"Participez au 3FF" - Retex de Tolkraft

Les défis de Tolkraft

Tolkraft, peux-tu te présenter en quelques lignes ?

J’ai tout juste la quarantaine et je vis à Lyon. Je suis porteur du virus de la Science-Fiction et de l’imaginaire depuis que je suis gamin, mais c’est seulement en 2014 que je me suis mis au JdR. Avant ça, toute mon expérience rôliste se résumait en une unique partie de Cyberpunk 2020 (jouée vers 13-14 ans, en colonie de vacances) abrégée après vingt minutes de jeu lorsque mon personnage a pris une balle en pleine poire ; puis à la lecture (sans y faire jouer) de Warhammer et INS/MV, achetés à la rentrée pour confirmer que ces univers imaginaires et aventures illimités me plaisaient bien. 

Mais depuis 2014, j’essaye de suivre ce qui sort et de tester toutes sortes de jeux, en restant curieux et ouvert. Le JdR me permet aussi de faire vibrer ma fibre créatrice, aussi bien via l’écriture de scénarios (je suis un participant – et vainqueur – assidu du concours de scénarios des Utopiales depuis 2015) que sur la création de jeux : c’est ma troisième participation au Défi 3 Fois Forgé et la deuxième fois que j’ai la chance de l’emporter.

En 2018, pour ma première participation, j’avais hérité en troisième étape d’un jeu vraiment original et solide, que je me suis contenté d’étoffer et de mettre en page pour en faire Planétès. Pour sa première participation, on n’ose pas forcément casser les murs et tout refaire. Cette année, ce fut bien différent…

Première étape : un jeu de rôle de 6500 signes

Quelles étaient tes motivations pour TatIAges, ton jeu de l’étape 1 ?

première version de Skin Wars

TatIAges est né lors d’une courte game-jam – un défi de création de JdR - aux Utopiales 2018. J’avais conceptualisé un jeu cyberpunk dark, où l’on jouait non pas un personnage, mais une conscience numérisée sous forme de tatouage, encodée comme une sorte de QR-code high-tech.  On pouvait donc contrôler plusieurs corps à la fois et tenter de voler celui ou ceux des autres PJ.

À l’issue d’une heure de jam, mon jeu était loin d’être fini et je ne savais pas trop quoi en faire (le Cyberpunk n’est pas mon univers de prédilection – peut-être un traumatisme latent de mon introduction au JdR ;), ni dans quel sens le développer, ni quelle forme lui donner… Il est resté dans mes « notes de projet » pendant deux ans. Mais vu que le concept me semblait avoir du potentiel, j’ai décidé de le proposer en première étape cette année, curieux de voir ce que d’autres que moi en feraient.

Ton opinion sur ce qu’il est devenu : Skin Wars ?

Bien m’en prit, car Frogeater puis Faenix ont fait du bon boulot, en gardant l’ADN du jeu (et en introduisant un twist sympathique. Ce n’est pas une optique que j’aurai choisi, car elle s’éloigne un peu de mon angle initial, mais c’est tout l’intérêt du 3FF : voir ses idées et attentes bousculées par les autres participants.

Et c’est génial, car avoir une autre vision sur le potentiel de votre jeu permet de vous ouvrir de nouvelles voies, d’avoir de nouvelles idées, d’imaginer de nouveaux développements !

Je suis surpris que la base de système simpliste que j’avais glissé dans les 6 500 signes n’ait pas été un peu plus étoffée. Et j’aurais aimé que le jeu propose un peu plus de « matière » pour animer et rythmer la partie, mais réussir à concilier, dans les 28 000 signes impartis, ce qui est nécessaire au jeu et ce que l’on aimerait mettre dans le jeu est un exercice difficile.

[Maintenant PTGPTB vous propose de publier aussi après le Défi votre version Director’s cut (avant le charcutage pour rentrer dans la limite de signes) (NdlR)]

Quel accueil a-t-il reçu ?

Plutôt bon, vu qu’il finit 6e ! Le jeu est original, plutôt complet et propose même un scénario d’introduction qui permet d’enchaîner en campagne. Du bon boulot !

Deuxième étape : un jeu de rôle de 13 500 signes

Comment as-tu perçu [V]2000, le jeu que tu as reçu pour l’étape 2 ?

