ auraient pu gagner mais ils auraient pu ne pas réussir à sauver la vie du jeune goliath. Cette possibilité leur était insupportable à tous.
5. Faites qu’ils soient pertinents
Comme je l’ai dit, ce combat était très important pour l’intrigue personnelle d’un PJ. Ce genre de rencontre peut être, à bien des égards, plus important que les affrontements de l’apogée de votre campagne. Ils sont plus personnels et ont plus d’impact pour les joueurs dont les personnages sont impliqués.
Il est également essentiel que vos combats s'intègrent bien dans la logique interne de votre campagne, et si ce n’est pas le cas qu'il y ait une sacrée bonne raison pour ça.
Il avait déjà été établi de par l’historique du personnage de Ghost que des bandes de gobelins écumaient les terres sauvages du nord, fondant sur les petits villages qui tentaient de subsister. Il avait aussi été établi que au sud, des orques essayaient de repousser les frontières pour récupérer plus de territoires. Si j’avais organisé une confrontation avec des orques dans le nord, cela aurait semblé incongru et j’aurais dû prévoir une bonne justification pour cela. Peut-être une note précisant que ces orques cartographiaient la région dans le but de faire passer la guerre sur deux fronts. De même, si je plongeais les joueurs dans une bataille contre des élémentaires sans que ces derniers aient aucune raison de se trouver là, cela nuirait au « réalisme » de mon univers (même si je déteste utiliser ce terme pour un jeu de Fantasy).
À vous de jouer
Avez-vous un récit de combat mémorable issu de l’une de vos parties, qui illustre ou défie ces règles fondamentales? Avez-vous à l’esprit une autre règle que j’aurais oubliée ? Faites-le nous savoir!
Article d’origine: http://geeksdreamgirl.com/2011/10/29/five-rules-for-running-more-exciting-rpg-combats
(1) NdT : Tactiques diaboliques contre PJ narcoleptiques explique comment éviter que les joueurs abusent des règles de récupération, et comment cela permet de mettre la pression et d’avancer plus vite dans la partie. [Retour]
Pour aller plus loin…
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