Ce jeu était un pur shoot de nostalgie, un concentré de cassette VHS des années 80 ! Imaginez un peu, il permet de jouer à K2000 ou Supercopter ! Ce choix « d’univers » a été malin de la part de Rappar, car il est déjà défini et connu (du moins par les plus de 35 ans). Cela permet de consacrer d’autant plus de signes pour aborder la création du super-véhicule, de l’équipe de personnages, les bases d’un système utilisant des cartes ; ainsi que des conseils sur comment maîtriser la première partie et ouvrir ou faire varier l’univers proposé ! Rien que ça ! 

Qu’as-tu changé et pourquoi ?

Je n’ai rien changé du concept, tant il me plaisait. J’ai étoffé le jeu, proposé des archétypes de personnages un peu plus marqués et diversifiés et refait le système, en gardant des cartes.

Vu l’univers très américain de ces séries, je me suis dit que le poker dans sa variante Texas hold’em ferait une bonne base, d’autant plus facile à assimiler qu’elle est connue de pas mal de monde. En offrant la possibilité de bâtir la « main » des héros en collaborant et d’influencer la rivière (les cartes communes à tous) via des jetons « environnement », cela me semblait une bonne solution pour gérer à la fois les oppositions et les poursuites, en donnant un pouvoir narratif aux joueurs et joueuses.

Ton opinion sur ce qu’il est devenu (Trakker) et l’accueil que le jeu a reçu ?

Comme à son habitude, Amatsu a fait un boulot formidable sur la forme du jeu. Je regrette un peu qu’il ait modifié le concept si funky, même si Trakker tirant désormais un peu plus vers Mad Max – reste une ode à l’essence, au chrome, à l’asphalte brûlé et aux vigilantes assis derrière un volant.

Preuve de la qualité du jeu, il a été très bien reçu : 4e au classement et coup de cœur de l’orga !

Lire l'interview d'Amatsu pour en savoir plus sur Trakker

Troisième étape : un jeu de rôle de 27500 signes

Quelle fut ta réaction en recevant Océan, le jeu que tu devais développer et présenter ?

Ma première réaction fut la surprise : j’hérite d’un jeu qui n’a pas eu de deuxième forge ! Je n’ai donc que les 6 500 signes initiaux de Tunime comme base de travail.

Si cela allait me demander plus de boulot et d’idées pour produire le jeu final, cela me laissait plus de liberté créative. En effet, je m’astreins comme règle personnelle (car on n’y est pas obligé par le règlement) de coller le plus possible aux thèmes, concepts et idées des « forges » que je reçois. Si cela m’a parfois joué des tours, c’est ma vision du Défi 3 Fois Forgé : devoir travailler sur un jeu, des thèmes et mécaniques qui ne me sont pas naturels. 

Ma deuxième réaction fut une bonne surprise : Océan est inspirant ! Ce ne n’étaient que deux pages de texte, dont près d’un tiers uniquement dédié à l’ambiance, mais qui avaient beaucoup de potentiel. Et c’est surtout un thème dont je n’aurais jamais eu l’idée : je suis natif de l’est de la France, alors la mer et l’océan, ce n’est pas vraiment ma tasse de thé.

Je décidai de garder la base du système (3 domaines de compétences, avec un rang de dé chacune – d4, d6, d8 – et une valeur de difficulté à dépasser pour l’emporter ; le tout en incitant à la collaboration entre joueuses) et le thème du jeu (les tribulations maritimes). Je n’avais plus qu’à me mettre ensuite au travail…

Qu’en as-tu fait ?

Une époque moderne semblait transparaître du texte en version 1 d’Océan, mais ce n’était pas ce qui m’inspirait le plus. Pour moi, l’océan, c’est les vagues à perte de vue, le mystère et l’inconnu de l’horizon ; ce qui colle moyennement avec notre époque actuelle, démystifiée à coup de radar et de coordonnées GPS.

Je décidai de respecter le thème au pied de la lettre : mon jeu parlera de l’océan, toutes époques confondues, en les mixant allégrement. Le grand bleu (et son absence de repères visuels ou temporels) se prête assez bien à ce genre de mélanges ou d’incertitudes (pensez au triangle des Bermudes, ou à Nimitz, retour vers l’enfer). Je décidais donc de délaisser l’époque moderne et de faire naviguer sur un bâtiment en bois. 

Pour soutenir les thèmes de la navigation, de la surprise et de la découverte, je réutilisai une variante d’une idée de Planétès (mon jeu gagnant du 3FF 2018) que je n’avais pu garder faute de place : faire naviguer physiquement le vaisseau sur une mer de cartes faces cachées. Retourner la carte permettrait alors de découvrir une épreuve et fixerait également la difficulté. Et puis tant qu’à faire, la couleur de la carte décidera également du domaine de compétence à utiliser ! Il n’y en avait que 3 dans la première forge, mais je pus facilement en rajouter un quatrième pour avoir 4 catégories : Adresse, Astuce, Puissance et Savoir, un par couleur de carte.

Tout cela me semblait pas mal, car les thèmes convergeaient : la navigation erratique, la surprise de la découverte de l’épreuve liée à chaque carte…

À ce sujet d’ailleurs, il fallait aider la MJ dans la narration de l’épreuve, pour qu’il y ait autre chose à vivre que des tempêtes et des attaques de pirates inventées sur le pouce. Si sur le principe, c’est une bonne idée de proposer une épreuve unique pour chaque carte, dans la pratique, ça me forçait à créer 52 accroches différentes. Ce qui est plus facile à dire qu’à faire…

Je réfléchis aux films et aux livres ayant l’océan pour protagoniste, afin d’y trouver des idées de rencontres et d’épreuves ; et petit à petit, assez laborieusement, je remplis mon tableau Excel de 13 cases par 4 avec ces pitchs. Je les étoffai plus tard en une ligne ou deux, afin qu’ils puissent directement être lus à l’équipage, ou bien juste servir d’inspiration pour la Conteuse.

Évidemment, l’Odyssée, que j’ai dévorée vers l’âge de 11 ans, a été une grande source d’inspiration (au point de donner au jeu son nom, où les PJ sont — Tel Ulysse — perdus en mer), mais j’ai pioché dans des trucs aussi divers que Pirates des Caraïbes, Master and Commander, 20000 lieues sous les mers ou encore Monkey Island.

 

Je réalisai que les sources sont très nombreuses et que si j’avais le temps de faire des recherches (mais dans le Défi 3FF, le temps est le principal ennemi) je pourrais proposer pas mal d’épreuves différentes, dans plusieurs époques différentes. Je gardai l’idée sous le coude et regroupai mes 52 épreuves, mon melting-pot de clichés marins à la temporalité volontairement mixte, dans un recueil, le « livre d’Océanos ». Si le jeu fonctionne et plaît, je pourrai lui offrir d’autres aventures, univers et épreuves via d’autres « livres », afin de renouveler l’expérience de jeu (1). Car vu l’optique que j’ai choisie, Tel Ulysse sera principalement joué en one-shot, même s’il est possible de prendre son temps et d’en faire une courte campagne.

Je résolus d’offrir plus de variété et de possibilités de roleplay en dissociant le Personnage de son rôle à bord ; et créai donc quatre Rôles (Capitaine, Bosco, Vigie et Timonier) en leur affectant à chacun un dé. Mais cela donnait l’impression qu’il n’y avait que quatre personnes à bord, en occultant complètement les matelots, c’était dommage… Pourquoi ne pas créer un cinquième rôle, regroupant ceux-ci ? Vu qu’ils sont plusieurs, mais peu spécialisés, j’affectai au rôle plusieurs dés de valeur basse, et le personnage serait simplement le porte-parole (ou la grande gueule) de l’équipage.  

Maintenant que j’avais des rôles qui n’étaient plus liés au personnage et des Matelots, cela me permit d’introduire dans le jeu un trope des histoires de marins : la mutinerie, souvent initiée par l’équipage face à un capitaine tyrannique ; et qui permet de redistribuer les rôles. Pour renforcer cet axe, j’offris donc les pleins pouvoirs au Capitaine : c’est lui qui décide de tout à bord et qui contraint les autres à obéir… quitte à ce qu’ils se révoltent lorsqu’ils en ont marre.

Il me restait à cadrer le système de déplacement du navire sur la mer de cartes : favoriser une direction à cause des vents dominants et des courants, mais permettre au Capitaine de décider de son cap, tout en donnant un boulot à la Vigie (regarder les cartes aux alentours), au Timonier (piloter le navire quand il ne suit pas les vents favorables) et au Bosco (qui remplace les autres quand c’est leur tour d’être Conteur).

Pour ces vents dominants, vu que chaque carte est entourée de huit autres, je pourrais utiliser un d8 pour les déterminer aléatoirement, mais je tranchai pour un d10 afin de me permettre d’introduire deux autres lieux communs de la navigation : la mer d’huile et la tempête.

Enfin, avant d’attaquer la rédaction au propre du jeu, je devais y introduire le plus d’ambiance possible. La première forge en débordait (citations, termes, superstitions…), mais je me rendis compte que mes notes dépassent déjà les 30 000 signes, alors que l’on est limité à 28 000 ! Impossible donc d’insérer des fioritures pour soigner l’ambiance. Je devais me reposer uniquement sur le vocabulaire. J’épluchai donc le champ lexical de la mer et des bateaux pour y trouver des termes évocateurs, mais connus, ou au moins suffisamment parlants pour que leur sens émerge du contexte, puis réintroduisis tout ça dans le texte, surtout dans les descriptifs des épreuves.

Au final, Tel Ulysse est un JdR dont je suis fier. Il est original, à mi-chemin du jeu de plateau et il évoque plutôt bien son sujet : l’océan, ses mythes, ses surprises et la coopération face aux dangers. Une fois le tout écrit, les textes peaufinés, corrigés et relus (merci à ma compagne), il me restait à faire une jolie mise en page pour le sublimer.  

A-t-il été bien noté ?

Tel Ulysse – le Livre d’Océanos a été noté de manière hétéroclite...

Lors de la notation des autres participants, il a reçu un 18,5 et un 18, les deux prophétisant une place en finale, voire la victoire. Mais aussi deux notes plus critiques (13,5 et 14) qui prouvent bien qu’on ne peut pas plaire à tout le monde. Suite à cela, Tel Ulysse était 3e finaliste, assez loin derrière Helvegen et Escape Daedalus et poursuivi par Trakker (elle était facile ;-) ), trois jeux de grande qualité. Je ne me voyais pas en vainqueur cette année…

Mais de la même façon qu’on ne peut pas plaire à tous, on peut parfois emballer certains. Les trois membres du jury ont été conquis par Tel Ulysse, qui termine sa croisière avec une note moyenne du jury de 19/20. L’annonce de la victoire vint comme un cadeau de Noël supplémentaire durant les fêtes !

Mais au final, plus que les notes, ce qui importe surtout ce sont les critiques et commentaires faits sur divers points du jeu : ce sont des mines de bonnes idées, de suggestions pertinentes et d’axes d’amélioration qui donnent envie de se remettre au travail pour améliorer notre jeu. Car il ne faut pas se leurrer, on fait de son mieux en quinze jours, mais il est impossible de créer un jeu dont tous les aspects sont pleinement satisfaisants ; et on ne cracherait pas sur deux mois supplémentaires pour peaufiner et avoir le temps de tester tout ça correctement.

Notation des pairs

Parmi les jeux que tu as notés, en recommanderais-tu ?

Crisis Prime m’a le plus enthousiasmé. Un JdR de superhéros dans un multivers (dans la lignée de l’excellent Spider-Man: New Generation), avec un système original et qui propose même une trame de campagne. Si vous aimez le genre, jetez-y un œil.

Le Défi

Quel bilan tires-tu de tes participations aux défis PTGPTB Trois Fois Forgé ?

Je n’en tire qu’un bilan positif : c’est un vrai challenge qui demande qu’on y consacre du temps, mais qui est extrêmement formateur, à tous points de vue, aussi bien sur l’imagination, la création, la rédaction et la critique constructive (car c’est la « phase 4 » du défi et nombreux trouvent que c’est la plus difficile).

Oser proposer ses idées, ses textes et ses jeux au 3FF, puis à la critique partiale – et parfois dure – d’autres participants est un grand pas pour la maturité d’un créateur : les bons avis font plaisir et encouragent à continuer ; les retours plus critiques poussent à se remettre en question, à améliorer son travail et incitent à persévérer.

Avec ses dates limites et ses objectifs clairement définis, le 3FF permet de faire émerger un jeu de rôles, un vrai – jouable et fini – en un mois et demi. Certes, il ne sera ni parfait, ni complet, mais il existera, il sera mis en avant et disponible sur https://ptgptb.fr, il sera lu par plein de monde et joué par certains…

Si vous êtes du genre à avoir des idées qui traînent dans vos notes depuis trois ans, ou bien des concepts que vous retravaillez sans cesse jusqu’à en avoir faits des monstres de 400 000 signes, je ne peux que vous encourager à participer au 3FF : cela vous montrera une autre façon de travailler et de faire exister un projet de jeu.

Enfin, je tire beaucoup de plaisir à participer au 3FF, car il me sort de ma zone de confort et m’envoie dans des univers ou sur des pistes que je n’aurai jamais explorées par moi-même. L’année dernière par exemple, j’ai bossé sur la 2e étape de Vérone (là encore, de Tunime, ce type déborde d’idées originales) : j’ai tiré une tronche de quatre pieds de long en le recevant, me disant « Mon Dieu, on joue dans Roméo et Juliette ! Qu’est-ce que je vais pouvoir faire avec ça ? »  avant de kiffer durant les quinze jours suivants en me replongeant dans Shakespeare et la richesse de ses œuvres.

Bref, si je devais vous donner des conseils, ce serait :

  1. Participez au 3FF ! Il n’y’a rien à perdre, tout à y gagner, surtout de l’expérience.
  2. Proposez une première forge originale ! On n’est pas là pour réécrire D&D, Apocalypse World ou Vampire : The Masquerade. Lâchez-vous sur les concepts, sur les univers, sur les mécanismes ! Allez dans une direction, n’importe laquelle, mais foncez-y franchement. Vous pouvez faire confiance aux deux « forgerons » qui reprendront votre travail pour tempérer vos folles idées. Il vaut mieux proposer un jeu avec un thème trop fort ou extrême qu’un jeu sans thème marquant.
  3. Pour la 3e forge, bossez vos textes. Personne n’a envie de lire un jeu plein de fautes, avec des phrases peu claires ou mal construites. Ce que vous livrez au final – avant d’être un Jeu de Rôle – c’est un texte.  Celui-ci doit être rédigé avec toute votre attention et au mieux de vos capacités.

    Ne vous lancez pas dans une mise en page chiadée tant que votre texte n’est pas impeccable : il n’y a rien de plus enrageant que d’avoir un « joli » jeu dans lequel il y a des erreurs grossières, des fautes inexcusables, voire des lettres ou des mots manquants !

    Si vous ne savez pas faire une mise en page « pro », ce n’est pas grave : c’est le jeu que l’on évalue, pas son aspect. Un simple texte sous Word, propre, lisible, aéré et sans fautes, comme Malice, vainqueur du 3FF4, ne vous « coûtera » pas de points, au contraire.

Participeras-tu au défi 2021 ?

Moi ? Bien sûr.

La question, c’est plutôt : vous qui me lisez, y participerez-vous ?

Question bonus : Tu gagnes des concours de scénarios et des concours de JdR, tous deux publiés. Ne sont-ce pas des exercices très différents ? Comment briller aux deux ?

Difficile question. Je n’ai pas de “recette magique” à soumettre. Je pense que c’est principalement un mélange de :

  • travail.

Je consacre de nombreuses heures à mes productions, que ce soit des scénarios, des jeux ou des systèmes. Je les aborde toutes de la même manière : je prends des notes, je pose des bases, je fais un premier jet que je laisse décanter longtemps, je le retravaille, le laisse reposer, et le retravaille encore… Un peu comme pour une pâte feuilletée ou de l’acier damassé ; je pense que – dans mon cas – c’est cette réitération du processus, le fait de remettre le fer à l’ouvrage qui me permet de voir les “impuretés” avec un œil neuf et de supprimer petit à petit les scories.

Mes scénarios et mes systèmes restent souvent en gestation pendant un an ou deux avant que je ne me dise “OK, ça tient la route, c’est prêt”. Dans le cadre du 3 Fois Forgé, l'échelle de temps est moins ample, mais sur les quelques jours impartis pour la 3ᵉ étape, j’y travaille presque tous les soirs après le boulot.

  • passion.

Si je peux consacrer autant de temps à mes productions, c’est parce que j’aime ça. C’est à la fois mon échappatoire, l’occasion de laisser mon esprit explorer de nouveaux territoires et imaginaires, et celle de mettre au boulot mes petites cellules grises pour construire un truc qui tienne debout. Le plus important pour moi, c’est que ce n’est jamais une contrainte. Y’a des jours – voire des semaines – “sans” : dans ces cas, je ne me force pas, je fais autre chose (sorties, lecture, ciné, jeux de société…) jusqu’à ce que l’envie me reprenne. Évidemment, cela me confère un rythme de production digne d’un escargot.

Je suis assez admiratif des gens qui arrivent “à produire de l’imaginaire” chaque jour, car j’en suis bien incapable. J’ai beau aimer ce que je fais, je pense que je ne pourrai pas, pour cette raison, en faire mon travail : la notion de contrainte (devoir produire, chaque jour) tuerait ma créativité et mon plaisir.

  • chance.

Oui, c’est un facteur important : traiter du bon sujet, au bon moment, pour les bonnes personnes, afin de ressortir parmi les favoris. Et puis il y a aussi “la concurrence”. Ceux qui ont déjà passé des concours administratifs ou envoyé des CV le savent : le niveau des autres candidats est au moins aussi important que le vôtre. Sans petit coup de pouce du destin, votre proposition risque de se noyer au milieu des autres…

Là-dessus, personne n’a de contrôle. Il faut savoir accepter les coups du sort et ne pas se décourager. Prendre le bon comme le mauvais.

Par exemple, pour ma deuxième participation au 3 Fois Forgé en 2019, j’ai hérité en 3ᵉ étape de SECLAR-2, un jeu qui ne m’a pas du tout parlé. Un sujet trop vaste, trop vague ("On joue à jouer à des JdR")… Je n’ai vraiment pas su quoi en faire : aucune idée, aucune inspiration. J’ai dû admettre que cette année-là, je ne rendrais pas de jeu fini.

Je l'ai expliqué à Sylmenas ; il a trouvé un repreneur, et au final, la 3e version - SECLAR-3 (Geekrun) - m'a impressionné. Le repreneur a trouvé la bonne façon de faire un vrai bon jeu tout en restant dans le postulat de base, ce que je n'avais pas réussi à faire.

Geekrun : Une course contre la montre où un groupe de joueurs de jeu vidéo démarre une partie dans un univers donné et part dans une quête frénétique de moyens de passer successivement de monde en monde, jusqu’à avoir visité les 10 univers de jeu. Entre La Carte au Trésor et Ready Player One.

NdLR : un JdR très original, avec des défis rigolos. Il a été bien noté et aurait pu aller loin, mais il a été mis hors classement car en dessous du nombre de signes (respectez les consignes du nombre de signes!)

Accrochez-vous pour votre 3e jeu, peut-être que l'inspiration viendra avec les 90% de transpiration ! Et si vous ne participez pas aux 2 premières étapes, proposez-vous aussi comme repreneur-plus grand Sauveur de tous les temps.

J’étais déçu par moi-même, mais ça ne m’a pas empêché de participer en 2020.

Bref, tout ce que je viens d’écrire est plutôt bateau, mais je ne sais que dire de mieux. 

Aimez ce que vous écrivez, faites-le du mieux que vous pouvez, et parfois, avec un peu de chance, votre travail et votre passion transparaîtront suffisamment dans votre œuvre pour qu’elle soit remarquée.

Ayez confiance en vous aussi, c’est sans doute une bonne chose ; même si je suis mal placé pour en parler : malgré mes victoires et prix, je n’ai jamais rien osé proposer à un éditeur professionnel. Comme quoi, il est plus simple de donner des conseils que de les suivre…

Tolkraft, juillet 2021.

(1) : Vu le succès critique et les bons retours sur Tel Ulysse ; et considérant que le jeu peut être amélioré sur plusieurs points et qu’il y a de la latitude pour élargir l’univers et la proposition de jeu, j’ai décidé de ne pas en rester là et de le retravailler un peu.

À venir, donc :

  • La publication dans Casus Belli d’une version mécaniquement améliorée et plus étoffée de Tel Ulysse – le livre d’Océanos. Cela devrait être publié dans le numéro 39.
  • Peut-être une partie en live sur la chaîne 2D6+Cool, histoire de montrer le jeu en action.
  • Et à long terme (j’aime laisser décanter mes projets et le temps passe vite ^^), je réfléchis à la publication de la version définitive du jeu, à laquelle j’ai convié Tunime, le premier forgeron d’Océan, afin qu’il nous propose sa vision du jeu. Attendez-vous à d’autres « livres » qui viendront compléter le « livre d’Océanos » et à quelques surprises…

Vous pourrez retrouver toute l’actualité du jeu et mes autres projets sur www.dendrobat.fr.

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